La mélodie des effroyables chérubins
Et si l'on faisait des Enfants terribles, le plus célèbre roman de Jean Cocteau, un opéra ? C'est l'idée audacieuse qui a germé dans l'esprit du compositeur américain Philip Glass : il s'agit, après Orphée et La Belle et la bête, d'achever en apothéose le triptyque d'opéras que celui-ci a consacré aux oeuvres de cette gloire nationale.
Près de quinze ans après sa première création, cette fable cruelle sur les jeux d’enfants et l'amour fusionnel entre un frère et une sœur rencontre toujours un franc succès auprès du public. La dernière production en date investira la scène du Théâtre de l'Athénée à partir du 23 novembre. Sa réputation la précède. L’association de la direction musicale d'Emmanuel Olivier et de la scénographie de Stéphane Vérité précipite le spectateur dans un jeu d’ombres mouvantes : composition musicale répétitive, images projetées en continu, vertige des sens recherché et obtenu. Ni la partition, jugée difficile, ni la jeunesse des chanteurs, qui pourrait en effrayer certains, ne constituent un obstacle à la réussite du spectacle. Elles contribuent au contraire à forger une grande, belle et harmonieuse illusion, une fantasmagorie d'enfant, un enchantement du spectateur. Cocteau affirmait qu'« une bonne salle de théâtre représente, prise en bloc, un enfant de douze ans qu'il convient d'atteindre par le rire et par les larmes ». Il ne vous reste qu'à courir à l'Athénée pour savoir si cette nouvelle cure de jouvence, toute en notes et en accords, produit sur vous pareil effet.
J.L.