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Martin Scorsese : Taxi Driver (1976)
Considéré comme un des films cultes des années 70, Taxi Driver connut un succès considérable dès sa sortie, en 1976, année où il remporta la palme d’or au festival de Cannes, avant d’être nominé pour quatre oscars en 1977. On lui a cependant souvent reproché la lenteur de son action. En effet, péripéties et rebondissements ne sont pas au rendez-vous, ce qui rend bon nombre de spectateurs insensibles au charme du film. Mais il s’agit d’un authentique chef-d’œuvre, qui, par le biais d’ une esthétique et d’une mise en scène à couper le souffle, et avec toute l’ énergie et la violence qui caractérisent le style de Scorsese, nous plonge dans l’atmosphère pénétrante et quelque peu angoissante des quartiers pauvres et délabrés de New York ― là où règnent le vice et la débauche.
Le film a pour personnage principal un jeune vétéran du Vietnam devenu chauffeur de taxi, Travis. Celui-ci ― interprété brillamment par Robert de Niro ― n'a rien d'une figure héroïque traditionnelle, et nous inspire tantôt de l’empathie, tantôt de la répulsion, quand nous le voyons aux prises avec le monde violent qui l’entoure – un monde où il ne se sent pas à l'aise mais où il désire coûte que coûte s’intégrer, y cherchant désespérément tout à la fois des repères et une reconnaissance. Tout au long du film, nous assistons à sa descente en enfers – jusqu’au moment où il finit par sombrer dans la folie et le désir de meurtre.
En fait, la lenteur du film contribue à l'atmosphère qui le domine. Elle semble incarner la solitude et le sentiment de vide qu'éprouve Travis, tout comme la voix off qui à certains moments révèle son dégoût pour ce qui défile devant ses yeux – et entraîne le spectateur dans l'intériorité du personnage. Mais l’isolement de celui-ci et sa quête de sens se dévoilent aussi de manière particulièrement émouvante dans la célèbre scène qui nous le montre en train de préparer l'assassinat d’un homme politique candidat aux élections présidentielles, et où on le voit menacer de son arme son propre reflet.
Taxi Driver est fait pour perturber le spectateur. Tout est mis en œuvre pour nous baigner dans une ambiance étrange quoique réaliste. L'histoire de Travis est celle d'un homme comme les autres, qui se noie dans un océan de détresse. Certes il n'y a pas de scénario à proprement parler, mais le jeu des acteurs, les plans captivants, et la bande originale de Bernard Hermann, inspirée du jazz, forment un tout magique qui retient l’attention de bout en bout si l'on accepte de se plonger dans l'univers particulier de ce film extraordinaire. Un film qui dérange et ne plait pas à tout le monde, mais qui tient sa beauté précisément de ce que question du sens n'y est pas adéquate. On a affaire à un film qui se ressent et qui s'ėprouve plus qu'il ne s'explique.
Lisa Oursel - L1 Humanités