Larry Clark : un Lewis Caroll du XXIe siècle ?
lun, 11/01/2010 - 17:29
Que de tapage autour de « Kiss The Past Hello », l'exposition de Larry Clark au Musée d'Art Moderne ! L'interdiction aux moins de dix-huit ans a suscité les foudres des critiques. Il est vrai que l'ironie est saisissante : Larry Clark est acclamé pour avoir brisé des tabous sur l'adolescence et révélé avec talent les zones sombres de notre société. Ses photographies et ses films peignent la vie des jeunes américains, leur sexualité, leurs moments de grâce et leur cruauté, leur relation à la drogue ou aux armes. Interdire aux jeunes cette vérité qui les concerne, n'est-ce pas se tromper complètement sur l'œuvre de celui qui disait dans un entretien avec Les Cahiers du Cinéma : « Je veux que les kids se reconnaissent en voyant mes films, c’est très important pour moi. C’est étonnant de constater que la culture américaine est orientée vers la jeunesse, mais qu’elle ne lui parle pas vraiment » ? Pour les majeurs, il faudra donc aller à l'exposition en pensant aux autres « kids », et en cherchant en nous cette violence qu'est l'adolescence. On pourra aussi visionner la conférence sur le cinéma donnée par Clark mais surtout revoir ses films. Projetés dans leur intégralité à la Cinémathèque en octobre, ils sont à l'honneur à la Filmothèque du Quartier Latin. Another Day in Paradise, Bully et Ken Park sont interdits aux moins de seize ans, ils racontent les histoires de jeunes à la dérives : le premier est un road-movie sur fond de blues et de drogues ; le second retrace l'histoire du meurtre d'un adolescent par sept de ses amis et le dernier une chronique de la vie désenchantée de la middle class autour du suicide d'un jeune. Wassup Rockers, le seul accessible à tous, raconte le quotidien de jeunes latinos vivant dans un ghetto de Los Angeles, qui décident un jour d'aller à Beverly Hills pour faire du skate. Sans chercher à fétichiser son sujet, Larry Clark pose un regard emphatique sur cette jeunesse terrible et révèle en même temps les facteurs d'une dégradation sociale. On espère que les spectateurs sauront le discerner et que son œuvre gardera une complexité que l'on a refusée à Lewis Caroll.
Sophie Dolto
Le cycle Larry Clark à la Filmothèque du Quartier Latin : http://www.lafilmotheque.fr/
La rétrospective au Musée d'Art Moderne, jusqu'au 2 janvier 2011 : http://www.mam.paris.fr/fr/expositions/larry-clark
La leçon de cinéma " Clark par Clark" : http://www.cinematheque.fr/fr/dans-salles/rencontres-conferences/parlons-cinema-video/larry-clark-par-larry-clark-lecon-cinema,84.html