Les Groseilles de novembre (Chroniques de quelques détraquements dans la contrée des kratts), Andrus Kivirähk, 2014

Edition le Tripode
 
Le roman Les Groseilles de novembre se déroule au cœur de l’Estonie, dans une époque qu’on suppose médiévale. L’auteur nous décrit un petit village, certains de ses habitants et l’ambiance qui y règne. Dès les premières pages, il nous invite à quitter notre monde, à dire au revoir à nos connaissances pour mieux nous plonger dans un univers où toutes les règles semblent être inversées. Il nous invite dans un lieu au climat froid et désagréable, où la neige n’est pas attendue mais redoutée. Ce village est construit autour d’un manoir, lieu habité par ceux qu’on appelle des « maitres », de riches propriétaires que l’on ne voit cependant presque jamais et qui ne semblent être réellement considérés que pour leurs réserves de nourriture. En effet, les gens du village se servent de leurs kratts, créatures fantastiques issues du folklore estonien, pour aller voler au manoir. Cela n’est cependant puni par personne, les habitants allant même jusqu’à se voler entre eux.
 
 
Le tableau que nous dresse l’auteur est plus que folklorique. Balloté dans entre des personnages hauts en couleur aux caractères exacerbés et des manifestations magiques, le lecteur s’habitue néanmoins aux situations surprenantes. Le quotidien des protagonistes devient presque celui du lecteur. On ne s’étonne plus alors de voir Jaan le valet manger du savon ou boire de l’encre, pas plus que le fait que la peste se montre tour à tour sous forme de cheval ou de femme ne nous interpelle. Les personnages comme les situations nous paraissent lointains et pourtant cela ne nous empêche pas de s’attacher à eux, de chercher à les comprendre.
Cependant, au travers de cet univers fantastique, l’auteur semble porter la voix des Estoniens de l’époque. Ainsi, certains villageois se plaignent de ceux qui sont venus pour leur imposer leurs croyances : si le village a son église et est souvent visité par le diable (appelé le Vieux-Païen), les villageois semblent plus attachés aux légendes qu’au récit de la Bible. Derrière ce qui nous semble absurde, l’auteur cherche à nous communiquer un certain état d’esprit, à nous faire voyager entre ce qui n’est que légende et ce qui s’attache au réel. Il nous montre le monde comme le voient ces villageois et non comme le bon sens nous invite à l’envisager.
 
Ce roman, dont chaque chapitre correspond à un jour du mois de novembre, est donc parfait pour se plonger dans l’hiver avec humour. Il sait à la fois nous glacer le sang, nous décontenancer et nous enchanter. Une belle découverte.

Article écrit par Lore Apestéguy
 
 

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