À l’âge où les enfants cessent de croire en la magie, Clara y croit plus que jamais. Jeune fille logique et pragmatique, rien ne la destinait à vivre ces aventures. Mais voilà ! Clara n’est pas une petite fille comme les autres, elle possède les yeux du Clairvoyage, un don rare. Le décès de ses parents va précipiter son incursion dans le monde féerique et marquer la fin de son enfance. Chez son oncle Antoine et sa tante Bébé, Clara fera la connaissance des chasseurs de fées, rencontrera les fantômes de ses ancêtres, et découvrira l’existence des fées. Des fées qui peuvent se montrer cruelles et faire douter Clara de leurs intentions. Peut-elle se fier à elles ou doit-elle rejoindre le camp des chasseurs de fées ? Dans ses aventures qui l’emmèneront dans la brume des jours, Clara pourra compter sur sa tante Coucou, Monsieur Li, le chasseur de fées et le jeune Gauvain. Gauvain à qui elle est prédestinée, mais avec qui elle entretient une relation conflictuelle.
Entre Alice au pays des merveilles et Songe d’une nuit d’été, le premier roman en deux tomes d’Anne Fakhouri nous entraîne dans un fascinant voyage en compagnie des fées et de leurs méfaits. On peut peut-être regretter, dans La Brume des Jours, l’enchaînement parfois trop rapide des péripéties vécues par les personnages. Le lecteur manque quelquefois des informations qui lui permettraient de vivre pleinement les aventures en compagnie de Clara. Cette petite frustration mise à part, l’auteur décrit avec talent le caractère de ses personnages sans omettre leur part d’ombre. C’est une histoire qu’apprécieront les adeptes de contes de fées, ne serait-ce que pour l’imagination dont fait preuve l’auteur et les divers clins d’œil à des œuvres qui ont su nous faire rêver.
Interview avec Anne Fakhouri :
LP : Tes livres s’adressent à un public adolescent, « jeune adulte ». Est-ce un choix voulu ? Quel message souhaites-tu leur transmettre ?
AF : Je ne pense pas qu’il y ait réellement un message dans Le Clairvoyage. C’est plus un livre pour s’évader. Bien sûr, on y retrouve une certaine conception de la vie et même de la mort mais je n’ai pas voulu faire passer un message, juste mettre en mots cette vision. Je suis déjà professeur, donc dans la transmission. Peut-être, du coup, n’ai-je pas ce besoin de faire passer des messages en permanence en écrivant. Cependant, quand j’ai écrit Le Clairvoyage, je me suis aperçue que je l’avais naturellement destiné à des adolescents, peut-être à cause du thème ou simplement de mon métier. En revanche, les lecteurs que je vois en dédicace sont en majorité des adultes. Je ne voudrais pas qu’on pense que j’ai écrit ce livre « au hasard » mais je n’avais vraiment pas d’intention particulière à la base, si ce n’est partager cette histoire.
LP : Entre Le Clairvoyage et La Brume des Jours, Clara passe de l’enfance à l’adolescence en un temps très court. Une transformation brutale, qui déstabilise aussi bien Clara que le lecteur. Pourquoi une telle transformation ?
AF : Ca n’est pas très intéressant d’être prédestinée à un grand amour si on a douze ans. Je voulais également voir Clara évoluer, vivre des aventures différentes. Je sais que ça peut déstabiliser. C’était un peu le but, en soi. Je ne voulais pas écrire une suite du Clairvoyage, avec les mêmes ressorts et personnages mais bien la suite de la vie de Clara. Être prédestinée au grand amour ou posséder un don particulier mène obligatoirement à une métamorphose. De plus, traiter de l’adolescence sous cet angle m’intéressait. Je n’avais pas envie de mettre en scène une adolescente mais de montrer les changements qui s’opèrent à cet âge : la découverte d’un amour différent, du dilemme, de la responsabilité qui est tout de même le fil conducteur, l’héritage de Clara par son père.
LP : Dans Le Clairvoyage ou La Brume des Jours, ta vision des fées peut étonner. D’où te vient cette image singulière des fées ?
AF : Du Grand Fabulaire du Petit Peuple, de Dubois et Hausmann, que je lisais dans Spirou et du Parlement des Fées de John Crowley. Leurs fées sont mystérieuses et païennes, par définition.
LP : Les références à Alice au pays des merveilles de Lewis Carroll, au Songe d’une nuit d’été de Shakespeare ou aux mythes arthuriens sont très présentes dans le récit. Ces œuvres t’ont-elles marquées ?
AF : J’ai découvert le mythe arthurien vers huit ans, dans la version de Steinbeck, le Roi Arthur et ses preux chevaliers. J’ai été marquée par le personnage de Lancelot et celui, plus discret au fond, de Gauvain. J’adorais déjà l’idée de dilemme et les grands héros.
Avec Lewis Carroll, j’ai une histoire plus personnelle. J’ai lu Alice quand je vivais aux Emirats Arabes Unis. J’allais dans une école anglaise. J’ai donc abordé l’œuvre dans sa version originale. L’intrusion du thé et des comptines traditionnelles dans le désert a été un choc. Par ailleurs, j’ai compris que j’allais mourir en lisant De l’autre côté du miroir, à cause du personnage d’Humpty Dumpty qui déclare à Alice qu’elle aurait dû arrêter de grandir à sept ans. J’en avais sept et demi, moi aussi... J’ai toujours vécu dans des mondes parallèles et littéraires. Il aurait été difficile de passer à côté de cette œuvre.
Enfin, pour Shakespeare… Je ne suis pas une passionnée de théâtre mais j’aime sa poésie. J’ai mis du temps à l’apprécier. À force de lire et de relire des interprétations, des réécritures ou d’entendre parler de son œuvre, on l’aborde du bout des doigts. Mais une fois plongée dans Le Songe d’une nuit d’été, j’ai adoré.
LP : As-tu des projets d’écriture en cours ?
AF : Oui, plein ! C’est bien mon problème. J’ai un roman en cours, deux en ébauche, et un recueil de nouvelles qui m’attend. Si je m’écoutais, je commencerais à tout écrire mais j’essaie de ne pas mélanger les projets. Celui que j’écris actuellement porte sur les Chevaliers de la Table ronde. Après, je me mettrai à la rédaction d’un livre qui me tient à cœur depuis longtemps, à tel point que je n’ai pas pu m’empêcher d’utiliser un de ces personnages pour La Brume des Jours. Le lien sera fait…
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Le Clairvoyage (tome 1) et La Brume des Jours (tome 2), d’Anne Fakhouri, éditions L’Atalante jeunesse.
Lucie Pitzalis (L1)