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Figure mythologiques, figures de mort, figures de l’abstraction : l’autre univers par la peinture



Depuis toujours, et nous sommes bien placés pour le savoir en « Humanités Â», la peinture a représenté l’abstrait et le merveilleux : que ce soit dans la peinture d’une mythologie gréco-latine omniprésente dans la société actuelle ou dans la représentation de la mort, la peinture semble constituer un pallier vers l’autre monde, une porte vers l’abstrait et l’irréel.


 Dans la continuité universelle d’un art se nourrissant de ces sujets, Egon Schiele et Gustav Klimt peignent cet autre univers, cet univers relevant d’un onirisme culturel, d’un héritage merveilleux, cet univers dans lequel la peinture peut s’épanouir, ce fond inépuisable de sujets et de manières de traiter ces derniers.


 Mythologie et allégories : la femme au service de l’idée


Cela ne vous étonnera pas : c’est encore et toujours la femme qui est au centre du sujet chez Klimt. La représentation de la figure mythologique, ici Danaé qui fut visitée par Zeus déguisé en une pluie de pièces d’or –mythe dont la représentation se marie très bien avec la période du Cycle d’Or dans l’œuvre de Klimt- est chez le peintre une fois de plus servie par la figure féminine.

 

Mais tandis que la représentation du mythe de Danaé nous parait ici tout à fait recevable et habituelle, caractérisée une fois de plus par le style de Klimt –l’or, la femme pure, le décor abondant, la nudité-, il n’en va pas de même pour toutes les représentations. Regardez en effet de plus près le tableau en tête d’article, Pallas Athénée : cette Å“uvre fait partie des plus célèbres du peintre et sera l’une des affiches de la première exposition de la Sécession en 1898. Klimt donne une nouvelle interprétation du personnage, et c’est ce qui fait la modernité du sujet : il détourne la représentation traditionnelle du personnage et en fait une lecture ironique. La peignant sous les traits d’une femme fatale ayant tous les attributs de la déesse, il place sous son visage la tête d’une gorgone qui tire la langue. Imaginiez-vous Minerve ainsi affublée ?


L’œuvre de Klimt est aussi composée de nombreuses allégories : ici La Musique. Klimt a aussi représenté La Médecineainsi que La Sculpture.

 

Ce qui compte dans la représentation de l’allégorie, c’est d’attirer l’œil vers l’élément qui va suggérer le thème du tableau : une fois de plus, tout passe par les éléments de décor qui accompagnent le personnage du tableau (la lyre et les autres instruments, la couleur or rappelant les cuivres, instruments à vent), une jeune femme fragile et légère, comme la musique ? 

            


 Malheur et mort : la peinture de la vérité.

 

La mort : un thème qui ne vous étonne sûrement pas chez un peintre comme Egon Schiele, toujours à la recherche d’un réalisme cruel dans sa peinture. Ici un thème très célèbre, celui de la jeune fille et la mort remontant jusqu’à une Antiquité que nous commençons à connaître. Le rapt de Perséphone par Hadès, nombreux tableaux de la Renaissance, le quatuor à cordes de Schubert : à chaque fois un même thème.

 Cependant ce topos semble ici prendre une toute autre signification : je vous épargne les images peu ragoutantes de la représentation du thème (encore que si ça vous tente c’est par exemple ici, ou bien ici) où l’on constate souvent une relation licencieuse entre jeunesse féminine et mort et j’attire votre attention sur le tableau. Ce que l’on voit ici ce n’est pas la mort comme être démoniaque et lubrique mais le malheur de la mort : la jeune fille du tableau sert dans ses bras un homme mourant ou déjà mort, peut-être son père ou un homme aimé. Toujours est-il que la mort prend ici un visage presque humain, comme si elle n’était pas, ce que l’on voit souvent, une créature inhumaine mais au contraire l’allégorie d’une humanité réelle et pourtant éphémère. On retrouve encore une fois Egon Schiele dans sa peinture de l’humain dans tous ses défauts, dans tout son malheur.

 



Schiele est donc aussi le peintre du malheur et j’attire à ce sujet votre attention sur un tableau que j’affectionne tout particulièrement : Le cardinal et la nonne. Il est difficile d’instaurer un suspense dans un article mais, cependant, ce tableau ne vous rappelle-t-il rien ?

 

Ce tableau de Schiele n’est autre qu’une reprise du Baiser de Gustav Klimt dans un genre tout autre. Toujours une étreinte : celle d’un homme et d’une femme, et c’est là que tout bascule dans le négatif. L’homme et la femme vivent un amour interdit par leur condition, transgression rendue par l’expression inquiète de la femme qui semble regarder le spectateur avec crainte ainsi que par le titre du tableau. Le décor coloré d’or et de formes géométriques de Klimt a laissé place à seulement deux couleurs : le rouge et le noir, l’amour et la mort qui apparaissent alors indissociables dans une telle situation. L’on peut alors comprendre ce tableau soit comme une critique de l’hypocrisie moraliste religieuse du début du siècle, soit comme la mise en scène d’un malheur humain à la fois pathétique et révoltant, la parodie d’un désir amoureux raté, d’un échec sexuel qui confère aux personnages un ethos pitoyable. Le malheur humain, toujours.


 Schiele apparaît chez nos deux artistes être le peintre du malheur, tandis que Klimt semble être doté d’un optimisme plus explicite dans sa peinture. A nuancer cependant : derrière des couleurs souvent joyeuses et printanières, Gustav Klimt est aussi le peintre du détail. Souvenez vous des protagonistes qui accompagnent la jeune femme enceinte des L’Espoir. Je m’arrête ici mais vous incite à jeter un Å“il sur La vie et la mortainsi que sur L’Amour (haut du tableau). L’amour et la beauté ont beau être omniprésents dans l’œuvre de Klimt, la mort n’est jamais très loin, la vie chez Klimt n’est qu’un état éphémère constamment menacé. Pas de manichéisme donc, mais un constant balancement…


 

 

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