« La photographie est un secret sur un secret, plus elle en dit, moins vous en savez » disait-elle.

Plus de 200 photographies de Diane Arbus sont exposées au Jeu de Paume. Dès le début de la rétrospective le message est clair : on nous invite à « vivre une expérience ».

Elle photographiait les marginaux de tout genre. Visages torturés, hommes, femmes et enfants à l’allure singulière, malades mentaux, transsexuels et travestis, bêtes de foires, Arbus s’est arrêtée sur des personnes que nous ne voulons d’ordinaire pas voir ou que nous n’oserions pas dévisager. Clichés en noir et blanc, portraits de face, décors muraux, l’artiste donne à observer toutes sortes de figures, dans un format sans concessions, captant la détresse d’un regard, la fragilité d’une posture, la froideur d’un sourire.

L’exposition commence de manière incisive : des triplées, visages sévères, allures guindées, assises droitement sur un lit, nous dévisagent. Et nous invitent à les dévisager. C’est ce qui est facile ici : ce sur quoi nous n’oserions d’ordinaire pas attarder notre regard, nous est imposé. Alors on observe, on analyse, on ose, on s’amuse de ses personnalités étranges, on se pense hors de portée. Et pourtant… Une impression de malaise règne : regards de tous côtés, observations sans fin, le spectateur est épié tout autant qu’il épie.

La scénographie de cette rétrospective nous donne l’impression d’une totale immersion dans l’univers étrange de l’artiste. Peu de cartels, peu de détails, aucune explication poussée sur les photographies exposées, aucun parallèle avec le parcours de Diane Arbus, pas de chronologie dans le sens de la visite, ni dans l’ordre des clichés exposés… Le visiteur est libre de déambuler dans l’espace comme il le souhaite : et pour une fois, on ne va pas s’en plaindre. Et si ce dernier souhaite plus d’éléments biographiques sur l’artiste et sur son œuvre, il trouvera ses réponses dans la dernière salle de l’exposition.

Toujours est-il que cette ambiance épurée redonne un peu de légèreté et de liberté au visiteur, qui dès le début, est comme happé par les clichés en noir et blanc de la photographe. Si certains tirages ont subi les affres du temps, l’essentiel est là, préservé, caustique.

Diane Arbus, du 18 octobre au 5 février, Jeu de Paume (75008). 

Charlotte Duc

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