Un "art muet rendu bavard"
mer, 01/14/2015 - 01:00
Au musée du quai Branly, on y va pour voyager. On y va aussi pour se balader parmi cette flore exotique, étrangère à la ville de Paris. On y va enfin pour s’émerveiller devant tant de richesses venues de civilisations lointaines et étrangères . Du 06 mai 2014 au 18 octobre 2015, une installation prend place au cœur de ce monde à part. « Tatoueurs Tatoués », attire durant cette longue période d’exposition, autant de visiteurs aujourd’hui qu’à ces débuts. L’affiche dessinée par le conseiller artistique Tin-Tin séduit par son dynamisme et ses couleurs. Bien sélectionnées pour représenter l’exposition dans son intégralité, elle renvoie à une ambiance colorées et pleine de forme où l’on sent que le tatouage est érigé en art. L’exposition accueille le visiteur dans un voyage dans le temps afin de retracer l’itinéraire de cette pratique ancestrale. D’abord initiées par les ethnies de l’océan Pacifique, le tatouage servait de signe de reconnaissance sociale pour les communautés. Importés ensuite en occident afin de marquer d’un trait d’encre la marginalité des prisonniers, des malfrats et des prostituées, il a, au fil des siècles, été institutionnalisé tantôt comme marqueur discriminatoire dans les goulags, tantôt comme empreinte identitaire de rébellion. Hegel disait que l’ornement du corps érigeait l’Homme à un niveau spirituel supérieur. En se contemplant lui-même comme support d’œuvre d’art, de quelque mauvais goût que ce soit, il ne se laisse pas comme la nature l’a fait, il se retrouve lui-même. Aller voir cette exposition revient à chercher l’étonnement devant tant de pratiques différentes de cet art à part entière qui est né peu de temps après l’humanité. Elle vous fera redécouvrir d’où vient cette coutume qui vous a peut-être poussé vous-même à vous barioler la cheville ou l’omoplate et vous rendre compte que vous-même, dans quelques années, vous pourriez finir dans un musée. En effet, la diversité des supports ne manques pas. Photos de visages ou de corps, de personnes anonymes ou de célébrités, vidéos mettant en action le dos d’un hommes tatoués d’ailes qui se mettent à se mouvoir, morceau de peau humaine, extraite post-mortem, reconstitutions en silicone de corps humains entièrement tatoués, tout est fait pour être surpris. Le tatouage est un art vivant qui ne cesse d’évoluer tant que l’Homme le portera au cœur de la société. En attentant que tout cela ne cesse, il est appréciable de se laisser porter au cœur de « Tatoueurs Tatoués ».