La décision Cariou v. Prince : les limites de la doctrine du fair use et le problème de la responsabilité secondaire des galeries d'art dans le contexte du postmodernisme, par Aurélie Pacaud
La décision Cariou v. Prince : les limites de la doctrine du fair use et le problème de la responsabilité secondaire des galeries d'art dans le contexte du postmodernisme, par Aurélie Pacaud
Dans ce billet, on examine la responsabilité des artistes « appropriationistes » pour violation de droits d'auteurs, et les échappatoires limitées prévues par les droits français et américains. La responsabilité indirecte des galeries d'art est aussi évoquée. Dans le contexte artistique actuel où le postmodernisme est le courant principal, on voit dans la décision Cariou v. Prince la tension qui existe entre l'art et la loi, et la difficulté de trouver un test juste qui met en balance la préservation des droits d'auteur ainsi que la liberté d'expression.
Mots clés : Appropriation – Fair use – Droits d'auteur – Postmodernisme – Responsabilité secondaire - Parodie
Le 18 mars 2011, Deborah Batts, juge de la Southern District Court de l'Etat de New York a tranché le litige concernant une violation de droits d'auteur, opposant le photographe Patrick Cariou, à l'artiste appropriationiste Richard Prince ainsi qu'au directeur de galerie Lawrence Gagosian. Cet arrêt répond à, mais aussi soulève de nombreux problèmes : dans le contexte artistique actuel, est-ce que les artistes s'appropriant le travail de leurs prédécesseurs doivent être tenus responsables pour violation de droits d'auteur? Si oui, sous quelles conditions? Le test développé par la jurisprudence américaine avec la doctrine du fair use est-il adapté? Qu'en est-il en France? Qu'en est-il des galeries d'art qui exposent ces artistes? Doivent-elles effectuer une procédure de “due diligence” avant d'accepter de vendre des oeuvres? La décision, qui en plus de coûter cher à Richard Prince et Larry Gagosian, menace de changer le monde de l'art tel qu'on le connait aujourd'hui. En effet, de nos jours, qui sont les artistes les plus cotés sur le marché ? Damien Hirst et son crane en diamants à 1 million de $, appropriation présumée du crane de cristal de John LeKay, Jeff Koons, et ses répliques d'images de la culture de masse, comme le fameux “String of Puppies”, Andy Warhol, et son détournement de la culture pop, Shepard Fairey, et sa célèbre image “Obamahope”, créée a partir d'une photo de Mannie Garcia trouvée sur google. Tous ces artistes fondent leur art sur le fait de reprendre des photos, objets, images déjà existants, et de les transformer, avec ou sans objectif particulier. Comment le droit peut-il s'adapter à ce phénomène, en protégeant ce qui doit être protégé et en autorisant ce qui doit l’être? Un nouvel obstacle fait face à l’éternel problème de mettre en balance le droit d'auteur et la liberté d'expression. Cette décision est une explosion dans le monde de l'art, elle signifie a la fois un frein considérable pour les artistes appropriationistes, et un autre pour les galeries d'art qui doivent maintenant jouer un rôle de police. La place de l'appropriation dans le marche de l'art est un phénomène global, et plus particulièrement en France et aux Etats-Unis, centres culturels et berceaux du postmodernisme, c'est pourquoi ces questions se posent indifféremment dans les deux droits. Jusqu'ici, aucune réponse satisfaisante, il existe de nombreux courants d’idées concernant une possible reforme du droit, et trouver une solution juste est aujourd'hui un challenge.
I. Introduction au postmodernisme et à l'art de l'appropriation
L'art de l'appropriation trouve son origine dans le mouvement postmoderniste. Selon Amy Adler (« Post-modern art and the death of obscenity law », Yale Law Journal, April 1990) le postmodernisme est né de la rébellion contre les dictats du modernisme, ce mouvement artistique représenté par Edouard Manet, qui symbolise l'art comme devant être pur, sérieux. Le postmodernisme, suivant les traces des dadaïstes et des artistes tels que Marcel Duchamp, consiste à renverser les standards traditionnellement attribués à l'art, à abolir les distinctions faites entre le bon et le mauvais, la noblesse de l'art et la culture populaire, la sincérité et le cynisme, et à remettre en question des sujets tels que l’originalité et la paternité. L'art de l'appropriation consiste à copier consciemment et avec une réflexion stratégique des travaux déjà existants. Les artistes les plus reconnus sont notamment Marcel Duchamp et son célèbre L.H.O.O.Q, dépeignant une Mona Lisa pourvue d'une moustache, Jeff Koons, Sherrie Levine et ses re- photographies, Cindy Sherman et bien sur, Richard Prince. Aujourd'hui, l'art et la culture populaire sont devenus interdépendants, et les artistes ont besoin de ces « matières premières » pour créer ; comment le droit et sa rationalité tente de comprendre l'art et son abstraction ? C'est le challenge qui se pose aux juges depuis de nombreuses années, et cet arrêt est une nouvelle pièce du puzzle.
II. La responsabilité pour violation des droits d'auteur et ses limites, aux Etats-Unis et en France
Dans les deux systèmes, la responsabilité pour violation des droits d'auteur connait des limites. La doctrine du “fair use” a pour fonction de mettre en balance le monopole crée par le droit d'auteur et la liberté d'expression. Lorsque la “Copyright Clause” (US Constitution article I section 8) a été rédigée, l'objectif était de servir l’intérêt du public en promouvant la création artistique en donnant aux auteurs une motivation d'ordre financière. Toutefois, comme Goldstein le fait remarquer, une exception est parfois nécessaire lorsque la création artistique et le bénéfice du public qui en résultent surpassent les intérêts de l'auteur. Justice Story, dans l’arrêt Emerson v. Davis note que “tout ouvrage littéraire, scientifique et toute oeuvre d'art doit nécessairement emprunter et utiliser ce qui existait déjà auparavant”. Ce test est aujourd'hui codifié à l'article 107 du Copyright Act de 1976, et comporte quatre facteurs: (1) l'objet et le caractère de l'usage, (2) la nature de l'oeuvre protégée, (3) l'importance de l'emprunt, (4) et l'effet de l'usage sur le marché potentiel de l'oeuvre protégée. La liste des facteurs n'est pas exhaustive, et aucun d'entre eux n'est déterminant, c'est un test flexible qui se décide au cas par cas. L'analyse du premier facteur, de loin le plus important, comme le fait remarquer Juge Batts citant Campbell, peut être guidée par les exemples donnés dans le préambule de l'article 107, en regardant si l'appropriation sert un objectif de critique, de commentaire, de journalisme, ou bien, comme reconnu dans Campbell, de parodie. Cet arrêt précise ce critère en énonçant que cela revient à regarder si l'oeuvre est « transformative », c'est a dire se demander si elle ajoute quelque chose de nouveau, modifiant l'original en y apportant une autre signification, un autre message. Un autre critère important concernant le commentaire et la parodie, qui a été dégagé par l’arrêt Rogers v. Koons, est le lien entre l'oeuvre d'origine et les intentions de l'artiste : lorsque l'artiste revendique une intention parodique ou satirique, l'oeuvre d'origine doit en être le sujet. Koons avait dans cette affaire déclaré qu'il souhaitait faire la critique de la culture de masse, et avait choisi de désacraliser une image distribuée largement au grand public, qui était pour lui la représentation de cette culture. En aucun cas Koons ne moquait l'image en soi ou Art Rogers, son photographe, et c'est ce qui l'avait perdu.
En droit français, connu pour être très strict en matière de propriété intellectuelle, notamment à cause de la forte protection des droits moraux, le Code de la Propriété Intellectuelle, dans son article L122-5, énonce les exceptions à l’étendue de la protection des droits d'auteur. Contrairement au droit américain, qui prévoit un test flexible et qui peut selon les faits faire pencher la balance d'un coté ou d'un autre, la liste des exceptions est limitative, et d’interprétation stricte. L’alinéa 4 exempt la “parodie, pastiche et caricature, compte tenu des lois du genre”. Ces lois du genre posent deux conditions, l'oeuvre doit avoir un objectif humoristique, faire rire sans dénigrer l'original ou nuire à son auteur, et ne doit pas permettre la confusion avec l'original. Le premier problème que l'on peut déceler est la nécessite de « faire rire », cela inclut-il la satire ? Cela inclut-il un commentaire qui sans s'apparenter à la raillerie est une réflexion sur un sujet de société ? La parodie est mal définie, et semble restreindre l'application de cette exception à un nombre d'oeuvres très limité. Le second est la nécessité d’éviter la confusion, comme le fait remarquer Caroline Rawski dans son article (« La parodie : Etude comparée en droit d’auteur et copyright”), cela implique que l'oeuvre d'origine doit être identifiable (TGI Paris, 29 novembre 2000, Société BMG Music Pub c/ Lancelot Films) et par conséquent avoir une notoriété suffisante pour permettre « l’identification immédiate de l’œuvre parodiée » (Cass. 1ère Civ., 12 janvier 1988, Ed. Salabert c/ Le Luron, Mabille et autres).
III. Les faits et l'application du droit
Patrick Cariou est un photographe français renommé qui, fasciné par la culture Rastafari, a passé six ans en Jamaïque en compagnie de membres de la communauté. Apres avoir gagné leur confiance, Cariou put réaliser leurs portraits, qu'il compila dans un livre intitulé “Yes, Rasta”. Richard Prince est un artiste d'appropriation, connu notamment pour ses re-photographies, telles que Sans Titre (Cowboy), a l'origine de Sam Abell, et Spiritual America, de Gary Gross. Lawrence Gagosian, directeur de la galerie Gagosian, est selon le magazine britannique Artreview, “la personne la plus puissante sur le marche de l'art”. Richard Prince a crée une série de collages, “Canalzone”, mettant en scène les Rastafaris photographiés par Patrick Cariou, sans son autorisation. Certains des collages reprennent la quasi-totalité des photographies, d'autres n'en utilisent que certains éléments. Exposées en décembre 2007 à la galerie Gagosian, les œuvres constituant Canalzone ont été vendues pour plus de 10 millions de dollars. Patrick Cariou a donc entamé des poursuites pour violation de ses droits d'auteur, à l'encontre de Richard Prince, et de Lawrence Gagosian, pour ce dernier pour violation directe et indirecte. Le 18 mars 2001, dans un jugement en référé (“summary judgment”), Deborah Batts, juge de la Southern District Court de l'Etat de New York a tranché ce litige en faveur de Patrick Cariou, ordonnant la remise à ce dernier de toutes les oeuvres, y compris celles déjà vendues.
Apres avoir reconnu l'existence d'une protection de ces droits d'auteur à Patrick Cariou pour ses œuvres de « Yes, Rasta ! », juge Batts examine la contention de Prince que son travail constitue un « fair use ». Dans cette analyse, les quatre facteurs sont examinés, mais dans le cadre de notre problématique, on ne veut se concentrer que sur le premier facteur, « purpose and character », constitué de trois volets, le caractère transformatif, le but lucratif et la mauvaise foi. Que signifie ce critère de « transformativeness » ? Est-ce qu'une artiste comme Sherrie Levine, qui transforme non pas physiquement mais conceptuellement les photos de Walker Evans, peut passer le test? Walker Evans, dans sa série réalisée pour la Farm Security Administration documentait les effets de la dépression sur les agriculteurs dans le Mid-West. Sherrie Levine, dans Mayhem, expose des re-photographies de la série de Walker Evans. Il n'existe aucune différence physique, on ne saurait dire laquelle est l'originale, mais une intention de commenter sur la notion de paternité dans la photographie. La transformation conceptuelle est-elle suffisante? Et dans le cas contraire, la transformation purement physique, comme celle effectuée par Prince, sans concept ou intention sous-jacente, qui considère le travail de Cariou comme une “matière première”, remplit-elle ce critère?
Selon Juge Batts, qui fonde toute son appréciation sur les déclarations de Prince quant à ses intentions, ce n'est pas le cas. Dans le raisonnement, Batts commence par rappeler l'objectif de protection de l’intérêt public du fair use, puis cite Campbell pour établir que le commentaire doit concerner d'une manière ou d'une autre l'oeuvre originale. Elle reprend aussi Rogers v. Koons qui énonce qu'un simple usage artistique diffèrent de l'image ne suffit pas, et que cela ouvrirait les portes à la disparition de tout copyright. L’étape suivante est la recherche des intentions de Prince, selon ses témoignages, celui-ce ne s’intéresse pas à la signification des œuvres qu'ils s'approprie, son art ne comporte aucun message particulier, et sa volonté était ici de rendre hommage, par le processus du collage, à d'autres artistes tels que Picasso, Cézanne ou De Kooning. S'il utilise des photographies existantes au lieu d'en créer de nouvelles, c'est pour inclure dans son travail « des faits réels et réduire la spéculation ». A cela, juge Batts répond que visiblement, Prince n'avait aucune intention de commenter l'oeuvre de Cariou, et que la transformation physique, qui dans certaines œuvres est presque inexistante, contribue a la détermination que ce critère n'est pas rempli. Les deux autres volets de ce facteur, sont examinés au détriment de Prince, qui a gagné beaucoup d'argent grâce à Canalzone, et qui aurait pu demander l'autorisation à Cariou d'utiliser les images de « Yes, Rasta ». Les trois autres facteurs, sont déterminés en faveur de Cariou.
Que penser de ce raisonnement ? L'intention de l'artiste est-elle si importante ? Justice Holmes nous dit qu'il est dangereux pour un homme de loi de juger la valeur d'une œuvre d'art, cela vaut pour Juge Batts qui dans une certaine mesure se proclame juge de l'intention artistique de Prince. Cela change-t-il la valeur d'une œuvre d'art pour le public si celle-ci a été faite uniquement dans un but esthétique, ou bien dans une réflexion poussée sur la société ? C'est justement la beauté de l'art, la subjectivité, chacun est libre d'y voir et d'y interpréter ce qu'il souhaite, c'est aussi un des fondements postmoderniste, l'art ne devrait pas être contraint de rentrer dans certaines définitions. En droit français, la solution aurait surement été similaire, car comme vu précédemment la parodie a des critères très spécifiques, et l'on pourrait se demander si les photographies de Cariou seraient suffisamment identifiables pour le grand public. Il existe donc une lacune dans le droit, et certains auteurs tels que Patricia Krieg, proposent une nouvelle exception fondée sur la liberté d'expression compte tenu du caractère politique des commentaires, d'autres comme John Carlin militent pour une reforme des quatre facteurs du fair use (Beyond Rogers v. Koons: A Fair Use Standard for Appropriation, E. Kenly Ames, Columbia Law Review, Vol. 93, No. 6 (Oct., 1993), pp. 1473-1526). La possibilité d’établir un système extensif de licences et d'autorisation pour l'utilisation d'images et autre œuvres d'art a aussi été une possibilité débattue. Joshua Schiller, avocat de Prince pour son appel, soutient qu'une limite a la protection des droits d'auteur existe lorsqu'une nouvelle oeuvre d'art résulte de l'emprunt. La cour devra donc déterminer cette question et, avec espoir, formulera une nouvelle interprétation du fair use qui prend en compte l'age digital et l’intérêt que peut avoir le public dans la création d'oeuvres d'appropriation.
IV. La responsabilité de Lawrence Gagosian, directe et indirecte
La deuxième question à trancher concernait la responsabilité de la galerie Gagosian, et de son directeur et fondateur Lawrence Gagosian. Cette responsabilité est invoquée dans sa dimension directe, ainsi que dans sa dimension secondaire (« vicarious liability »). Concernant la responsabilité directe, Juge Batts considère que l'impression et la vente des catalogues de l'exposition, la distribution de cartons d'invitations sur lesquelles figuraient des photographies litigieuses, ainsi que le fait d'exposer et de mettre en vente des œuvres contrefaites suffisaient pour constituer une violation des droits d'auteurs de Patrick Cariou. Toutefois le point de la décision le plus inattendu est celui qui traite de la responsabilité indirecte de Gagosian. Est évoquée la décision Faulkner v. Nat'l Geo. (211. Supp.2d450, 472, S.D.N.Y. 2002), par laquelle le concept de responsabilité indirecte a été dégagé, et qui a déterminé que les facteurs à prendre en compte étaient le bénéfice financier et le contrôle, et qui requiert de plus de la part du défendeur la connaissance de cause (« knowledge »). Juge Batts applique ce principe aux faits d’espèce et détermine que Gagosian était en capacité de superviser le travail de Prince, et en capacité, sinon tenu responsable, de vérifier que Prince avait l'autorisation de Cariou d'utiliser ses photos. Le bénéfice financier de Gagosian est évident. En ce qui concerne la connaissance de cause, Batts considère que la réputation de Richard Prince comme appropriationiste qui rejette les dictats du droit d'auteur le précède, et que Gagosian savait, ou aurait du savoir qu'il était probable que Canalzone soient des œuvres contrefaites. Par cette détermination, est mise en place une obligation de diligence, les galeries ne peuvent plus exposer des œuvres sans vérifier si en cas d'appropriation toutes les autorisations nécessaires ont été obtenues préalablement par l'artiste, le monde de l'art présage un « chilling effect », c'est a dire une diminution de la création, et des expositions, par peur de faire face a d'importantes sanctions.
En ce qui concerne la France, l'ouvrage d'André Bertrand, (Le droit d'auteur et les droits voisins, 2nde édition, Dalloz) est le plus explicite sur l’état du droit en la matière. L'article L335-2 du CPI punit des mêmes peines que la contrefaçon « le débit, l'exportation et l'importation d'ouvrages contrefaits. » Par débit on entend la vente d'ouvrages contrefaits, et contrairement a la véritable contrefaçon, le débit d'ouvrages contrefaits n'est répréhensible que s''il a eu lieu en connaissance de cause et si la mauvaise foi est dument établie. (CA Paris 13e chambre, 28 mai 1979) La jurisprudence considère systématiquement qu'il appartenait au vendeur d’établir sa bonne foi en démontrant “qu'il n'a pas agi sciemment ou commis de faute d'imprudence ou de négligence” (Cass. Com 18 octobre 1994, Chemoni c/ Galil). L'absence de faute est toutefois rarement retenue lorsqu'il s'agit d'un vendeur spécialisé, et deux arrêts (Cass. Crim 6 mai 1981 ; Cass. 1ere. Civ. 27 février 1973) l'ont spécifiquement confirme pour le cas des galeries d'art. On peut aussi considérer l'article L.335-3 du CPI qui énonce « qu'il est également un délit de contrefaçon toute diffusion par quel moyen que ce soit d'une oeuvre de l'esprit”. On voit qu'en droit français, les textes sont clairs et prévoient expressément ce type de responsabilité, toutefois, comme en droit américain, on pourrait certainement aussi appliquer doctrine de la responsabilité pour le fait d'autrui, en effet l'article 1384 al.1 du Code Civil a été interprété comme créant un système général de responsabilité pour le fait d'autrui (Cass. Ass. Plé., 29 mars 1991, Blieck), à la condition qu'il y ait une garde, c'est à dire le pouvoir de contrôler ou d'organiser l’activité d'autrui.
Pour conclure, on peut noter que cet arrêt met en lumière la tension qui existe entre le monde de l'art et le monde juridique. Les deux droits mis en comparaison, bien qu'ayant une histoire et une culture de la propriété intellectuelle complètement différentes, se sont montrés tous deux insuffisants face à ce problème. Le droit français a le mérite d’être plus clair en ce que l’interprétation des exceptions est stricte, là ou le droit américain est vague et imprévisible. Richard Prince, soutenu notamment par la Fondation Andy Warhol et Google, a fait appel et les plaidoiries doivent commencer en Mai, nous verrons alors si les tribunaux sont prêts à reformer la responsabilité en cas de violation de droits d'auteur pour s'adapter à ce phénomène contemporain.
Bibliographie :
• Campbell v. Acuff-Rose Music, 510 U.S. 569 (1994)
• Rogers v. Koons, 960 F.2d 301 (2d Cir. 1992)
• Colombet, Claude. «Propriete litteraire et artistique et droits voisins, 9eme edition ». Precis Dalloz
• Bertrand, Andre. « Le droit d'auteur et les droits voisins, 2nde edition ». Dalloz
• Gautier, Pierre-Yves. « Propriete litteraire et artistique, 4eme edition ». Collection Droit fondamental, Puf
• Mendis, Sunimal. « Copyright, the Freedom of Expression and the Right to informtion – Exploring a potential Public Interest Exception to Copyright in Europe ». MIPLC Studies, Nomos
• Davies, Gillian. « Copyright and the public interest, second edition ». Modern Legal Studies, Thomson, Sweet & Maxwell
• Ames, E. Kenly. « Beyond Rogers v. Koons: A Fair Use Standard for Appropriation ». Columbia Law Revie w, Vol. 93, No. 6 (Oct., 1993), pp. 1473-1526
• Adler, Amy. « Post-modern art and the death of obscenity law ». Yale Law Journal, April 1990
• Rawski, Caroline. « La parodie : Etude comparée en droit d’auteur et copyright ». Blog du MBDE sur le droit de la propriete intellectuelle
• Kennedy, Randy. « Richard Prince lawsuit focuses on limits of appropriation ». NY Times, December 28, 2011