La ronde des prix littéraires

ven, 11/05/2010 - 12:50

Au mois d’octobre il est déjà temps pour les jurés des prix littéraires de ratisser les vertes pousses de la rentrée. L’Académie française a remis son Grand Prix du roman à Éric Faye, le Prix Fémina revient à Patrick Lapeyre et le Prix Médicis à Maylis de Kérangal, dont le roman Naissance d’un pont est également en lice pour le Goncourt. Car c’est le 8 novembre qu’aura lieu la grand’messe de remise du Goncourt et du Renaudot, et le sacre attendu de Michel Houellebecq par l’un ou l’autre pour La Carte et le territoire. A moins d’une ultime facétie des jurés. En effet les plus sceptiques comparent ces prix à une mauvaise émission de téléréalité : son lot de rebondissements fades, comme l’éviction du bouc émissaire Amélie Nothomb ou la présence d’un auteur autoédité sur les listes du Renaudot, et des vainqueurs déjà élus par la production « Galligraseuil » (entendez Gallimard-Grasset-Seuil). Il est vrai que la frontière est mince entre la récompense des auteurs et le système des éditeurs. Alors les prix accentuent-ils le privilège des grands ou attirent-ils l’attention sur la diversité de la littérature française ? Parfois les deux se confondent : Fayard a été mis au bord de la faillite en ne proposant à la rentrée 2008 que six livres français (au lieu de dix), et on dit aujourd’hui que le livre de Virginie Despentes ne doit sa présence dans les dernières sélections (notamment du Goncourt) qu’à une volonté de sauver la maison d’édition. Sinon, on peut se pencher sur les listes de prix plus discrets comme le Prix du Livre Inter, ou le Prix Interallié. Et il faut surtout savoir saluer cette tradition aux allures de carnaval à la française, car si certains acteurs avancent masqués, c’est encore le signe que la littérature peut faire le spectacle dans l’actualité.

Lucie GUY



Les titres phares de la saison :

Michel Houellebecq, La Carte et le territoire, Flammarion, 428 p., 20,90 euros, paru le 3 septembre 2010.
Maylis de Kérangal, Naissance d’un pont, Prix Médicis 2010, Verticales, 316 p., 18,90 euros, paru le 26 août 2010.
Éric Faye, Nagasaki, Grand Prix du roman de l’Académie française, Stock, 112 p., 13 euros, paru le 18 août 2010.
Patrick Lapeyre, La Vie est brève et le désir sans fin, Prix Fémina 2010, POL, 348 p., 19,50 euros, paru le 26 août 2010.
Virginie Despentes, Apocalyse bébé, Grasset, 352 p., 19 euros, paru le 18 août 2010.