Kid Koala présente sa bande dessinée Space Cadet en version pour écouteurs.

 

On s’attendait à un concert atypique, on aura été servi ! C’est à la Gaité Lyrique que Kid Koala présentait, les 23 et 24 novembre dernier, son Space Cadet headphone experience, une expérience en trois parties. Pour ouvrir le bal, le turntabliste montréalais accompagné de ses acolytes du moment nous convie à une véritable foire scientifique dans le hall devant la grande salle, sorte de grande boîte argentée aux allures spatiales.

Au menu : exposition de quelques planches originales du livre, visite d’un jardin de plantes extraterrestres, fabrique d’astéroïdes, décoration de biscuits Space Cadet, jeux de foires animés par l’hôte de la soirée… Les fans, déjà conquis à l’idée de cette plongée spatiale se réjouissent tandis que les autres, ne connaissant pas encore les extravagances du Kid, semblent plus réservés, mais se laissent prendre aux jeux.

Ceux qui suivent le parcours de Kid Koala le savent, l’as DJ, également passionné de bande dessinée, fait tout autant des disques sans chansons, des mixtapes sans jam et des livres sans mots. Déjà en 2000, le Kid avait fait paraître avec son cd Carpal Tunnel Syndrome une petite BD des plus sympathique. Puis en 2003 est venu le livre/cd Nufonia Must Fall, une histoire toute charmante de près de 300 pages en dessin et en musique, dans laquelle un robot maladroit tombe amoureux d’une jeune femme.

Eric San – parce que c’est son nom – récidive encore avec Space Cadet. Cette fois, papa Koala – la récente paternité de l’artiste l’ayant fortement influencé – nous raconte l’histoire d’un père robot qui s’ennuie de sa fille cosmonaute partie explorer les étoiles. Cent trente deux pages de dessins blancs sur fond noir sans dialogues, le tout appuyé par une musique très calme composée principalement de morceaux au piano et de scratch d’ambiance. Bien qu’il soit d’abord un DJ, l’utilisation du piano prédomine sur cette bd/disque, car la trame a d’abord été conçue sur cet instrument pour être ensuite adaptée et trafiquée par les tables tournantes. La délicatesse qui en émane, qui par moment peut évoquer la musique classique, se rapproche beaucoup plus de la berceuse pour enfants.

C’est dans cette optique très cute et naïve que se poursuit l’expérience à laquelle on est convié. Après s’être amusé comme des petits fous dans le laboratoire du Kid, le public pénètre sagement dans le cube métallique qu’est la grande salle, écouteurs à la main, pour s’installer confortablement, voire s’avachir mollement pour certains, au sol sur des space pods, des espèces de grands polochons gonflables. L’excitation est à son comble malgré une poignée de spectateurs trop pointus pour se laisser aller à l’ambiance enfantine qui règne. On assiste alors au second volet du spectacle. Terence Bernardo, folk singer new-yorkais, présente quelques unes de ses compositions, accompagné du Kid et d’une platine portative. Sans être d’une profondeur transcendante, la folk de Bernardo – aux accents d’un Nick Drake ou d’un Bonny Prince Billy – est toute en légèreté et se fond à la perfection dans le concert.

Vient ensuite le moment de l’envol. 5, 4, 3, 2, 1… décollage ! Kid Koala est aux commandes. Entouré de platines et de claviers en tout genre, il propose un voyage spatial musical accompagné de vidéos mettant en scène les aventures du Space Cadet. L’iconoclaste DJ tenait à optimiser les conditions d’écoute et à faire en sorte que le public puisse réellement plonger dans son univers. D’où les écouteurs et la présence d’écrans tout autour de la salle. En même temps que la musique interprétée par Kid Koala sur sept tables tournantes et un piano, des images et autres éléments visuels défilent sur les écrans au grand bonheur des astronautes d’une soirée.

Fidèle à sa réputation, le turntabliste alterne morceaux, histoires drôles et autres divertissements tout en faisant participer le public qui se fait à la fois sonneur de cloches, bruiteur, lutteur de pouce… le DJ allant même jusqu’à arborer un déguisement de Koala – résultat d’un pari perdu avec les fondateurs de Ninja Tunes, son label – pour inviter le public à se trémousser sur les airs d’une chanson pour enfant composée pour l’émission américaine Yo Gabba Gabba ! On notera au passage la sublime symphonie aux clochettes et platines interprétée par Kid Koala et cinq spationautes volontaires. L’alternance de morceaux plus dansants, issus de projets précédents, et des compositions ambiantes, voire planantes dans le cadre du voyage spatial auquel il nous invite, rythmera ce voyage/concert.

Après plus de deux heures et demi de spectacles, on est finalement obligé d’atterrir. On en aurait pris encore quelques heures de plus, mais le carburant commençait sans doute à se faire un peu plus rare. Chaque périple a une fin. On remercie Capitaine Koala pour ce voyage issu d’un projet qui a, grosso modo, demandé six ans de travail, des premiers dessins jusqu’à la finalisation du spectacle en question et on attend avec impatience les prochains départs, comme la poursuite annoncée de son aventure sidérale à bord du Deltron 3030 sous peu.

À découvrir si vous aimez :
les berceuses, les bandes dessinées, les étoiles et les petits animaux à fourrures.

 

Paris, la Gaité Lyrique, 23 novembre 2011.

Renaud Paquette

 

 

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