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La delta force ne s'arrête jamais !
Opération Delta Force 4,
Deep Fault
Opération Delta Force 4 ou plus vraisemblablement en version originale : Deep Fault. Ce qui, vous en conviendrez, n’a pas vraiment de rapport. Mais les producteurs et les traducteurs sont des gens peu scrupuleux, et tout ce qui permet d’engranger de l’argent est permis, y compris remplacer un titre de film pour lui en faire évoquer un autre. Ici, vous l’aurez compris point de Delta Force avec Chuck Norris en fer de lance ! Inutile de vous préciser que les originaux sont superbement nuls, bien que l’essentiel du mérite revienne surtout au Texas Ranger retraité !
Comment donc reprendre le flambeau d’une telle franchise, qui à la manière des Rambo, faisait les beaux jours de l’Amérique puritaine, blanche et puissante ? Eh bien… difficilement pour ainsi dire. Je préfère vous prévenir d’entrée, ce film est moins jouissif que les premiers Delta Force, néanmoins il possède de la testostérone à en revendre, des situations totalement surréalistes, des ennemis typiques et des sbires aveugles !
Voici le pitch :
« Ex-Yougoslavie, Russie, Îles Volcaniques : une nouvelle mission aux quatre coins du monde pour les baroudeurs de la Delta Force. » Bon, déjà on se gausse un peu, parce que de la Russie on ne voit pas une miette durant tout le film, mais c’est toujours plus glamour, et plus vendeur, de parler de ce pays, plutôt que du Turkménistan (où se déroule véritablement le film!). Et puis surtout, les quatre coins du monde ont surtout l’air de se concentrer à l’Est (même si en réalité les studios doivent être au Canada : la neige ça camoufle tout).
« Les soldats de la Delta Force sont envoyés en mission secrète en ex-Yougoslavie, où la guerre fait rage ». Première incohérence : non, la guerre ne fait pas rage, elle est finie, il y a juste deux-trois allumés qui, comme souvent en période d’armistice, ne veulent pas s’avouer vaincus et tentent un dernier coup de poker. On remarquera au passage que ce film de guerre s’inscrit parfaitement dans la logique des productions américaines depuis la création d’Hollywood. Pourquoi un telle affirmation ? Parce qu’on retrouve toujours les mêmes ennemis. Il y a eu pendant longtemps les nazis, sans doute les plus gros méchants de l’histoire, resservis à toutes les sauces. Puis les communistes ; les Russes, les Chinois et les Nord-Coréens, il n’y a qu’à regarder un peu les derniers James Bond pour s’en laisser convaincre. Et puis lors d’une brève période, le temps d’une guerre dans les Balkans, il y a eu les Serbes. Désormais ce sont… ? Les Arabes ! C’est bien, vous suivez la logique. À noter que les Arabes, depuis les JO de Munich (1972), font souvent des piges dans les films de propagande américains, par exemple dans Delta Force 1.
« Ils [la Delta Force] doivent libérer des sismologues retenus prisonniers par les belligérants. Il apparaît rapidement qu’il ne s’agit pas d’une simple prise d’otages : les scientifiques auraient été arrêtés en raison de leur connaissance des phénomènes sismiques ». En réalité, encore une fois, la personne qui écrit le pitch n’a visiblement pas vu le film, puisque les scientifiques sont venus étudier les tremblements de terre en ex Yougoslavie, et ont été pris en otage par des miliciens serbes, afin de servir de monnaie d’échange. Comme par hasard, ils sont passés quelques secondes dans l’espace aérien serbe, juste le temps de se faire capturer par deux chasseurs de la grande et noble armée de Serbie.
« Skip Lang, le capitaine de la Delta Force, découvre l’existence d’un mystérieux projet baptisé Zeus et lié aux tremblements de terre. Le complot serait international, et ceux qui s’y intéressent de trop près sont éliminés »… International, si l’on considère qu’un savant fou cubain et une douzaine de miliciens serbes, sous-armés, sont les conditions d’un complot international. Parlons-en de ces méchants, comme vous l’avez compris, ils rentrent parfaitement dans la définition « ennemis de l’Amérique ». D’abord on a un savant fou cubain (donc communiste), le gros méchant du film, qui veut se venger des Etats-Unis, parce qu’ils lui ont coupé les fonds de son projet. Notre bon savant s’est alors senti : « comme les Cubains avec l’embargo américain ». À noter que l’embargo américain ne le dérangeait absolument pas tant qu’il avait ses crédits…
Le film commence sur des skieurs qui font du hors piste pendant dix minutes… Pardon-je voulais dire : des soldats surentraînés qui vont délivrer les otages. Pour cela, ils descendent donc les pentes enneigées d’un massif serbe. Au passage, on ne le voit jamais autour du camp des miliciens, en effet il n’y a quasiment plus de neige. Difficile de skier sur de l’herbe, sauf pour les forces spéciales américaines ! La magie des faux raccords. La Delta Force est composée d’une demi douzaine d’hommes qui vont défaire une trentaine de miliciens. Vous me direz que c’est une troupe d’élite, ce qui n’est pas faux, mais tout de même, expliquez-moi depuis quand, lorsqu’on tire un coup de feu, deux hommes s’écroulent, et qu’un troisième se retrouve avec trois balles dans le dos.
Les acteurs quant à eux sont plutôt crédibles ; certes ils ont tendance à faire trois mille roulades dans la boue afin d’éviter les tirs ennemis, et à se cacher derrière des chaises pour se protéger des balles. On arrive d’ailleurs dans l’une des constantes du film de guerre américain patriotique ; la Delta Force peut tuer un ennemi avec un pistolet (l’arme la moins précise au monde) à cinquante mètres, lorsque trois sbires sont incapables de toucher un américain à cinq mètres avec des mitraillettes. La citoyenneté américaine permet, c’est un fait, d’éviter les balles de tout ce qui n’est pas capitaliste !
Je ne vais pas vous raconter toute l’histoire, qui est assez similaire à celle d’un James Bond si ce n’est qu’ils sont plusieurs à jouer les héros. Un cocktail classique en somme avec du scientifique vengeur, des militaires américains et des otages. Néanmoins je me permets de vous révéler une des nombreuses débilités du film, qui se situe à la fin, lorsque la troupe d’élite infiltre la base *toussotement* « secrète » du cubain, afin d’y désamorcer l’arme qu’il a mise au point. Le projet Zeus, un missile qui vise les failles de la croûte terrestre afin de déclencher des tremblements de terre. Inutile de dire que l’on a vraiment du mal à comprendre comment cela fonctionne...
Bref, nos amis se rendent sur place et se retrouvent bloqués dans l’un des nombreux couloirs, par une sulfateuse ennemie. Au bout de cinq minutes passées à tergiverser, l’un des hommes, en pleine dépression semble-t-il, décide de la jouer kamikaze. Il dégoupille deux grenades, réfléchit, sourit, regarde autour de lui, commence à courir, se prend une dizaine de balles (faut pas exagérer non plus hein), mais se relève, continue à avancer vers l’avant-poste ennemi, se reprend une volée de balles, mais arrive tout de même à lancer ses deux grenades et à faire sauter les sbires. Sans exagérer, la scène doit durer, sans compter les ralentis, trois ou quatre minutes ; or une grenade est censée exploser, au bout d’une dizaine de secondes maximum. Du grand, du très grand n’importe quoi !
À l’image de cette scène, tout dans Delta Force 4 est « trop » ! Ils essaient véritablement de faire en sorte que ce film soit réaliste, qu’il ait une certaine cohérence, en vain. Certes il n’y a pas Chuck Norris, mais la bande et avec ses considérations philosophico-testostéronées envoie du lourd ! Un petit détail amusant pour la route : l’hélicoptère de l’ONU qui permet aux otages de s’enfuir au début du film est strictement le même que celui qui emmène du plutonium pour les miliciens au milieu du film. Ils ont juste retiré l’autocollant U.N., dont on peut voir certaines traces néanmoins. J’aime !