Interview de la Compagnie de l’Alambic 

A peine débarrassés de leur grimage et toujours très à leur personnage shakespearien, trois des héros du Roi Lear sont venus à notre rencontre : Florian Onnéin, le metteur en scène, Flora Gervais, Goneril en fourrure, et Chloé Droulin, Edmond en débardeur, ont répondu à nos questions.

 

 

 

Quelle est l’origine de la compagnie de l’Alambic ?
 
F.G. : La compagnie s’est créée officieusement en novembre de l’année dernière autour du projet du Roi Lear, mais dans le but de créer une troupe. D’abord hébergés par une autre association, nous sommes devenus autonomes en septembre 2012. On se connaît tous grâce à la fac, même si on vient d’horizons différents : étudiants d’arts du spectacle, en arts visuel, en gestion de projet … On souhaitait mutualiser les compétences autour d’une même envie pour le théâtre.
 
F.O. : Quant à l’idée du Roi Lear, elle vient d’une lecture que j’avais faite de cette pièce. On a envie de s’attaquer à des fables, de raconter des histoires et d’articuler à travers ces histoires les rapports qui s’y trouvent : le rapport au pouvoir, le rapport au peuple non présent. Que peut-on en faire devant les spectateurs ? Que peut-on rapporter du XVIIe siècle ? Voilà ce qui nous plaît chez Shakespeare.
 
Qu’est-ce qui est apporté par un travail sur différentes traductions ?
 
F.O. : On a d’abord cherché à avoir le texte anglais même si l’on n’est pas parfaitement bilingue. Enfin, on a pu lire sept traductions françaises différentes et on a finalement choisi une traduction plus contemporaine et adaptée pour le plateau (celle d’André Markowicz). Cette traduction a été faite pour des comédiens. Pour les passages en vers, on a fait appel à un texte différent. A cela, on a ajouté un prologue, que nous avons écrit de même que certains passages ont été ajoutés.
 
Pourquoi avez-vous choisi de ne présenter que les deux premiers actes ?
 
F.O. : Notre problématique initiale est la naissance de la tragédie. Après avoir présenté le premier acte, on s’est rendu compte qu’en abordant la pièce suivant cette direction, c’était plus cohérent avec le deuxième acte. En effet, cet acte finit vraiment le cycle des trois filles (Lear est chassé). Donc cela ferme quelque chose de cette intrigue et en ouvre une autre : la traversée initiatique de Lear. On observe le même phénomène pour la seconde intrigue : l’exposition d’une situation initiale et son renversement.
 
Considérez-vous le travail sur la pièce comme achevé ?
 
F.G. : On ne sait pas si l’on va continuer, mais en revanche, dans la logique de la Compagnie, on cherche à représenter notre forme longue dans des festivals étudiants. En parallèle, des formes courtes sont en réflexion : ces formes sont construites sur des axes thématiques et centrées sur certains personnages. On va donc poursuivre un processus de création autour du Roi Lear, mais cela ne s’étendra pas forcément jusqu’à la fin de la pièce.
 
Quelle sont vos clefs de lecture du texte ?
 
F.O : Que ce soit à ce stade de notre travail ou dans les étapes précédentes, la forme de notre interprétation évolue lorsqu'on joue devant un public différent. Ce qui nous plaît dans ce texte, c'est la structure même de la pièce qui ressemble à un conte et en même temps qui expose des enjeux politiques et une course au pouvoir. De plus, la pièce renvoie également à l'univers de la Commedia avec la figure des deux pères qu'on appelle dans la troupe les « deux vieux ». Nous n'avons opté ni pour le conte, ni pour la Commedia, ni pour les figures, mais sur un travail englobant ces trois idées. Finalement, on s'interroge surtout sur le représentant du pouvoir dans la famille et sur le microcosme du pouvoir.
 
Vous travaillez avec ce que vous appelez les masques. Pouvez-vous nous en dire plus sur cette méthode de travail ?
 
F.O : Notre jeu se développe effectivement par ce qu'on appelle le masque, c'est un travail qu'on peut comparer à celui de la Commedia puisque dans le jeu de la Commedia, le masque sur le visage entraîne une déformation physique sur le reste du corps et également une pensée unique. Par exemple, Arlequin a les jambes pliées, il est rapide et il a une pensée autonome. Pour nous, le processus est le même mais nous ne travaillons pas avec l'objet lui même. De plus, on transpose ces personnages sur les « personnages » de 2012, notamment les figures du pouvoir. On cherche donc à travailler les personnages à partir du corps, comprendre leur rapport à l'espace, aux partenaires de jeu et aux spectateurs et définir quel personnage correspond à quel masque à partir d'improvisations. Ce qui est pratique dans ce travail là, c'est que les appuis physiques créés pour un personnage peuvent facilement être transmis à un autre acteur, en changeant simplement le physique et la démarche comme un torse en avant et une jambe tendue. Ce travail sur le corps permet de distribuer les rôles à plusieurs acteurs de la troupe. C'est très enrichissant pour un acteur de pouvoir travailler sur différents personnages.
 
Quelle interaction existe-t-il entre vous et le public ?
 
F.O : Tout d'abord, le travail du masque se construit par rapport aux spectateurs car les réactions sont visibles et directes et on peut observer de quelle manière le masque fonctionne et fait réagir. Ensuite, notre objectif est de présenter des formes courtes du spectacle dans des endroits différents comme des collèges des lycées et de pouvoir débattre et expliquer pourquoi on se déplace vers le public et pourquoi on décide de jouer dans ces lieux là et pas dans des théâtres.
 
C.D : Le rapport au public se fait sur le plateau et au moment des rencontres avec le public par des activités supplémentaires, notamment grâce à des débats et des ateliers. On essaye d'organiser des rencontres avec des collégiens et lycéens dans lesquelles on se positionne soit en tant qu'acteur soit en tant que personnage.
 
 
Constance D. et Florence GA.

 

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