Le Jazz à Paris pendant l'entre-deux-guerres

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Lien vers l'émission : http://soundcloud.com/mcenron/le-jazz-pendant-lentre-deux

 

Étudiant en double licence d'Histoire et de LLCE Anglais, j'ai tout d'abord choisi d'opter pour une émission de radio dans le cadre du cours « Histoire en action », en effet, ayant déjà une expérience des milieux radiophoniques et musicaux je trouvais intéressant d'y concilier une réalité historique.
Par le passé j'avais donc déjà participé à des émissions mais dans un cadre complètement différent de la présente édition, il s'agissait à présent de passer du registre de simple intervenant à celui de réalisateur (ce qui a nécessité par ailleurs un certain nombre d'heures de formations au mixage).

L'ambition que j'avais en commençant le sujet était d'associer la dimension ludique du médium radiophonique à la rigueur historique, d'amener un maximum d'auditeurs à pouvoir s’intéresser à ce sujet et de livrer un contenu accessible mais riche, sans perdre la spontanéité radiophonique. D'utiliser la musique comme un élément d'illustration et non pas simplement comme un habillage.

Mon sujet, Le Jazz à Paris pendant l'Entre-deux-guerres, me semblait d'autant plus intéressant que je n'en connaissais que peu de choses et il paraissait enrichissant de le traiter de manière historique, de chercher à comprendre comment ce phénomène sociologique et musical allait marquer le paysage musical français, faisant swinguer les années folles pour atteindre le succès après guerre.

 

Les bornes chronologiques, depuis l'arrivée des troupes américaines en 1917, avec les premières revues de music-hall, jusqu'à la Seconde Guerre mondiale (débordant légèrement sur celle-ci) permettent de montrer une véritable dynamique, afin de faire ressortir des parcours (comme celui de Josephine Baker) mais aussi des phénomènes comme celui de mixité naissant avec le Jazz Français. Je souhaitais survoler les différentes périodes de l'histoire du Jazz : depuis l'engouement du public sensible à la nouveauté rythmique, jusqu'aux années trente, marquée par la reconnaissance du jazz comme un art véritable distinct de la variété. Puis étudier la mixité résultant du contact d'artistes français s'imprégnant du Jazz tels les précurseurs Django Reinhardt et Stéphane Grappelli.
Comme le disait Jeffrey H. Jackson dans son ouvrage Making Jazz French: Music And Modern Life In Interwar Paris, “Le Jazz fut la plus grande révolution culturelle connue par la France lors des années folles, celle-ci fut d'autant plus grande qu'elle transforma aussi la vision des musiciens de leur propre art” (p.187).

Photo: Django Reinhardt lors d'une répétition dans les coulisses de l'Olympia

 

Organisation:

L'émission est enregistrée en 1H15 pour une durée 45 minutes: elle comprend une interview de Ludovic Tournès coupée en 5 axes et 6 chansons servant d'illustration mais aussi d'accompagnement. Chaque morceau est introduit par une intervention au micro afin d'expliquer ce qui va suivre.
Les axes sont:

1°) La vision du Jazz par le Public et la question des salaires
2°) La dimension libératrice du Jazz dans une société en plein bouleversement et vivant une évolution de ces moeurs. Celle-ci passant aussi par la mixité (on évoque ici Django Reinhardt).
3°) Le rattachement des mouvements culturels au phénomène du Jazz
4°) L'importance du music-hall, havre du jazz dans le paysage culturel français et la vision de Paris perçue par les Jazzmen à leur arrivée en France
5°) Les différents mouvement du Jazz et l'occupation (ouverture menant à Josephine Baker).

 

Photo: Josephine Baker « la Venus noire » en 1935

Participants :

 

Photo ludovic tournès

Ludovic Tournès :

Professeur d'Histoire des Relations Internationales au XXe siècle à l'université Paris Ouest Nanterre, il est aussi un des plus grands spécialistes français de l'histoire du Jazz en France. Il a notamment publié New Orleans sur seine mais aussi Du phonographe au MP3. Une histoire de la musique enregistrée (XIXe-XXIe siècles), Paris, Autrement, 2008, 162 p. Il est également l'auteur de nombreux articles sur la sociabilité musicale et le Hot club de France.
C'est à partir son interview, montée de manière à aborder différents thèmes que s'est basée l'émission.

Rym Casablancar :

Jeune contrebassiste encore au Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris (CNSMDP), elle montre une grande passion pour le sujet, pour sa première intervention radiophonique.
Elle remplaçait Victor qui devait originellement intervenir mais avait dû annuler pour cause de concert.

Radio Campus Paris  :

Cette radio associative et étudiante (hébergée à la Maison des initiatives étudiantes de la Mairie de Paris) a été fondée en 1998 avec pour volonté de créer un nouveau média alternatif pour tous les étudiants franciliens. Elle bénéficie d'un demi-créneau sur la bande FM (de 17h30 à 5h30 du matin), et ses émissions sont accessibles sur Internet. http://www.radiocampusparis.org/

Photo: Le  « Hot club de France » comprenant les deux frères Reinhardt aux guitares et Stéphane Grappelli au violon  

Bilan :

J'ai trouvé cette expérience enrichissante : devoir s'adapter à la logique radiophonique dans un cadre spécifique comme celui de l'Histoire étant un défi intéressant.
En effet, la logique historique est très spécifique et elle nécessite un bon esprit de synthèse, mais aussi une grande précision basée sur une bonne base documentaire.
Lors de l'interview de Mr Ludovic Tournès il fut captivant de constater que contrairement à des interviews de musiciens que j'avais pu rencontrer, il faut être précis dans ses questions.
De plus, il est capital de s'adapter aux différents imprévus: dans le cas présent, après avoir interviewé M. Tournès à la Bnf, il m'a fallu ensuite, pour cause de bruits parasites trop nombreux, passer un certain temps à remixer le tout ; ou encore, il m'a fallu remplacer un intervenant au dernier moment, le jour de l'émission, le jeune musicien que je devais interviewer n'ayant pas pu venir pour cause de concert.
Cette expérience radiophonique et historique fut enrichissante mais probablement légèrement trop complexe pour une seule personne et bien qu'ayant réussi à mener le projet à bien je conseillerais aux étudiants qui souhaiteraient faire de même de ne pas s'y atteler sans un partenaire, le nombre des démarches et recherches à faire étant conséquent.
Mais je conseillerai sans hésiter cette expérience : l'idée d'associer un format ludique à une véritable réflexion permet de mieux appréhender la réalité historienne ; car, hors du contexte universitaire, cela permet de réaliser que les acquis et la méthodologie qu'elle offre sont de véritables atouts.

Photo: la « Revue Nègre » , 1925, menée par Joséphine Baker représente le véritable point d’orgue d’une vogue exotique de la négritude.


Bibliographie :

Catalogue en ligne de l'exposition du Quai Branly « le siècle du Jazz »

http://www.quaibranly.fr/uploads/media/Le_Siecle_du_Jazz_-_10_mars-28_juin_2009.pdf

Le catalogue de l'exposition du Quai Branly résume bien à travers différentes représentations, l'exotisme et la nouveauté de ce style récupéré aussi bien par les surréalistes que par les cubistes.
Une parfaite introduction.

TOURNES, Ludovic, New Orleans sur Seine (histoire du jazz en France), Paris, Fayard, 1999, 501 p.

Cet ouvrage de référence couvre toute la période de notre sujet et bien au-delà (jusqu'en 1986).
Premier de cette importance jamais écrit sur le sujet d'un point de vue français, ce livre est enrichi de nombreux documents iconographiques inédits. Il donne une véritable vision d'ensemble des dynamiques et évolutions du Jazz qu'accompagnent ce mouvement musical montrant bien les différentes récupérations, le métissage mais aussi les bouleversements sociologiques

MARTIN, Denis-Constant et ROUEFF Olivier. La France du jazz. Musique,modernité et politique dans la première moitié du XXe siècle. Marseille:Parenthèses, coll.Eupalinos,314p.

Dans La France du Jazz, Denis-Constant Martin replace dans son contexte historique l’arrivée du jazz et examine ses effets sur la France des années 1910 aux années 1950. Le « jazz band » devient populaire par un effet de mode et interroge le pays sur sa propre identité et ses rapports à l’Autre. L’étrangeté à la fois inquiétante et rassurante de la musique afro-américaine constitue un élément essentiel de son attrait.

Les Mémoires de Joséphine Baker, recueillies par Marcel Sauvage et assorties de 29 dessins de Paul Colin, Éditions Dilecta, 2006

" Les Mémoires " de Joséphine Baker, recueillis pendant plus de vingt ans par le grand journaliste de l'entre-deux-guerres Marcel Sauvage, initialement publiés en 1949, et enfin réédités avec des dessins de l'artiste et affichiste Paul Colin.

Ces mémoires parcourent la vie de Freda Joséphine Mac Donald, née le 3 juin 1906 à Saint-Louis, aux Etats-Unis, d'une famille pauvre en pleine ségrégation: son arrivée en France, ses débuts à Paris, son triomphe aux Folies-Bergère, ses amours, son engagement dans les services de renseignement et son action aux côtés du général de Gaulle.

JACKSON, Jeffrey H., Making Jazz French: Music And Modern Life In Interwar Paris, Duke University Press, 2003
SHACK, William, Harlem in Montmartre, a Paris jazz story between the great wars, Los Angeles, Samuel A Floyd Junior, 2001.

Deux ouvrages américains donnant le point de vue américain de l'évolution du jazz en France. Le premier est très rigoureux tandis que le second se veut plus proche d'une fresque et se lit comme un roman, deux ouvrages indispensables néanmoins pour mieux comprendre la surprise et la vision des Jazzmen à leur arrivée en France.