Un homme est allongé sur son lit. Livide. Des draps bleus couvrent son sexe. Lueur blanchâtre. Les yeux ouverts, perdus dans le vide. Il semble mort. Il cligne des yeux, son regard bouge. Il se lève. Hors champ, il ouvre les rideaux. Lumière sur les draps froissés. Un titre : S H A M E.

 


Voici le premier plan du film. Voici Brandon. Brandon est seul. Il enchaîne les conquêtes féminines. Le sexe, il en abuse, désabusé. Il est addict. Brandon est tourmenté. Sa sœur Sissy, installée chez lui provisoirement, ne l’est pas moins, perdue, déjantée. Brandon la rejette, ne voulant pas affronter son propre reflet dans la souffrance de sa semblable.

Après avoir montré la décadence d’un corps en mettant en scène le combat de Bobby Sands dans Hunger, le réalisateur Steve Mc Queen retrouve l’impressionnant Michaël Fassbender pour filmer maintenant la décadence d’une âme. Dans une atmosphère pesante mais une esthétique saisissante, on suit, accroché au siège, un être qui se détruit dans ses pulsions. New York, sombre, écrasante, devient symbolique de cette détresse qui habite Brandon et Sissy.
 
Ici, le sexe, objet de désespoir, est filmé autrement. Froidement. Via le prisme de cette honte qui ronge le personnage. Ainsi cette magnifique mais terriblement triste scène où il fait l’amour à deux femmes. Plans serrés sur les corps, rapports passionnels, lumière dorée… Et pourtant, pas de bruits de coïts, pas d’exaltation enflammée, seulement cette superbe musique d’Harry Escott qui résume tout le tourment de cet homme, en plein acte.
 
Vous l’aurez compris, ce n’est pas à voir un dimanche aprés-midi d’hiver. Mais voilà, Shame atteint. Shame pénètre. Shame bouscule. Steve Mc Queen nous livre un film noir, très noir, aux propos dérangeants et aux scènes parfois très éprouvantes. Avec comme sujet principal cette hypersexualité, le réalisateur ne tombe cependant pas dans l’obscène ou la pornographie mais nous offre une œuvre d’une sensibilité et d’une profondeur bouleversante, à travers une mise en scène des plus gracieuses.
 
 
Ci-dessous, la bande annonce avec, en fond sonore, l’interprétation langoureuse de New York, New York par la troublante Carey Mulligan :
 

Sorti le 7 décembre 2011.  Grande Bretagne. 1h39 min. Interdit aux moins de douze ans.
De Steve Mc Queen (II). Avec Michaël Fassbender, Carey Mulligan, James Bagde Dale, Nicole Beharie, Lucy Walters.
 
 
 
Marie Devier
 
 
 

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