« R » roulés et accent 1900, chapeaux melons, nœuds papillons et costumes trois pièces leur donnent des airs de Chaplin. Mais attention, Tim Burton n'est pas loin. Ne vous y fiez pas s'ils ont pour l'instant l'air un peu trop propret. Comme les clowns dont ils empruntent le maquillage et la folie, on se doute bien vite que derrière le plâtre dégoulinant des teints blancs se cache quelque chose de plus sombre, et de plus excitant... 

Le rideau s'entre-ouvre lorsque la voix de castrat de Martyn Jacques déraille et râpe dans des accents démoniaques, ou que les percussions d'Adrian Huge s'emballent à rendre fou et que la contrebasse d'Adrian Stout se transforme en scie musicale déchaînée.

Ce trio londonien formé en 1989, se fait connaître par une tournée mondiale avec leur opéra Shockheaded Peter. Ils n'ont de cesse depuis de cultiver leur style surréaliste qui fait de chaque montée en scène un cabaret de l'étrange, humoristique et sombre. Si leurs morceaux restent en général plus à regarder qu'à écouter, leur goût du spectacle s'est réalisé en 1999 lorsque leur travail fût utilisé dans le film Guns 1748 de Jake Scott et en 2009 lorsqu'ils accompagnent en direct le diaporama The ballad of Sexual Dependency de la photographe Nan Goldin dans l'enceinte du théâtre antique d'Arles pour les rencontres photographiques.

L'ambiance gipsy des orchestres klezmers est transportée dans les bas-fond de Soho, véritable mine pour ces messieurs Loyal en quête de monstres contemporains. Les portraits de créatures marginales ou nocturnes peuplent les « berceuses » ironiques et les valses possédées réservées aux oreilles averties...Cet univers de maquereaux, de prostituées, et de toxicomanes répond au goût pour le blasphème que cultive le parolier Martyn Jacques qui prend un malin plaisir à jouer dans ses textes avec le travestissement et l'humour noir pour composer le grand cirque de la condition humaine. Excentriques et fantaisistes, satiriques et acides, irrespectueux et intemporels, les Tiger Lillies nous emmènent sur les chemins peu fréquentables d'un opéra punk anarchiste qui ose faire se rencontrer le Clown Blanc et l'Auguste sur fond d'accordéon.

Dernier album en 2011: Woyzeck
En concert: Cité de la musique le 8 février 2012 à 20h, Théâtre B. M. Koltès Université de Nanterre le 8 Mars 2012 à 19h, Sous le chapiteau de la Défense le 20 Mars 2012 0 13H.


Nisrine Chiba