MOU, MAIS EFFICACE
La nature d´un droit en vigueur
Le droit est un principe, selon lequel les sociétés se différencient, se séparent et s´organisent. La multitude des règles les encombre et les limite, mais les libère et les justifie. Elles possèdent les mêmes particularités, à la base desquelles elles défendent une culture familiarisée et unie. Même si l´on ne veut pas y accorder une grande importance, on ne cesse pas d`en être entouré et soumis aux mesures décidées et fixées. En d´autres termes, plus populaires aujourd´hui, on est conformes (et conformés) à la loi.
Et cela s´est produit plusieurs fois au cours des siècles, où les gens se sont confrontés à la loi et à ses différentes facettes, et elle a répliqué par des coups plus ou moins sévères. Même une époque dont on parle de manière superlative et à laquelle on voue tellement d´admiration, dite l´Âge d'Or d'Athènes, perd son étiquette de modèle de la démocratie parfaite, quand on prend en considération les Athéniens esclaves, sans
aucun droit. Or, la démocratie contemporaine a été bien poursuivie théoriquement et décryptée au niveau analytique, et les rouages de la machine sociale dont ils font partie, n´ont pas arrêté de changer sous son joug. De cette manière la démocratie fait usage de ses outils légitimes (puisqu´ils sont légaux), qui, eux non plus n´arrêtent pas de muter. Or, pour attirer le soutien des habitants, les lois européennes ont tendance àtoujours souligner les discours sur la liberté et sur l´importance des libertés, qui, certes, est très tentante et plaît à l´oreille, mais pas plus que ça.
Le concept de “droit mou” a des effets sur les fonctionnements qu´il veut considérer, puisqu´il a été lancé par le corps qui est censé nous attribuer nos droits, d'habitude, par les lois. Entre autres, il a été décrit aussi comme bienvenu, puisqu´il prétend laisser de l´espace à la délibération et l´ absence d´une contrainte directe ne fait que renforcer ce sentiment d´ouverture . Un droit qui n´a pas de définition concrète entre les utilisateurs; même selon le Parlement européen il est trop ambigu, et il a constaté qu´il peut endommager la législation de la communauté européenne. Sans être très inquiet pour la législation, on peut donner raison à la menace que cette espèce de droit apporte pour d´autres institutions.
Le “droit mou” a changé les structures autoritaires ainsi que le processus de la législation traditionnelle. Les sanctions légales n´y sont pas considérées comme une nécessité du mécanisme. Il n´y a pas de coupable. Il n´y a pas de Parlement qui devrait porter d'intérêt à un sujet de “droit mou”, ni de Commission pour l’exécuter; il n´est pas contraignant, les effets qui en découlent peuvent passer pour une forme de conseil, un rôle de régulateur du standard. En cas de désaccord d´une partie, les conséquences sont inconnues, au moins officiellement.
Quand en prend en considération les nombreuses possibilités que ce principe peut incarner et les formes qu´il a prises jusqu´à maintenant, on a l´occasion de voir que ce qui ne passe pas par la voie législative peut être fait par le “droit mou”. Il est flexible et de cette manière il constate une nouvelle forme de gouvernance, une forme indépendante. Là, on remarque un fait
inquiétant que Marie Bardon et Corentin Kerhuel décrivent comme cela : « Ici naît un paradoxe entre éthique et politique, puisqu’en son sens philosophique l’éthique régit un agir individuel là où la politique régit un agir collectif[20]. La notion d’éthique des affaires semble donc néanmoins paradoxale puisqu’elle recherche l’agir pour une communauté. »
Evidemment, cette loi imposée nous prive d´une démarche individuelle qui s´orienterait selon nos propres jugements, qui auraient pour conséquence une formation de la société qui serait plus en accord avec les convictions des individus qui la composent. De cette manière ces mêmes individus seraient des membres de la société à proprement parler et non pas seulement des particuliers passifs.
Ainsi le Parlement Européen a conclu dans une résolution de 2007 que la manière dont le “droit mou” fonctionne pourrait aisément surpasser les décisions de la Communauté, pour faire passer des obligations par ce biais en ne considérant pas le choix de la Communauté, ce qui équivaudrait à un péril pour l´organisation démocratique. A fortiori, le “droit mou” peut prendre une forme de « surbureaucratie » sans légitimité démocratique qui n´est pas seulement éloignée des citoyens, mais aussi menaçante envers eux, parce qu´elle soumet le fonctionnement aux grands lobbies, avec lesquels les négociations ne sont pas accessibles au public. En cas de désaccord, ces derniers ne peuvent pas se défendre par la voie légale. Le Parlement s´est également déclaré contre la modification des domaines culturels et éducatifs. Or, le système d´éducation européen a été radicalement modifié en se servant de ce droit - plus précisément d`une méthode dite « Méthode ouverte de coordination » - sans être remis en question officiellement par aucun des pays l`ayant accepté, si l´on ne compte pas les contre-mouvements indépendants qui ont surgi en raison de sa mise en vigeur.
C´est seulement au début de l`année dernière que la Commission Européene a decidé de s'entendre avec le Parlement (qui est d´ailleurs la seule institution élue démocratiquement), en ce qui concerne les directives basées sur le droit mou.
Mais ce qui fait se maintenir la situation dans son status quo, c´est la façon que les médias utilisent pour informer le public. Plutôt descriptive qu´analytique, et rarement radicale (c´est-à-dire des actions qui ne seraient pas nécessairement en accord avec la loi quelconque, mais avec la conviction libertaire). Dans les médias, où les faits devraient être révélés pleinement, ils ne le sont pas. Ce qui a pour conséquence logique et peut-être même voulue que personne ne va s´interroger sur le principe que ces conclusions reçues impliquent. Ni ce que sont leurs conséquences, juridiques ou effectives.