En apesanteur

mar, 12/18/2012 - 18:30 | Ajouter un commentaire

Embarquons pour une traversée au coeur des étoiles. Destination : le Palais Garnier. Au cours de cette expédition chorégraphique, hypnotique et cosmique, pénétrons au coeur de quatre créations. Spécialement conçues pour le ballet de l'Opéra National de Paris,  elles ont bouleversé l'histoire de la danse contemporaine et mêlent à la perfection la musique, la danse et la lumière.

  Déjà le fait de prononcer leurs titres nous transporte. In the Middle, Somewhat Elevated, O złozony / O compositeWoundwork 1 ou encore Pas. / Parts suscitent d'emblée notre curiosité, et évoquent quelque chose de mystérieux. Mais lorsque l'on y ajoute les noms des chorégraphes William Forsythe et Trisha Brown, tout laisse à penser que ce voyage chorégraphique nous emportera dans l'univers du spatial, de la technique poussée et de l'inédit.
 
    William Forsythe avait pour habitude de déstructurer à l'extrême les pas du ballet classique dans ses chorégraphies, pour en faire des enchaînements d'une rapidité et d'une complexité rares. Le chorégraphe aimait l'idée que n'importe quelle partie du corps puisse fournir une énergie telle, qu'elle nous amène à exécuter des mouvements remarquables de force et de nouveauté. Ainsi le langage qu'il développe dans l'intégralité de son œuvre repose toujours sur cette idée du dépassement de soi. La vitesse d'exécution, la virtuosité technique mais aussi la recherche constante d'un juste milieu entre équilibre et déséquilibre sont les maîtres mots de ses ballets. Woundwork 1 et Pas./ Parts illustrent à la perfection la manière de défier les lois de la gravité et présentent une chorégraphie caractérisée par des jeux d'équilibres savants, rythmés par la musique originale de Thom Willems spécialement créée pour les ballets de Forsythe.
 
    Aux côtés de ces trois œuvres s'immisce la post modern dance de Trisha Brown. Le courant chorégraphique dans lequel elle s'inscrit (la post modern dance naît aux Etats-Unis au début des années soixante et se prolonge jusqu'à la in des années soixante-dix) précède celui de William Forsythe mais sa technique et ses idées, basées sur la recherche esthétique des corps, restent encore aujourd'hui résolumment novatrices: Dans O złozony / O composite la chorégraphe nous transporte au cœur des étoiles, en plein Univers. Là encore la thématique de la gravité est bien visible, et nous voilà entraînés dans un monde de paradoxes: bien que l'on assiste à la recherche constante du déséquilibre, ou aux effets de l'apesanteur sur les corps, tout paraît fluide, calme, d'une légèreté extrême.
 
     O zlozony / O composite est interprété par les trois danseurs étoiles Aurélie Dupont, Nicolas Le Riche et Jérémie Bélingrad, tous de blanc vêtus afin de rappeler le Cosmos dans lequel ils évoluent. La musique épurée de Laurie Anderson nous emporte dans un univers de sérénité, et nous invite à entrer dans le monde flottant, insaisissable et éphémère de Trisha Brown.
 
   Bien que leur technique chorégraphique soit opposée, William Forsythe et Trisha Brown aspiraient finalement tous deux à la perfection. Mais c'est justement le rapprochement de ces quatre œuvres qui les subliment et qui fait leur singularité. Si celles de Forsythe insistent sur la précision du pointé et la force du mouvement, l’œuvre de Brown nous emporte dans ce qu'elle a de plus doux, de plus imprécis, de plus infini...

                                                                                                                                                L. L.

Palais Garnier, du 3 au 31 décembre 2012

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