On a beau connaître leur talent, leurs envolées musicales -tantôt électroniques, tantôt rocks, tantôt classiques- on se laisse toujours submerger par l'excitation et l'appréhension d'un concert. À Bercy, sous l'effluve d'un crépuscule d'automne, Radiohead allait offrir son essence et envoûter son public deux heures durant.

Ce soir du vendredi 12 octobre 2012, Thom Yorke, Jonny Greenwood et leur bande donnent leur second concert de la semaine à Paris. Dans la salle, des « Radioaddict » se sentent comme à la maison et foulent pour la seconde fois de la semaine la fosse de Bercy pendant que des nouveaux fredonnent les airs qu'ils désirent entendre. On imagine que pour ce groupe au volume discographique phénoménal la partie est gagnée d'avance. Mais comment satisfaire un auditoire si nombreux et hétérogène dans une salle où la chaleur intimiste et l'aisance acoustique sont ébranlées ? Du haut de ses vingt ans de carrière et de sa scène lumineuse, le groupe britannique fait un choix : les accrocs au riff aigu et au jus mélodique cadencé n'auront que très peu l'occasion d'entrer en transe et de faire tomber leur voisin dans un mouvement de foule.

En éveillant la salle avec Lotus flower, extrait de leur dernier album The King of Limbs, Radiohead saisit le public comme il cueillerait une jeune fleur et le regarde lentement s'épanouir. L'atmosphère mystique et expérimentale, si chère à nos protagonistes, envahit les lieux et inquiète la foule. Si bien que lorsque The Gloaming* se joue, c'est le public qui tombe dans l'obscurité. Mais, transcendé par la voix bouleversante de Thom Yorke, assis au piano pour interpréter You and Whose Army ?, le public éclot enfin. La profondeur mélodique de cet hymne, aussi mélancolique qu'épique, insuffle une seconde vie au concert et ne laisse plus l'énergie retomber.

Rebelote à l'ouverture du premier des trois rappels où une prouesse vocale de Thom Yorke, interprétant Exit Music (for a film), fait frissonner la salle, hypnotisée et émue par son leader enchanteur. Sous l'euphorie, la foule peut alors tout entendre et se laisse manipuler par le virtuose Jonny Greenwood et sa maîtrise inouïe de la guitare électrique. On se réjouit et imite les danses lunaires au rythme syncopé du chanteur dès lors qu'un solo électronique fleurit sur scène. On reprend son souffle, on applaudit, on a encore les muscles qui s'agitent mais les lumières se rallument. La scène et la cour se vident et, pris de panique, on consulte soudainement son iPod. Ouf, il comporte bien quelques morceaux de Radiohead, pour le trajet de retour.  

Christelle F. 

*crépuscule en anglais.

 Reckoner, extrait de In Rainbows, live Bercy 2012 :

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