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Bande Originale du Film Apocalypse Now

romain.meaulard - Posted on 20 février 2010

Apocalypse Now, bande originale

Un des chefs-d’œuvres de Coppola, Apocalypse Now, est aussi admirable quant aux musiques qui s’y jouent. Plus que les compositions propres (par ailleurs du père de Francis Coppola), nous allons baser notre intérêt sur les chansons non originales. C’est en fait quatre scènes que nous allons analyser. Les morceaux sont transcendés par le film et atteignent une signification spécifique mais universelle, notamment par rapport à la violence, physique ou morale.

Le film s’ouvre sur la jungle du Vietnam, les bruissements d’hélicoptères annonçant l’invasion américaine. Le napalm fait brûler cette verdure alors qu’au même moment résonnent les mots de Morrison, « This Is the end ». La chanson donne parfaitement avec le contexte. Les américains s’enlisent au Vietnam et se rendent bien compte qu’ils vont devoir abandonner. C’est la fin de leur « elaborate plan » et ce n’est plus que « desperate land ».Leur artillerie ne peut plus rien. Les arrières plans apocalyptiques et cauchemardesques en sont l’illustration. Et d’un autre côté, à l’image de ce capitaine revenant de son propre gré dans cet enfer, c’est le bout du monde. Le bout du monde humain. Et  côtoyer cette fin le rend fou de désir et fou tout court. Il ne peut plus vivre autre part que dans cette jungle. On le voit alors devenir dingue dans sa chambre d’hôtel, attendant une mission. « The end » annonce en fait la fin de l’humanité dans cette forêt humide, dans ce bourbier terrible. « The end » annonce la souffrance, la violence et l’atteinte d’un autre monde à la fois effrayant et captivant. « My only friend, the end ».

Coppola exerce ici un coup de force. Il intègre « La Chevauchée des valkyries » à la guerre du Vietnam. On voit les hélicos de la cavalerie attaquer le Viêt-Cong. Wagner démarre. A coup de grands accords les Américains sont transportés vers le soleil levant. La symphonie reflète l’impérialisme américain, à l’image de cette puissance volante qu’est la cavalerie. Alors qu’ils attaquaient et effrayaient les indiens avec leurs trompettes, au temps de la conquête de l’Ouest, les grands accords et la choriste des Walkyries font peur aux Vietnamiens. La composition de Wagner devient ici un hymne guerrier qui reflète la puissance mais aussi la violence des Américains. Leur attaque provoque un tragique massacre certes, mais on est tentés de leur trouver de la grandeur et d’être impressionnés par cette « horde sauvage » qui avec son leitmotiv rase tout sur son passage.

Reprise par les Flash Cadillac, la chanson « Suzie Q » apparait lors d’un « lapdance » géant de playmates, destiné aux soldats. A l’origine le Suzie Q est un pas de swing, danse qui est en outre spécifiquement américaine. Il est ici personnifié par les miss. Elles représentent à la fois la tentative du gouvernement pour divertir autant qu’abrutir les soldats, et l’invasion du Vietnam. Ce qui est caractéristique, c’est l’échec que subit cet envahisseur. Les soldats montent sur la scène et cela dégénère en grande bagarre. La chanson, le spectacle et le final montrent en fait que tout dans ce pays est voué à l’échec, que ce n’est pas le même monde, pas la même culture et que cette guerre n’est qu’un désastre humain et économique. D’autre part, cette scène est affreuse parce que l’on voit les soldats hurler leur « amour » à leur « Suzie Q », mais ce ne sont que des animaux et les filles des objets. On regarde avec horreur cet enfermement dans un monde où personne n’est à sa place.

Alors que nos personnages voguent sur leur bateau, la radio passe « Satisfaction » des Rolling Stones. Le jeune de Harlem s’excite au son de cette mélodie. La chanson lui plait parce qu’elle lui correspond dans ce qu’elle représente. C’est son appartenance sociale et culturelle. Où qu’il soit, il n’aura pas de « satisfaction » parce que c’est un homme noir et pauvre. Aux Etats-Unis on le rejette, au Vietnam on le recrute pour se faire trouer. A ce moment du film, la chanson apparait alors comme une immense critique des Etats-Unis. Et en même temps, elle redonne de la vigueur à notre soldat ainsi qu’à ses compagnons, et contribue à les remettre sur la vague, à l’image du Californien surfant sur ce fleuve vietnamien. La musique comme dénonciateur, la musique comme libérateur.

La BO de ce film permet d’élever encore plus sa dimension critique. Elle diffuse des images d’apocalypse et d’enfer, de prison et d’embourbement, de grandeur et de puissance. Pas besoin de mots pour représenter l’horreur humaine. « The end of laughter and soft lies ».

Apocalypse Now, Francis Ford Coppola, 1979

The Doors, The end

 

Wagner, the ride of valkyrie

Flash Cadillac, Suzie Q

The Rolling Stones, (I can’t get no) Satisfaction


 

Romain Meaulard, L1 Humanités.

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