janv.
2
La sorcière du placard aux balais
Soumis par Anonyme le lun, 01/02/2012 - 17:41
Personnages :
Pierre
L’huissier de justice Maître Nadjar
Le chat magique Pipou
Le facteur
La voisine de Pierre
La sorcière du dressing
Bachir
Acte I scène 1
La scène se passe à la Poste. Pierre vient chercher un recommandé avec accusé de réception. Il ouvre le pli et lit le courrier.
« Cher Monsieur,
Merci d’avoir participé à notre grand jeu de la rentrée, gagnez votre « home sweet home » grâce à la Générale d’Immobilier !
Nous avons l’immense plaisir de vous annoncer que vous êtes l’heureux gagnant d’une maisonnette, avec chambre, cuisine américaine, petit jardin, salle de bain, living-room, pipi-room, et dressing.
Veuillez prendre contact avec Maître Nadjar, huissier de justice en charge du tirage au sort, afin d’entrer en possession de votre gain.
Encore félicitations Mr Quiroule, de la part de toute la Générale d’Immobilier !
Nous vous attendons dans les meilleurs délais afin de vous remettre les clés.
Dans l’attente de vous rencontrer, nous vous prions d’agréer nos sentiments les meilleurs,
L’Equipe de la Générale d’Immobilier »
PIERRE – Mais… Mais, c’est génial ! J’ai gagné une maison ! Super ! Moi qui ne gagne jamais rien… En plus, je ne me souviens même pas avoir joué ! D’ailleurs c’est étrange, je devrais peut-être me renseigner sur cette société, la Générale d’Immobilier, ça ne me dit rien, voyons voir déjà si ça existe !
Pierre sort son téléphone portable. Il appelle les renseignements.
PIERRE – Allo ? Je suis bien au 118 218 ? Oui, je vous appelle parce que je voulais savoir si la Générale d’Immobilier était bien enregistrée au registre du commerce et des sociétés… Oui, c’est bien ça, la Générale d’Immobilier, je crois que c’est une sorte d’agence immobilière en ligne…
Oui, elle existe ? Vous me confirmez qu’elle existe bien ? Parfait, merci beaucoup, je vous remercie pour votre aide, bonne journée, bon courage, au revoir !
Il raccroche.
PIERRE – Formidable ! Elle existe ! La société existe ! J’ai gagné une maison ! Je vais appeler tout de suite pour prendre rendez-vous avec l’huissier.
Il appelle l’huissier de justice depuis son téléphone mobile.
PIERRE – Allo maître Nadjar ? Oui, bonjour, Pierre Quiroule à l’appareil, j’ai reçu un courrier de la part de la Générale d’Immobilier, m’informant que j’avais gagné une maison suite à un tirage au sort organisé par la société… Oui, tout à fait… Mais c’est super, comment avez-vous eu mes coordonnées ? Non, c’est juste que je me souvenais pas avoir joué mais vous avez raison, qu’importe après tout je suis le grand gagnant… Oui, bien sûr, j’ai bien conscience de ma chance, gagner une maison comme ça du jour au lendemain, c’est sûr, ce n’est pas commun… Non, je suis très content, quand puis-je venir la visiter ? Comment ? Je peux passer prendre les clefs aujourd’hui ? Oh, mais oui c’est parfait, non, aucun problème, j’arrive…
Il raccroche. Pierre sort de la scène.
Pierre entre en scène, le décor a changé, c’est un bureau très sombre et assez miteux… L’huissier est assis à son bureau, il se lève pour accueillir Pierre.
MAÎTRE NADJAR – Mr Quiroule, Pierre, je peux vous appeler Pierre ? Félicitations cher Monsieur, vraiment c’est un plaisir de vous rencontrer dans ces conditions, c’est toujours un tel bonheur que de remettre ce genre de prix à nos grands gagnants ! Je suis ravi pour vous, la maison est superbe, elle n’attend que vous ! Vous y serez très heureux je peux vous l’assurer ! Vous êtes déjà propriétaire ? Non ? Eh bien, quelle chance ! Vous me comblez d’aise, je suis d’autant plus content pour vous !
PIERRE – Comment ai-je été sélectionné d’ailleurs ?
MAÎTRE NADJAR – Ah, cher Mr Quiroule, vous avez eu beaucoup de chance, votre mail a été retenu pour participer au grand tirage au sort, et c’est vous qui avez été désigné ensuite par ma main innocente comme le grand gagnant de notre jeu, organisé par la Générale d’Immobilier ! C’est exceptionnel, c’est la première fois que nous mettons en jeu un lot de cette importance, vous êtes vraiment verni, si je puis me permettre !
PIERRE – Ma foi, oui, c’est vrai qu’en général j’ai de la chance ! Et cette maison alors, quand est-ce que je pourrai la voir ?
MAÎTRE NADJAR – Mais mon petit Pierre, je vous remets les clefs tout de suite ! Vous pouvez dormir dedans si cela vous chante dès ce soir ! Elle est meublée, il ne manque que vos affaires ! Vous n’avez qu’à signer ce papier, qui indique que vous êtes le nouveau propriétaire de la maison… Voilà… L’adresse : 44 quart, rue de l’Entourloupe, à Mouffetard-lès-Broca. Voici les clefs… hihihi !
PIERRE – Magnifique ! Mais pourquoi riez-vous comme cela ?
MAÎTRE NADJAR – Mais je ne ris pas, mon cher Pierre, c’est l’excitation, je suis si content pour nous… Euh, pour vous, je voulais dire que nous sommes si contents pour vous… Hihihi…
PIERRE – Eh bien merci, je dois bien avouer que je suis tout fébrile moi aussi… C’est parfait, tout est en ordre ? Ce n’est pas une blague au moins, n’est-ce pas ? Parce que ce serait vraiment de mauvais gout, et j’ai un ami, Bachir, qui pourrait avoir ce genre d’idée tordue… Ce n’est pas un coup d’une émission de télé, genre Surprise surprise ?
MAÎTRE NADJAR – Mais voyons, cher Monsieur, pas du tout, Surprise Surprise c’est pour les célébrités de toute façon… Je puis vous assurer que je ne connais pas votre ami Bachir, et que vous avez vraiment gagné cette maison, hihihi, avec chambre, cuisine américaine, petit jardin, living-room, pipi-room et même un dressing ! Hohoho !
PIERRE – Et bien maître, votre enthousiasme me touche ! Je ne pensais pas que le métier d’huissier de justice était aussi drôle, je vous imaginais plus sinistre ! Mais c’est vrai que vous faites mon bonheur, je comprends votre excitation, mieux, je la partage ! Et je vais de ce pas visiter mon bien ! Encore merci mon brave, et mes remerciements à votre employeur, la Générale d’Immobilier !
Acte I scène 2
Devant la maison de Pierre. Pierre sort sur le pas de sa porte.
PIERRE – Mais elle est parfaite, cette maison ! Je me demande bien ce qu’avait l’autre imbécile à ricaner bêtement comme ça…
Le matin, le facteur fait sa tournée. Après avoir distribué le courrier du voisin de Pierre, il remonte sur son vélo et passe à toute vitesse devant la maison sans s’arrêter.
PIERRE – Eh bien dîtes donc ! Voilà autre chose ! Mais et mon courrier ? Qu’est-ce qu’il a, celui-là ? Il a jeté un de ces regards à la maison ! A croire qu’elle est habitée par le diable en personne ! Les gens sont très bizarres en ce moment… Je me demande si c’est encore une histoire avec la lune… Enfin, ils vont m’entendre à la Poste, hors de question que cet idiot me fasse ce cinéma-là tous les jours !
La pièce est pleine de cartons. Pierre jette un œil dans son réfrigérateur, puis s’adresse à son chat orange, Pipou.
PIERRE – Ah mon Pipou, on va être bien ici, toi et moi ! Je ferai des courses demain, mais en attendant ça te dirait qu’on appelle le resto japonais pour commander le dîner ?
PIERRE (au téléphone) – Bonsoir Monsieur, je voudrais commander deux menus H10 s’il vous plaît, oui celui avec les brochettes de bœuf au fromage et les shirashi saumon… À livrer, oui… Je vous donne mon adresse : 44 quart, rue de l’Entourloupe, à Mouffetard-les Broca.
PIERRE (fronçant les sourcils) – …
PIERRE – Comment ça, vous ne livrez pas dans ma rue ? J’ai vu un livreur de chez vous pas plus tard qu’hier chez ma voisine… Eh bien laissez-moi vous dire que c’est scandaleux, Monsieur, c’est du refus de vente, de la discrimination ! Vous venez de perdre un client, moi je vous le dis, et comptez sur moi pour vous faire de la mauvaise publicité, ah ça oui ! Allô ? Allô ? Le coquin ! Il a raccroché !
PIERRE – « On ne livre pas votre rue », ben tient, on va voir s’ils ne livrent pas la rue…
Pierre sort de chez lui. Il va sonner chez sa voisine.
PIERRE – Bonsoir Madame ! J’ai aperçu par hasard un livreur devant chez vous hier, je suis votre voisin de droite, je viens d’emménager et…
La voisine lui claque la porte au nez.
PIERRE – Ça par exemple ! Mais qu’est-ce qui se passe à la fin avec cette maison ? Je vais retrouver ce maudit huissier de justice, il a intérêt à me donner le fin mot de l’histoire, ce gredin ! Je sens qu’il y a quelque chose de louche avec cette affaire, il ne m’a pas tout dit sur la villa.
Acte I scène 3
Pierre, à l’étude de l’huissier Maître Nadjar
PIERRE – Maître, je sens qu’il y a quelque chose de pas clair avec ma maison… Vous avez intérêt à m’expliquer ce qu’il en est, sinon je vous préviens ça risque de mal finir !
MAÎTRE NADJAR – Mais voyons, cher Monsieur, calmez-vous ! Mais enfin, qu’est-ce qui vous prend ? Qu’est-ce que vous lui reprochez à la maison ? Je ne comprends pas, c’est une chance extraordinaire de gagner une maison, comme ça, sans rien faire…
PIERRE – Ne me prenez pas pour un imbécile ! Vous savez très bien qu’il y a un souci avec cette maison, d’ailleurs sans rien faire c’est bien le mot, je savais que je ne m’étais pas inscrit à un quelconque tirage au sort ! Espèce d’escroc ! Bandit ! Assassin ! Terroriste ! Vous m’avez bien eu ! Vous n’avez pas arrêté de vous moquer de moi lorsque vous m’avez fait signer l’acte de propriété ! Vous saviez très bien que vous me refiliez un fruit pourri ! Qu’est-ce qu’il se passe à la fin dans cette maison ? Je vous préviens, je vais appeler la police ! Je vais perdre mon calme, et c’est vous qui allez trinquer ! La Générale d’Immobilier, je t’en ficherais de la Générale d’Immobilier ! Filous ! Voleurs !
Il attrape l’huissier par le col et le soulève de terre.
MAÎTRE NADJAR – Mais lâchez-moi, espèce de malade ! Lâchez-moi, vous me faîtes mal, je ne peux plus respirer ! Vous n’aviez qu’à pas signer, espèce d’abruti ! Forcément qu’il y avait un truc ! On ne gagne JAMAIS une maison comme celle-là comme ça, par hasard ! Vous êtes vraiment trop naïf mon pauvre !
PIERRE – Attention, je sens que j’ai les nerfs qui lâchent ! Dîtes-moi tout de suite ce qu’il se passe, sinon je vous casse la tête ! Attention, je ne réponds plus de rien, ça va mal se finir pour vous si vous continuez à me provoquer comme ça !
MAÎTRE NADJAR – C’est bon ! Calmez-vous, c’est bon, je vais tout vous dire… De toute façon vous avez signé… La maison, votre maison… Elle est hantée !
PIERRE – Hantée ? Mais par quoi ?
MAÎTRE NADJAR – Par la sorcière qui vit dans votre dressing !
PIERRE – Une sorcière dans mon dressing ? Mais c’est une blague ! Vous vous fichez de moi ! J’y vis depuis une semaine dans la maison, et je n’ai jamais vu de sorcière dans mon dressing !
MAÎTRE NADJAR – C’est normal ! Elle ne vient que la nuit.
PIERRE – La nuit ? Mais qu’est-ce qu’elle fait la nuit ?
MAÎTRE NADJAR – Qu’est-ce que j’en sais moi ? Rien, elle reste tranquille, elle attend ! Mais si jamais un jour, vous avez le malheur de chanter : « Sorcière, Sorcière, prends garde à ton derrière ! »
Alors là, elle sort, et c’est tant pis pour vous ! Hohohohohohohohohohoho
PIERRE – Mais vous passez les bornes, sale arnaqueur ! Et vous riez encore ! Je vais vous faire la tête au carré moi, espèce de fourbe ! Vous ne pouviez pas me prévenir ? Suppôt de Satan !
MAÎTRE NADJAR – Mais non ! C’est ça le plus beau ! Nous voulions à tout prix nous en débarrasser, de cette maison ! Et vous étiez si content de la gagner ! Le parfait pigeon ! Hahahahahahahahahahaha ! « Sorcière ! Sorcière ! Prends garde à ton derrière ! » Hihihihihihihihihi
Il s’enfuit.
PIERRE – Ah malheur ! Il a pris bien soin de me mettre sa petite chanson dans la tête ! Plus moyen de me la sortir de l’esprit maintenant ! Et moi, quel imbécile je fais ! Comment vais-je me sortir de ce pétrin maintenant ? Je me connais, je ne vais pas pouvoir me retenir de chantonner dans la maison ! Ah, misère ! Pauvre de moi, je suis perdu !
Il sort.
Acte II, scène 1
Pierre rentre dans sa maison.
PIERRE – Mais que je suis bête parfois ! Toute cette histoire n’est qu’une faribole pour m’effrayer ! C’est une manigance pour que je prenne peur et que je quitte la maison ! Les sorcières, ça n’existe pas, et surtout, si ça existait, ça ne vivrait pas dans un placard ! Que je suis stupide parfois ! Tiens, d’ailleurs, je vais vérifier ça tout de suite : « Sorcière ! Sorcière ! »
La porte du dressing vibre.
PIERRE – Houlà… Voilà qui est tout de même bien étrange… « Sorcière, sorcière, prends garde à… »
La porte du dressing tremble fort.
PIERRE – Eh bien… Effectivement, il semble qu’il y ait quelque chose d’étrange avec ce placard… Mais enfin, tant que je ne chante pas la chanson en entier, visiblement tout va bien… Il faudra que je me surveille à l’avenir, car je l’ai sur le bout de la langue cette petite chanson idiote !
Pierre sort de sa maison, il porte un bonnet et une écharpe.
PIERRE – Sorcière, sorcière, prends garde à ton…
Pierre rentre chez lui. Il fait nuit.
PIERRE – Sorcière, sorcière, prends garde à ton derr…
La porte du dressing tremble, elle semble sur le point de s’ouvrir.
PIERRE (au téléphone) – Oui, Bachir ? Ça va mon grand ? Oui, ça fait un bail, oui devine quoi ? J’ai gagné une maison ! Si je te jure ! C’est toute une histoire, en fait j’ai été tiré au sort lors d’une grande loterie organisée par la Générale d’Immobilier. Oui, cette bande de voleurs…
Oui, je sais, je suis verni… Il n’y a qu’un hic, c’est que tout le monde pense qu’elle est hantée. Non, c’est vrai, la Poste ne veut pas déposer mon courrier, aucun restaurant ne veut livrer chez moi… En fait, l’huissier qui m’a fait signer l’acte de propriété m’a l’air d’être un bel escroc, je pense qu’il essaie de me faire peur pour que je quitte la maison et qu’il puisse la revendre à quelqu’un d’autre… Oui, il m’a dit qu’une sorcière vivait dans mon dressing, et qu’elle sortirait si jamais je chantais « Sorcière, sorcière, prends garde à ton derrière ! »
La sorcière apparaît.
PIERRE – Bachir mon pote, je peux te rappeler ? J’ai un souci là…
Acte II, scène 2
LA SORCIÈRE – Un peu que tu as un souci mon mignon… Tant que je t’ai sous la main, rappelle-moi pourquoi est-ce que je devrais prendre garde à mon derrière ?
PIERRE – Mais pour rien, chère madame, c’est un malentendu, je n’ai strictement rien contre vous ou votre derrière, d’ailleurs j’ai beaucoup d’estime, et pour les sorcières, et pour les derrières, je chantais ça sans y penser…
LA SORCIERE – Sans y penser… Menteur ! Tu me provoques en chantant cette chanson tout le temps mais en t’arrêtant avant la fin… Tu te moquais bien de moi, en cessant ton manège au dernier mot, à la dernière syllabe ! Eh bien maintenant tant pis pour toi, c’est fini, tu m’as libérée, je suis sortie, je t’emporte, et on se marie !
PIERRE (tombant à genoux) – Pitié ! Pitié, madame je vous en prie ! Je suis jeune, encore un peu foufou, désinvolte, je ne pensais pas à mal, je vous en prie, laissez-moi une chance, j’ai de la famille, j’ai un petit chat qui a besoin de moi… Je n’ai rien contre les sorcières, je les aime beaucoup au contraire, je suis un grand fan de ma Sorcière bien aimée, j’aime aussi beaucoup Twilight, vraiment, j’espère que vous me laisserez une autre chance, je ne vous décevrai pas, c’est terminé, je ne chanterai plus jamais cette chanson idiote…
LA SORCIÈRE – Taratata ! Ça suffit, je ne veux rien entendre ! Mais comme tu as la langue bien pendue, et que je suis très fan de Twilight moi-même, voilà ce que je te propose : je te laisse trois jours, pour me demander trois choses. Trois choses impossibles ! Si je te les donne, c’est fini, je t’emporte. Mais si je ne suis pas capable de te donner ne serait-ce qu’une seule des trois choses, alors je te laisse tranquille et je disparais pour toujours. Alors, qu’est-ce que tu me demandes ? Réfléchis bien !
PIERRE – Eh bien, je ne sais pas, je suis pris de court, je n’ai pas d’idée là comme ça, il me faudrait un peu de temps pour réfléchir… Est-ce que vous pourriez repasser plus tard ?
LA SORCIÈRE – Bah d’accord, je ne suis pas pressée. A plus tard !
La sorcière disparaît.
PIERRE (se frappant le front du poing) – Oh, mais quel idiot je suis ! Qu’est-ce que j’avais besoin de chanter cette bêtise ! Tout est de la faute de cet huissier de justice de malheur, je vais dire à la sorcière que c’est lui qu’elle devrait emporter à ma place ! Ce filou ! Ah, mais qu’est-ce que je vais faire ? Qu’est-ce que je pourrais bien demander ? Pauvre de moi… Et pauvre Pipou, qu’est-ce que tu vas devenir sans moi ?
Il prend son téléphone pour appeler la police.
PIERRE (au téléphone) – Allo, la police ? Oui, figurez-vous qu’une sorcière vit dans mon dressing, et qu’elle veut m’emporter… Mais… Mais non, Monsieur, ce n’est pas une plaisanterie, c’est très sérieux je crains pour ma vie… Comment ça, vous n’êtes pas psychiatre ? Mais Monsieur, je demande de l’aide, il est de votre devoir de secourir les citoyens… Mais, ma parole, il a raccroché !
Il appelle son ami Bachir.
PIERRE – Allo Bachir ? Salut mon ami, si tu savais dans quel pétrin je suis ! Tout à l’heure, tu sais, quand j’ai dû raccrocher, c’est parce qu’il y avait bien une sorcière dans mon dressing ! Et que je l’ai dérangée en chantant cette chansonnette idiote ! Et maintenant, elle menace de m’emporter si je ne réussis pas l’épreuve qu’elle m’a proposé : je dois lui demander trois choses impossibles, et si elle arrive à me les donner elle m’emportera, et on se mariera ! Sinon, elle partira pour toujours et me laissera tranquille. Je réfléchis depuis des heures, je n’ai pas l’ombre d’une idée. Alors je voulais te dire adieu, mon ami…
Attends, attends, comment ça… Pipou, mon chat orange, est le fils de ta chatte noire, oui… Ta chatte noire était une chatte magique ? Tu savais lui parler ? Comment ça, il faut que nous demandions à Pipou ? Mais il dort, là, je peux t’assurer qu’il n’a rien de magique…
Ok, tu viens tout de suite ? A tout de suite alors, je t’attends !
Acte II, scène 3
Bachir entre dans la maison, il appelle le chat Pipou.
BACHIR – « Petit Pipou, petit chat roux,
Viens vite, je t’appelle,
Compagnon fidèle,
Ton maître aux abois,
A besoin de toi,
Aide à le sauver,
Petit chat doré. »
Pipou entre dans la pièce, il s’assoit face à Bachir et Pierre.
BACHIR – Explique-lui ton histoire.
PIERRE – Mais… Il habite ici, il est au courant ! Pipou, une sorcière vit dans notre dressing. Je l’ai faite sortir, et elle menace de m’emmener si je ne lui demande pas trois choses impossibles, qu’elle ne pourra pas me donner. Je n’ai absolument aucune idée de ce que je pourrais bien demander…
BACHIR – Alors Pipou, tu as des idées ?
PIPOU – Miaou, miiiiaou, miaou, mmmmmiaoooouuuu !
BACHIR – Il dit que tu devrais lui demander la lune. Elle ne pourra pas la décrocher pour te la donner.
PIERRE – Oh ! Quelle bonne idée ! Merci Pipou, merci Bachir, je ne savais pas que mon chat était magique !
Acte III, scène 1
Le soir, devant le dressing de la maison.
PIERRE – « Sorcière, Sorcière, prends garde à ton derrière ! »
La sorcière apparaît.
LA SORCIÈRE – Alors, beau gosse, prêt pour la lune de miel ? Tu as réfléchi ? Qu’est-ce que tu me demandes ?
PIERRE – Je voudrais la lune !
LA SORCIÈRE – La lune ? Ah ! Cette idée-là n’est pas de toi ! Mais c’est d’accord, voilà !
Crac ! On entend un gros bruit de chute venant du jardin. Pierre se précipite dehors. Une grosse météorite ronde brille au milieu d’un cratère, sur sa pelouse. La sorcière sort à côté de Pierre.
PIERRE – Mais… C’est juste un caillou, qu’est-ce qui me prouve que c’est bien la lune ?
LA SORCIÈRE – Et bien, fais-là analyser si ça te chante ! Mais je t’assure que c’est bien la lune ! Alors, à demain mon mignon, et réfléchis bien cette fois !
La sorcière disparaît.
Acte III, scène 2
Le lendemain, Pierre rentre chez lui. Il appelle son ami Bachir.
PIERRE – Allo, Bachir ? Non, ça n’a pas marché… Je rentre de chez Ali, mon copain géologue, il m’a confirmé que c’était bien un morceau de lune qui était tombé dans mon jardin… Qu’est-ce qu’on fait ? Tu reviens et on demande à Pipou ? Ok, à tout de suite.
Bachir entre dans la maison. Il appelle Pipou.
BACHIR – « Petit Pipou, petit chat roux,
Viens vite, je t’appelle,
Compagnon fidèle,
Ton maître aux abois,
A besoin de toi,
Aide à le sauver, petit chat doré. »
Pipou entre dans le salon et vient s’asseoir en face de Bachir et Pierre.
PIERRE – Ça n’a pas marché mon Pipou, elle m’a donné la lune tout de suite… Il faut trouver autre chose, sinon je suis perdu !
Pipou – Miiiaou, mmmmmiaaaou, miaou miaou, miaoouuuuu !
BACHIR – Il dit que tu devrais lui demander le pouvoir de lire dans les pensées, TOUTES les pensées. Comme ça, tu pourras lire dans les siennes. Elle ne voudra pas prendre ce risque, donc elle ne voudra pas te donner ce que tu demandes, et tu seras sauvé.
PIERRE – Super ! Trop bonne idée ! Merci Pipou, merci Bachir !
Acte III, scène 3
Le lendemain, devant le dressing.
PIERRE – « Sorcière, Sorcière, prends garde à ton derrière ! »
La sorcière apparaît.
LA SORCIÈRE – Bonsoir, mon joli ! Alors, qu’est-ce que tu me demandes ce soir ? Est-ce que tu es plus inspiré qu’hier ?
PIERRE – Eh bien, je voudrais avoir le pouvoir de lire dans toutes les pensées !
LA SORCIÈRE – Quoi ! Non, tu triches, cette idée là n’est pas de toi !
PIERRE – Donc, c’est non ?
LA SORCIÈRE – Non, c’est d’accord ! Mais fais attention, demain soir, pas d’entourloupe ! Je veux une idée qui vienne de toi, et attention, je le saurai si tu essaies de m’embobiner !
Elle disparaît.
Acte IV, scène 1
Pierre appelle son ami Bachir.
PIERRE – Bachir ? Non, je ne sais pas si ça a marché, mais je pense que oui, puisqu’elle m’a laissé… Est-ce que tu viens pour qu’on décide d’un plan ? Ok, à tout de suite !
Bachir entre dans la maison. Il appelle le chat Pipou.
BACHIR – « Petit Pipou, petit chat roux,
Viens vite je t’appelle,
Compagnon fidèle,
Ton maître aux abois,
A besoin de toi,
Aide à le sauver, petit chat doré. »
Pipou entre dans le salon, il vient s’asseoir en face de Bachir et Pierre.
BACHIR – Alors, ça marche ? Tu peux lire dans les pensées ? A quoi je pense là maintenant ?
On entend les pensées de Bachir.
BACHIR (en pensée) – Je ne pense à rien, je ne pense à rien !
PIERRE – Tu penses : « Je ne pense à rien, je ne pense à rien ! »
BACHIR – Whaou ! Trop fort ! Et ben… C’en est fini de ta vie sociale mec !
PIERRE – De toute façon, elle sera finie si la sorcière m’emmène ce soir aussi ! Alors, qu’est-ce que je fais tout à l’heure? Pipou ?
PIPOU – Miaou, miaou, mmmiaou, miiiiaou, miaooouuu, miaou, miaou, mmmiaou, miiiiaou, miaoouuuuu !
BACHIR – Il dit que tu devrais lire dans ses pensées, et lui demander ce à quoi elle pensera à ce moment-là ! Ce sera quelque chose qu’elle ne pourra pas te donner, et elle sera obligée de te laisser tranquille.
PIERRE – Euh… Et si elle ne pense à rien ?
PIPOU – Miiiiiiiiiiiiiaouuuuuuuuu !
BACHIR – Il dit que c’est impossible !
PIERRE – D’accord. Nous verrons bien. Souhaitez-moi bonne chance les amis !
Pipou et Bachir quittent la pièce.
Acte IV, scène 2
Le soir est tombé. Pierre se place devant le dressing.
PIERRE – « Sorcière, Sorcière, prends garde à ton derrière ! »
La sorcière apparaît.
LA SORCIÈRE – Bonsoir, mon tout beau, alors c’est maintenant que je t’emmène ? Tu es prêt ? Qu’est-ce que tu me demandes aujourd’hui ?
Pierre écoute les pensées de la sorcière.
LA SORCIÈRE (intérieurement) – Qu’il est chou, plus que quelques minutes et il est à moi ! Il est trop mignon, j’ai hâte ! Mes pouvoirs… Mes pouvoirs… Enfin je vais avoir un homme, un compagnon! Un mari !
PIERRE – Et bien je voudrais… Vos pouvoirs !
LA SORCIÈRE – Argh ! Tricheur, menteur ! Hors de question, cette idée-là n’est pas de toi ! Tu n’as pas respecté les termes de notre accord, notre pacte est caduc ! C’est impossible, je refuse !
PIERRE – Donc, c’est non ? Vous partez alors !
LA SORCIÈRE – Espèce de filou ! Si je te donne mes pouvoirs, je te gagne, mais je ne peux plus t’emmener. Si je refuse, je te perds, et je dois m’en aller… Tu m’as trompée, tu n’as pas joué franc jeu avec moi ! Je refuse, et je te laisse, mais fais attention ! Qui sait sur quoi on peut tomber dans une nouvelle maison…
La sorcière disparaît.
Pierre appelle son ami Bachir au téléphone.
PIERRE – Bachir ? Oui, c’est moi. Oui, ça a marché ! Elle est partie ! Merci encore mon ami, maintenant, Pipou et moi, on peut chanter tant qu’il nous plait : « Sorcière, Sorcière, prends garde à ton derrière ! »