« L'on est bien faible quand on est amoureux » : Madame de La Fayette sur les écrans
jeu, 12/09/2010 - 11:12
Après une incartade plutôt réussie aux Etats-Unis avec Dans la brume électrique, Bertrand Tavernier rentre au bercail de la culture française en adaptant La Princesse de Montpensier de Mme de La Fayette, avec l’inévitable Mélanie Thierry dans le rôle de l’héroïne éponyme. Il se propose de transcrire la beauté d’une écriture de la suggestion, avec une caméra qui refuse tout prosaïsme. Car, comme dans la nouvelle, il s’agit de brosser le tableau complexe d’une âme du XVIe siècle tiraillée par la passion, le devoir et la réserve, sur fond de guerres de religion. La reconstitution historique ambitieuse impressionne, mais le recours à l’ellipse ou à la métonymie (qui marque la scène de la Saint-Barthélemy) permet de ne pas altérer la centralité de l’analyse psychologique. On en vient à regretter qu’il ait fallu empeser certaines scènes avec des dialogues aux accents dix-septiémistes qui tombent souvent à plat dans la bouche des jeunes acteurs (« C’est folie Monsieur ! »). Un bémol également pour Grégoire Leprince-Ringuet dont le rôle du mari mal-aimé avait fait une « belle personne » devant la caméra de Christophe Honoré, mais qui livre ici une prestation peu crédible. Cependant on se réjouit de celle de Raphaël Personnaz, et on salue bien bas la sobriété exemplaire de Lambert Wilson, qui propose un comte de Chabannes dont la fêlure intérieure fait honneur au personnage de Mme de La Fayette. Mélanie Thierry, elle, est un bel objet de passion pour ces princes et incarne bien les tourments de cette princesse bien née et encline à rougir que le désir frôle. Le film de Tavernier n’est donc pas une adaptation sadique, et il n’est pas sot d’y consacrer 2h20.
Lucie Guy.
La Princesse de Montpensier, de Bertrand Tavernier, avec Mélanie Thierry, Gaspard Ulliel, Grégoire Leprince-Ringuet, Raphaël Personnaz, Lambert Wilson. Durée : 2h20. Date de sortie cinéma : 3 novembre 2010.