Et maintenant on va où?
mer, 01/11/2012 - 20:42 | Ajouter un commentaire
Après un premier film salué en 2007, Caramel, Nadine Labaki reprend la caméra pour une nouvelle fable, à la fois naïve et universelle. Et maintenant on va où? Au gré de ruptures déroutantes, entre tragédie grecque et comédie italienne, suivez le guide, Nadine Labaki et la musique de Khaled Mouzanar nous emmènent...
A utopia, petit village sans nom, d'une trentaine d'habitants, au milieu de nulle part, dangereusement relié au monde par un petit pont tortueux que seuls empruntent deux adolescents et leur mobilette chargés du ravitaillement.
Dans un microcosme de paix. De l'autre côté du pont, hors champs, la guerre tonne...mais “l'extérieur reste à l'extérieur”, ici le maire, le prêtre et l'imam partagent une autorité débonnaire et les petites histoires de village semblent suivre leur cours.
Vers la guerre, celle qui suinte malgré tout sur cette communauté que les informations du monde, rapportées par la télévision et la radio, vont perturber. Incidieusement elle refait sa place dans la conscience des hommes et chacun en fait une affaire personnelle. Dès que le moindre conflit éclate, deux camps se forment naturellement: les chrétiens et les musulmans, séparés jusque dans le cimetière du village. Loin de ses habituels chiffres surréalistes on ressent toute l'absurdité de la guerre à échelle humaine.
Au pays des femmes, qui refusent de continuer leur vie dans le rôle de pleureuses d'hommes, de maris, de fils et décident de mener une guerre contre la guerre. Par de petites ruses du quotidien, dont je vous laisse la surprise, elles tentent de distraire leurs hommes de cette tentation belliciste toujours au bord de l'étincelle.
Droit dans le mur ont dit certains critiques qui ont reproché sa légèreté de ton à Nadine Labaki, raillant un esprit comédie musicale à la Jacques Demy et une image filtrée à la Jean-Pierre Jeunet. Ils semblent avoir mal accepté la fantaisie quand ils attendent du cinéma libanais qu'il soit réaliste, grave politique ou révolutionnaire.
Au Liban, peut être, sûrement, pays où fait rage depuis 1975 une guerre fratricide entre chrétiens et musulmans. Mais peu importe, c'est la lassitude d'une guerre sans fondement qu'incarne ce village. Chez les femmes, cette lassitude est telle que c'est à en perdre la foi. Elles la garderont pourtant, plus fortes que tout pour montrer qu'elle n'a ni couleur ni nom, qu'elle se cache aussi bien derrière un tchador que derrière une croix.
Sortie en salle le 14 septembre 2011, DVD le 18 janvier 2012
1h50
Réalisé par Nadine Labaki
Avec Nadine Labaki, Claude Msawbaa, Leyla Fouad...
Nisrine Chiba