Orson Welles : Citizen Kane (1941)
Le film Citizen Kane, réalisé par Orson Wells et sorti en 1941, nous conte l’histoire d’un homme, Charles Foster Kane, qui, devenu un magnat de la presse immensément riche, finit par mourir seul, tel un roi sans sujets, dans son château inutilement et ridiculement démesuré.
Tout commence au moment de la mort Charles Foster Kane, lorsqu’un journaliste, intrigué par le dernier mot prononcé par le vieil homme avant de mourir, « Rosebud » ― « Bouton de rose » ―, décide de percer le secret de sa vie en interrogeant tous ceux qui l’ont connu. Se découvre alors, peu à peu à lui, au fil des témoignages, qui suscitent autant de flash-backs, non le récit d’une gentille romance, comme on aurait pu le croire, mais celui d’une lente décadence : l’histoire assez pathétique de la chute un homme qui se voulait plus grand qu’il ne pouvait l’être.
Enfant énergique et audacieux ― pour ne pas dire dissipé et impertinent ―, Charles Foster Kane a été très tôt confié par sa mère à un banquier austère qui s’est chargé de son éducation et a tenté de lui inculquer le sens des responsabilités et le goût des affaires. Deux qualités essentielles pour faire de lui un futur banquier, mais que, pour sa plus grande fierté, Charles Foster Kane s’est appliqué ensuite à ne jamais respecter, sans pour autant, d’ailleurs, parvenir à épuiser son immense fortune, la seule chose qu’il conservera jusqu’à la fin de sa vie, et en quelque sorte sa malédiction.
Devenu adulte, Charles Foster Kane fait sa première « petite folie » en s’achetant un journal, L’Inquirer ― un coup de cœur qui lui fait perdre un million par an, mais finit par le propulser au sommet du monde de la presse. Puis il épouse la nièce du président des Etats-Unis et entreprend une carrière politique ambitieuse. Il doit cependant rapidement abandonner celle-ci à la suite d’un scandale retentissant affectant sa vie privée : l’on découvre qu’il trompe sa femme avec une actrice et chanteuse. Plus tard, après avoir divorcé, Charles Foster Kane épouse sa maîtresse, Suzan, et tente de faire d’elle une grande chanteuse d’opéra, ce qui lui coûte plusieurs millions de dollars, et met en jeu la crédibilité de son journa, car Suzan n'a guère de talent. Enfin, il se fait construire une sorte de paradis privé : un gigantesque manoir, Xanadu, à la taille de son goût démesuré pour le pouvoir et la grandeur. Les pièces y sont immenses, et mis à part quelques invités de passage, les domestiques et les statues, le couple y habite seul.
On se souvient de l’image de Suzan en châtelaine, faisant, défaisant et refaisant les mêmes puzzles au pied d’une cheminée aussi vaste que celle d'un crématorium…
Après quelque temps de cette vie, Suzanne finit par quitter Charles Foster Kane, accablée par l'ennui, mais consciente, aussi, sans doute, de l’impossibilité de vivre aux côtés d’un homme pourvu d’un tel égocentrisme et une telle mégalomanie. Fou de douleur et de rage, celui-ci se met alors à tout détruire autour de lui, tel un vieil enfant. Et c’est précisément à ce moment-là que, découvrant une boule à neige en verre, il murmure, en versant une larme, avant de mourir, ce mot mystérieux qui a suscité tout le film : « Rosebud ».
Le journaliste qui a entrepris de reconstituer la vie de Charles Foster Kane ne saura jamais la signification de ce mot : à la fin du film, il finit par abandonner ses recherches sans en avoir percé le secret. Mais celui-ci se trouve révélé au spectateur dans les toutes dernières minutes de l’histoire, avant de partir en fumée : « Rosebud » était le nom inscrit sur la luge avec laquelle, enfant, Charles Foster Kane aimait à jouer. La fin de l’histoire nous ramène à son début, tout en nous découvrant la part d’enfance et d’innocence enfouie au fond du personnage et demeurée intacte.
Lucie Bondu – L1 Humanités