EDUCATION A LA GORKI
Alexeï Maksimovitch Pechkov est un écrivain russe soviétique, né en 1886 au sein d´un milieu pauvre à Nijni Novograd où s´écoule le plus grand fleuve européen, Volga, qui aura une place significative dans ses oeuvres. Sa puissante capacité d´observation n´a pas seulement joué un rôle majeur dans ses créations écrites, mais elle a aussi fait son pseudonyme: Gorki, qui signifie en russe „amer“. Il n'aura pas été fidèle à un genre littéraire , mais à lui-même. Le réalisme socialiste est la façon dont il envisageait les choses jusqu´à la dernière petitesse. Les gens, tels qu´ils étaient, lui donnaient une sorte d´ardeur. Il voyait la dureté de la réalité, mais à sa manière, affectueuse et idéaliste.
Toujours en opposition au déroulement de son époque, il n´a pas fait grande attention aux critiques littéraires de ses contemporains qui l´ont peu apprécié, et a écrit de nombreux ouvrages (des romans, des récits ainsi que des pièces de théâtre) qui, tous, portent une réflexion sur la société qui l´a entouré et sur l´individu qui y était coincé. Son mécontentement l´a conduit à des rencontres clandestines, dans les mouvements sociaux, dans les mouvements marxistes, ainsi qu´en prison et à l´exil. Marqué aussi par ses expériences itinérantes diverses (États-unis, Allemagne, Italie), il n'a pas cessé d´écrire et cela a encore affecté sa conscience et sa sensibilité face à son entourage.
Sa valise riche d´expériences s´est vidée entre autres aussi lors de sa trilogie autobiographique, dont la dernière oeuvre qui date de 1923 était „Mes universités“. Bien sûr, cela n´a rien à voir avec une éducation officielle, c´est l´apprentissage qu´il a reçu de ses héros misérables. Tout au long du récit, on passe par son point de vue où l´obscurité des clichés s´envole, donnant essor à l´originalité pure de l´individu. Il dépouille les relations réciproques sans leur ôter ni la grossièreté ni les vertus. En décrivant des milieux différents, il représente les charges pénibles que les hommes subissaient et on saisit d´une manière tout à fait franche et ouverte ses perceptions personnelles, l'expérience de son intériorité criant vers la liberté. La lecture est marquée d´une impression d´imprévisibilité et de spontanéité où le côté choquant est inévitable.
C´est avec un adieu que le livre commence, un adieu à sa grand-mère adorée qu´il n'allait jamais revoir. Parti à l´improviste afin de faire ses études auxquelles il tenait beaucoup, il n´a pas été accepté dans l´institution, quand la suite des choses l´a forcé à faire différents métiers et rencontrer des gens jamais identiques. En faisant tout avec zèle et intérêt, il a transformé ces expériences en sa propre éducation sur la nature des gens, sur ses échanges et interactions, inclus dans l’énormité du système.
Il démontre très clairement qu´il ne veut faire ni l´apologie de la classe opprimée, ni la montrer dans le sens de sa victimisation, de même qu´il ne la critique pas afin de lui reprocher son ignorance ou autres faiblesses. Au contraire, il l'observe. Il la comprend. Et il l´accepte. Ce qui semble le plus important est ce qu´il aime. Comme il l´a écrit dans son ouvrage « Mes universités » : „ Quand on parlait du peuple, je découvrais, plein de stupéfaction et de méfiance envers moi-même, que je ne pouvais penser comme mes interlocuteurs [les étudiants]. Pour eux le peuple incarnait la sagesse, la beauté spirituelle, la bonté; il était presque comparable à Dieu, un en substance, vase d´élection de tout ce qui est beau, juste, majestueux. Ce peuple-là je l´ignorais. /.../ les étudiants comparaient le peuple à Dieu et le plaçaient au-dessus d´eux-mêmes, prêts à se soumettre à sa volonté. J´aurais cru, au contraire, que c´étaient les étudiants qui personnifiaient la bonté et la puissance de la pensée, qu´en eux se concentrait et brûlait le désir d´une vie pleine d´amour de l´homme, le désir de reconstruire la vie selon de nouveaux canons de cet amour.“