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« L'homme est d'acier, le tank n'est que ferraille » : Un huit clos inventif - des images envoûtantes.
« Lebanon », de Samuel Maoz
Sortie le 3 février 2010
L’histoire se passe pendant la première guerre du Liban, en juin 1982. Quatre soldats israéliens sont envoyés sur le terrain, qui doivent tout détruire sur leur passage. Et quand on a un tank à sa disposition, ce n’est pas très compliqué. Pourtant, ce ne sera pas une mince affaire pour les quatre protagonistes que nous observons : ils ne savent pas tuer, ils ne veulent pas tuer et, bien qu’ils soient protégés par cet engin quasi indestructible dans lequel ils se trouvent, ils n’ont jamais été aussi effrayés…
Si je compare « Lebanon » au jeu de FPS (First Person Shooter) « Call of Duty », j’imagine que cela vous laissera perplexe. L’un est un film israélien sur la terrible guerre du Liban, l’autre est un jeu vidéo de tir subjectif se déroulant principalement pendant la seconde guerre mondiale. Et pourtant, je vous assure que je n’étais pas sous acide au moment de la projection et que ma comparaison a « queue aussi bien que tête ».
C’est en particulier la façon dont ce film a été filmé qui en fait un véritable bijou, une expérience hors du commun. En effet, la plupart de l’action nous est montrée à travers le viseur du tank et les images en deviennent d’autant plus surprenantes. Le spectateur est comme paralysé au milieu de l’action, comme s’il était lui-même acteur de cette guerre et qu’il pouvait à tout moment tirer sur la gâchette. Le tank est cette bulle protectrice qui est le relais entre les soldats et la guerre. Ils peuvent difficilement être atteints physiquement, car ils sont « à l’abri », mais psychologiquement, ils n’auront jamais été aussi blessés et c’est ce que le réalisateur aime à montrer.
Ce film impose la compassion aussi bien pour les Israéliens que pour les Libanais. Les soldats sont là-bas contre leur gré, ils n’aiment pas ce qu’ils font, ils ne comprennent pas ce qu’ils font. Le tank permet de matérialiser l’impasse dans laquelle ils se trouvent : ils sont là, au Liban, sur le point de tuer des milliers de personnes et ils ne peuvent pas faire marche arrière, ils sont coincés et contraints de faire quelque chose qui va les traumatiser. La volonté du réalisateur est de mettre en scène des soldats conscients et sensibles, loin du cliché du soldat assoiffé de violence et sans cervelle, tout à fait capable de reproduire ses prouesses aux jeux vidéo dans la vraie vie et de tirer bêtement pour «gagner la partie».
On peut facilement considérer que ce film est biaisé, que le réalisateur israélien a voulu représenter les soldats comme des marionnettes passives et manipulées, des gens qui subissent la guerre au même titre que les Libanais. Mais ce qu’il faut savoir, c’est que Samuel Maoz s’est retrouvé dans la même situation que ces soldats en 1982 : il avait 20 ans, il a été envoyé faire la guerre au Liban et a dû tuer pour la première fois de sa vie. Le réalisateur veut nous raconter son histoire une vingtaine d’années plus tard. Résultat ? Une belle thérapie et un beau film.
Sarah Rashidian (L3 Humanités)