Le soleil c'est mortel !


quentin.revert - Posted on 20 juillet 2010

 

 

 

Solar Destruction,

 

 

 

 

 De Cliff de Young.

 

 

 

 

 
Il y a des films comme ça qui vous surprennent, et qui vont là où on ne les attendait pas. Le principe même de la surprise en somme. Solar Destruction est pour moi une énigme. C’est un ovni (Objet Visuel Non Identifiable), ce n’est pas vraiment un nanar, ce n’est pas non plus un mauvais film, ni un bon d’ailleurs. Il y a un peu de tout.
 
Pourtant la bande annonce que l’on peut voir sur Youtube par exemple nous laisse envisager le pire, avec des acteurs un peu bidon, des situations bien cliché et un scénario complètement opportuniste. L’histoire en elle même est plutôt classique : le soleil menace la terre avec ses rayons qui détraquent les technologies humaines et mettent le feu à nos ressources naturelles (pétrole, gaz). Un petit génie de quinze ans a tout prévu et prévient un de ses professeurs, spécialiste des « flammes solaires », qu’il a mis au point un logiciel capable de prédire plusieurs jours à l’avance ces rayons capables de détruire toute vie sur terre. Un méchant chef d’entreprise (pléonasme en ces temps de crises) va tenter d’empêcher l’étudiant et son professeur d’alerter « la haute autorité » du cataclysme.
 
On est totalement dans la logique des Direct To Video fauchés qui pompent honteusement tout ce qui sort au cinéma afin d’en profiter. Ici il s’agit des films catastrophes écolos qui ont inondés nos salles obscures durant plus d’un an, avec comme point d’orgue 2012 et Le Jour d’Après. Les producteurs sont peu scrupuleux, s’emparent du filon et le ressortent avec un budget moindre histoire de contenter les amateurs de fin du monde. On a donc droit à tout le baratin écologique sur le trou dans la couche d’ozone, mais fait inédit, les scénaristes le croisent avec un autre objet d’actualité, la crise économique et la diabolisation des grandes entreprises, qui toutes, ne reculent devant rien pour accroître leurs profits. Pauvre Laurence Parisot, décidément vos amis n’ont aucun répit, ils sont même traînés dans la boue par les producteurs de DTV, pourtant eux-mêmes peu scrupuleux !
 
La bande d’annonce laissait préfigurer donc un bon gros ratage, avec des acteurs peu inspirés, des effets spéciaux ridicules et un scénario réchauffé. En un sens ce n’est pas totalement faux. Le héros (Riley) est une tête à claque, qui nous fait sa crise d’adolescence en direct. Sa mère n’a pas réussi dans la vie (et il ne cesse de le lui rabâcher, ingrat qu’il est), ce n’est qu’une videuse de boîte de strip tease, ultra sexy, qui malgré son faible salaire peut se payer une maison en banlieue et un bon gros 4X4 bien polluant. Première incohérence pour un garçon qui se prétend soucieux de l’écologie.
 
L’autre personnage principal, Joanne, n’est autre qu’une scientifique, qui donne des cours à la faculté du coin pour arrondir ses fins de mois et permettre à son laboratoire de survivre. Elle est assistée d’un rouquin, et tout le monde se dit dès son arrivée qu’il va finir par la trahir, comme tous les gens de son « espèce ». Les clichés ont la vie dure. Et puis il y a le magnat de la finance, qui a sous ses ordres « des millions de personnes » (si peu), héritier de l’empire de son père et qui veut tout faire pour que ce dernier soit enfin fier de lui. C’est beau, c’est touchant, pourtant cela n’atteint pas nos deux héros qui n’auront de cesse de lui mettre des bâtons dans les roues, tout cela afin de « sauver le monde ». Ils sont tellement égoïstes ; ils ne pensent même pas à la souffrance du pauvre homme.
 
Il faut ajouter à cette bande de clichés sur pattes, le véritable élément nanar du film : Le coach personnel de Riley, j’ai nommé Corey ! Le surdoué n’étant pas majeur, et bien qu’il soit le plus jeune garçon de tous les temps à intégrer cette faculté, il doit s’astreindre à des cours d’éducations physique. On ne discute pas la loi chez l’Oncle Sam. L’entraîneur trentenaire, bien qu’il soit plus près de vingt ans, va donc faire travailler notre génie des mathématiques dans des scènes d’une débilité profondes. Et vas y que je saute sur place en envoyant mes bras dans tous les sens, pendant des heures, sans jamais suer, alors qu’il y a un « soleil de plomb ».
 
Cela passe encore, si l’on n’est pas très tâtillon et que l’on ne fait pas attention aux faux raccords. Non, le plus ridicule ce sont surtout lorsqu’il essaie d’apprendre à jouer au base-ball, ce que le jeune homme ne maîtrise pas, mais alors vraiment pas. Pour ce qui est de faire des équations de dingues [xo2 puissance 6 (ne cherchez pas à comprendre, ça ne veut rien dire)] sans calculatrice y’a du monde, mais alors pour attraper (avec un gant de base ball !) une balle lancée à deux à l’heure il n’y a plus personne. C’est assez amusant de voir l’acteur tout faire pour ne pas prendre la balle, alors qu’un enfant de cinq ans le ferait les yeux fermés ! En réalité ces scènes ne sont, comme bien souvent dans les DTV, que du pur remplissage, afin d’atteindre les 1h30 réglementaires.
 
Les effets spéciaux sont quasiment inexistants durant le métrage, c’est tout juste si nous avons droit à un filtre rouge sur la caméra afin de montrer le réchauffement de l’air… On est très très loin des inondations et autres explosions, mises en image dans les films catastrophes que nous avons cités plus haut. Et pour dire vrai, ce n’est pas nécessairement une mauvaise chose ; là où Léviathan par exemple surenchérit sur le gore et la représentation de son monstre, on essaie d’avantage de jouer sur le suggestif, ce qui est un des meilleurs ingrédients des films qui ont la prétention de créer de la tension (voir les dents de la mer I). On sent donc que le budget est limité et que l’on devra se contenter du crash (de la maquette) d’un train dans une gare pour expliquer l’effet des flammes solaires sur la technologie.
 
Malgré cela le film est assez paradoxal, parce que les acteurs ne sont pas vraiment mauvais, la mère bien qu’absolument « pas crédible » en videuse ne s’en sort pas trop mal. Joanne, mises à part ses nombreuses envolées scientifiques totalement incohérentes, s’en tire correctement. De même pour le méchant, qui ne surjoue que par instants. Non les deux éléments nanar de ce film sont assurément le petit génie, parfaitement insupportable dans sa façon de tout rapporter aux mathématiques sans pouvoir calculer la trajectoire d’une balle lancée avec la force d’un Teletubby. Et bien entendu Corey, l’alibi ethnique du film, le « Noir de service », qui comme tous les « Noirs de service » fait du sport et n’y connaît rien en mathématique. Son jeu d’acteur se concentre essentiellement sur le roulement des yeux et la pose du « mec qui ne comprend pas ce qui se passe ou s’interroge sur des réflexion profonde qui le dépassent sans pour autant désespérer de comprendre » !
 
On pourra s’amuser sur la facilité déconcertante avec laquelle nos héros infiltrent un laboratoire afin de récupérer le rapport de Riley (détenu par l’entrepreneur malveillant), à deux reprises qui plus est, malgré la présence de gorilles montant la garde à l’extérieur et à l’intérieur du bâtiment. De même on pourra s’amuser des faux raccords, avec les voitures qui changent de place. On pourra enfin s’amuser des répliques désespérantes des protagonistes qui, à la manière d’un Bruce Willis dans Die Hard, tentent de faire de l’humour après chaque situations difficiles. Elles sont essentiellement prononcées, à outrance, par Riley et son « side-kick ». Mais on peut ajouter celle de Joanne qui après avoir asséné un violent coup de théière sur la tête d’un sbire qui essayait de maîtriser la mère du jeune homme, nous offre cette réplique bien sentie : « J’espère que le service vous a plu ». Navrant.
 
Solar Destruction est donc très intéressant à étudier. En ce sens qu’il se trouve à la frontière entre un divertissement réussi (par rapport à ses moyens), et un nanar (de par ses clichés ainsi que ces répliques supposées humoristiques qui, comme dans la plus plupart des DTV, sont drôles involontairement). Ce film est une passerelle entre Le Jour d’Après et Vampire Assassin, qui n’est pas désagréable à regarder. Il est à la limite du nanar, près à chuter dans l’océan de bêtise que représente ce genre. Et le voir s’agiter dans tous les sens afin de ne pas tomber est des plus réjouissant. Nul doute que d’ici quelques années et un petit coup de vent, Solar Destruction aura sombrer corps et flammes.