Classe-moi si tu peux : Björk en 7 genres musicaux
Soumis par laureline.guilloteau le sam, 10/08/2016 - 20:08Björk, c’est l’artiste inclassable. Elle semble s’être imprégnée de chaque genre musical pour mieux en faire exploser les codes. L’expérimentation est son mot d’ordre. La voici révélée en 7 genres différents.
On la classe tantôt comme une artiste R’n’B et electro1, tantôt elle apparaît comme une musicienne post-punk qui s’essaye à tous les courants de pop music. Sa page Wikipédia bat celle de Facebook en lui attribuant pas moins de onze genres musicaux. Mais enfin, Björk ? C’est quoi comme musique ?!
Il faut savoir que, dès le départ, Björk reçoit une solide formation musicale. Très jeune, elle prend des cours de solfège, de piano et de flûte au sein d’une école de musique classique, mais elle s’imprègne également des musiques que ses proches écoutent. Ainsi, sa mère l’initie au rock avec Jimi Hendrix et à la folk avec Simon & Garfunkel, tandis que ses grands-parents complètent son éducation en lui faisant écouter des musiques classiques et des opéras. Tout cela sans oublier l’influence des chansons traditionnelles islandaises, qu’elle reprend dans son premier album éponyme.
Toutefois, nous pouvons dater l’émancipation musicale de Björk au moment de la punk revolution. À partir de la fin des années 70, elle forme plusieurs groupes qui oscillent entre le post-punk et le rock comme Exodus, Tappi Tikarrass, et KUKL. Les compositions musicales post-punk sont plus élaborées et plus expérimentales que le punk en lui-même. Elles puisent davantage dans d’autres styles musicaux comme le disco et le dub, cette diversité confère au post-punk une dimension plus « arty » que le punk. Pour écouter un exemple de post-punk by KUKL c’est par ici.
Ses groupes Exodus et KUKL sont également très influencés par le jazz et Björk elle-même écrit quelques titres jazzy sans pour autant les enregistrer, à cette époque elle est plutôt occupée par les tournées de KUKL puis de The Sugarcubes. Cependant, elle sort l’album Gling-Gló en 1990, sur lequel figurent principalement des classiques du jazz repris en islandais, mais également des compositions originales en collaboration avec le groupe de bebop islandais Trio Gudmundar Ingolfssonar. De plus, elle sollicite des producteurs de jazz pour travailler sur son album Debut. À cette occasion elle rencontre la harpiste jazz Corky Hale ainsi que Oliver Lake et son groupe The World Saxophone Quartet. Avec eux, elle reprend à la fois des grands titres du jazz, mais elle crée également des musiques originales comme « Aeroplane » et « The Anchor Song ».
La musique de Björk est également très ancrée dans la pop, elle-même s’avoue une grande admiratrice de la chanteuse Kate Bush connue pour son approche originale de la pop music. C’est avec son groupe Sykurmolarnir, renommé The Sugarcubes en 1986, que Björk s’oriente résolument vers le courant pop qui influencera toute sa carrière. En général, on qualifie de « pop » les musiques qui reposent sur des mélodies que l’on retient facilement, notamment par des répétitions rythmiques ou des refrains. Certains de ses albums, comme Volta, ou singles, comme « Bachelorette », sont également qualifiés de « pop baroque ». Ce genre puise à la fois dans le rock et la pop, mais également dans la musique classique. Ainsi on y retrouve des instruments à cordes ou des cuivres qui lui confère sa dimension orchestrale2.
Au début des années 90, Björk collabore avec 808 State, un groupe de house britannique. C’est à partir de là que l’on peut dater son intérêt grandissant pour la musique de club comme la house et la techno. Puisque The Sugarcubes se séparent en 1992, elle a le champ libre pour s’essayer à d’autres styles musicaux. Tous ses futurs albums mêleront la musique électronique aux autres genres. Cette dernière se distingue notamment par l’utilisation de synthétiseurs et de boîtes à rythmes. On peut distinguer deux courants propres à l'electro : celle « pour danser » avec des styles tels que la jungle, la drum’n’bass et le trip-hop qui influencèrent les musiques de Björk à partir de son installation à Londres et sa fréquentation des fameux clubs. Le deuxième courant est quant à lui plus calme, composé pour être écouté seul à l’aide d’un casque audio ou pour chiller sur une musique d’ambiance. On pense alors à tous ces styles dérivés de la house et de la techno, souvent regroupés sous le terme d’ambient music ou electronica.
Jusqu’alors on remarque les nombreuses allusions que j’ai faite à propos du rock, il est clair qu’une majeure partie de l’oeuvre de Björk s’inscrit dans ce vaste courant musical. Comme toujours elle s’inspire de ce genre, elle l’explore et en repousse les codes. Ses albums Debut, Post et Volta sont définis, entre autres, comme du rock alternatif ou de l’indie dance / indie rock. Ces différents termes renvoient à une même réalité, celle d’un mouvement musical underground qui suit les traces du post-punk que l’on a déjà évoqué. Le rock alternatif regroupe des courants musicaux assez divers, le point commun de ces musiciens étant plutôt de collaborer avec des labels indépendants. Si l’on veut comprendre la tendance aux expérimentations musicales de Björk ces dernières années, il est bon de s’intéresser à ce sous-genre du rock qu’est l’art rock, d’autant plus qu’il aide à apprécier la démarche artistique des albums Homogenic et Vespertine. L’art rock relève d’une approche éclectique, « expérimentale et conceptuelle » de la musique rock. Il s’inspire entre autre du classique, du rock expérimental, des musiques psychédéliques et avant-gardistes etc. Le morceau « 5 years » est à ce titre une bonne illustration de ce qu’est l’art rock.
On peut conclure sur le fait que le genre musical de Björk est résolument expérimental et avant-gardiste. Par exemple, son album Medúlla est très conceptuel, il explore les profondeurs et les diversités des voix humaines en incluant des choristes islandais, anglais et inuits, les chanteurs Mike Patton et Robert Wyatt, des compositeurs tels que Matmos, Mark Bell et Mark « Spike » Stent ainsi que des artistes beat-box Rahzel et Dokaka. Son dernier album Biophilia tient davantage du projet multimédia expérimental, puisqu’il met en exergue le fonctionnement et la diversité des sons existants. Avec ses collaborateurs, Björk va même jusqu’à la création de nouveaux instruments tel qu’un « orgue contrôlé par électronique, un pendule de neuf mètres utilisant la gravité pour créer des motifs musicaux, un hybride de gamelan (percussions javanaises) et de celesta, ainsi qu’une extraordinaire boîte-à -musique géante »3. Pour accompagner ses musiques, la musicienne propose également une série d’applications et de clip en lien avec la nature et la science.
Björk ? C’est de la musique « transgénérique », à la fois singulière et multiple, visionnaire.
Laureline Guilloteau.
Sources :
Allmusic, Wikipédia et Spotify.