Rencontre avec Diana De Fex
La célèbre citation de Thomas Edinson « Le génie représente un pour cent d'inspiration et quatre-vingt-dix-neuf pour cent de transpiration » pourrait aussi s'appliquer au jeu d'acteur ! Actrice professionnelle, Diana De Fex nous raconte son parcours et c’est que représente être comédien aujourd’hui.
Adriana Gutierrez : Vous avez commencé votre carrière très tôt, Pourrez-vous nous raconter un peu votre parcours ?<?xml:namespace prefix = o />
Diana De Fex : J'ai voulu être actrice depuis que j'étais toute petite. J'avais cinq ans et mes parents m'ont amenée voir ma première pièce de théâtre. J'ai été émerveillée par l'effet théâtral des personnages en action, mais surtout par la comédienne qui jouait le rôle principal. C'est à ce moment-là que mon cœur a été conquis par ce magnifique art. Ou comme disent les américains « I was bitten by the acting bug ». J'ai demandé à mes parents de m'inscrire au cours de théâtre dans différents écoles. J'ai fait des pièces et court-métrages en amateur pendant toute mon enfance.
AG : vous êtes d'origine italienne et vous avez vécu votre adolescence aux Etats Unies. Comment commence votre carrière aux Etats-Unis ?
DD : Pendant mon adolescence aux Etats-Unis, J'ai intégré « The African-American acting ensemble » la troupe du théâtre du Centre cultural Afro-Americain de la ville de Charlotte, North Caroline, avec lequel j’ai participé dans plusieurs pièces, notamment « Day of Absence ». J'ai assisté à la Central Piedmont Community College pendant deux ans où je préparais un Associate degree in fine arts cela que m’a permis d’enrichir ma personnalité, d’ouvrir des portes et d’amplifier mes perspectives en tant que comédienne. C'est comme ça que je suis venue étudier trois ans à l'école Acting International à Paris. Et puis, en ayant fait des contactes dans la profession, j'ai décidé d'y rester pour continuer ma carrière ici.
AG : Que pensez-vous du métier du comédien aujourd'hui ? Quels sont les défis d’aujourd’hui?
DD : Aujourd'hui c'est un peu moins difficile qu'avant car le métier a gagné le respect de beaucoup de personnes et une meilleure réputation. La situation pour les comédiens s’est améliorée. En effet, il existe le statut d'intermittent, les syndicats d'acteurs, les aides consacrées à l'éducation et soutiens des comédiens. Le comédien est au moins reconnu et respecté comme un salarié ou travailleur sérieux et non pas un fou anarchiste égaré, sinon comme quelqu'un qui apporte à la communauté, qui a des idées originelles et qui peut avoir de l'autonomie au lieu d'être jugé comme un simple fou du roi.
La discrimination arrive dans tous les métiers, mais dans le « show business » c'est fréquent et même légal. Le directeur peut ne pas choisir un comédien parce qu’il est petit, noir, ou a un accent. C'est le droit et liberté du directeur de casting. L’industrie est réticente à donner les rôles les plus significatifs aux comédiens dont le profil n'est pas "commercial". Tel est le système économique actuel. Il faut s’adapter et travailler avec le corps, la voix, l’apparence et l'énergie qui se dégage. Il faut rester sûr de soi-même, connaître ses atouts et ses limites, il faut se battre contre la discrimination, montrer que les têtes dites « non commerciales » peuvent être intéressantes voire rentables. La passion et la persévérance sont nécessaires afin d’endurer ce genre de cruautés du métier. Salma Hayek est un grand exemple à suivre pour moi.
AG : Qu'est ce qu'est pour vous l'interprétation?
DD : C'est l'art de montrer des vérités alternatives tout en trichant, en mentant avec sincérité !
AG : Vous préparez actuellement une adaptation du Decameron de Jean Bocacce. Racontez-nous un peu cette pièce : comment vous préparez-vous à jouer votre rôle?
DD : Il s’agit d’une pièce fondée sur l'adaptation de quelques nouvelles de l'œuvre de Jean Bocacce, auteur italien du Moyen Âge. Le metteur en scène est Emilie Salimov. En général, la mise en scène est très corporelle c’est pour cela que je me prépare physiquement. Il y a beaucoup de pantomimes et de la danse. Tous les mouvements sont chorégraphiés. Il est nécessaire alors d'avoir une grande agilité et un parfait contrôle du corps.
AG : Quelle rôle jouez-vous dans la pièce et comment préparez-vous votre personnage ?
DD : Je joue le rôle de Tessa, une femme dont le mari est victime d'une farce. Ses amis lui font croire qu'il est "enceint". Tessa selon Boccace, est une femme « très comme il faut » qui soigne au mieux son mari et qui est bien soumise comme les femmes de l'époque.
J’analyse la pièce selon le point de vue de chacun des personnages puis selon l'émotion, l'optimisme, le recul, etc. Il faut trouver la motivation du personnage, le point commun entre la motivation du personnage et ma motivation personnelle, j’utilise des métaphores et des analogies. Cela me permet de donner la touche de vérité aux émotions du personnage. Je travaille également la caractérisation physique. Je trouve l'élément ou les éléments qui font vibrer mon personnage (eau, feu, air, terre, vide). Je trouve un centre moteur, la partie du corps qui guide son mouvement. Pour trouver tout cela il faut considérer les trouvailles faites de l'analyse de l'action et de la motivation. J'essaie de réconcilier les méthodes de Stanivslaski/Meisner (analyse de l’action, motivation) et de Michael Chekov (centre moteur, éléments).
AG : A votre avis quels sont les caractéristiques que doit avoir un comédien?
DD : Passion pour le métier, pas pour la gloire ou la richesse ou l’élégance avec lesquels il est souvent associé. Il s'agit de travail dur, non glamour et souvent beaucoup d'années de difficultés au niveau économique. Il faut vraiment aimer jouer pour pouvoir avoir de la persévérance et survivre dans la profession. Un comédien doit être quelqu'un de cultivé et de curieux, avec une soif d’apprendre et de découvrir le monde et les personnes qui l’y habitent. Finalement, la plupart des formations pour les comédiens sont axées sur trois aspects différents : le corps, la voix et les émotions. Un comédien, comme un athlète de haut niveau, doit entraîner son corps, sa voix, pour qu'elle soit souple et perçante, la reconnaissance et la maîtrise de ses émotions. Et quand je dis entraîner, c'est vraiment de l'entretien régulier. Il s'agit d’arriver à « être en forme » et puis de garder cette forme comme un sportif de haut niveau. Il est nécessaire également d'avoir une grande force psychologique.
Jouer sur le plateau, c'est prendre un risque, cela fait peur. Il faut prendre un certain goût pour cette sensation. L’acteur saute dans un abîme mais s’il tient le fil psychologique, il arrive à flotter, et c'est cela le plaisir de jouer.