Cendrillon - Joël Pommerat

La pièce

Les lumières s’éteignent, un homme danse, une femme parle et le film commence. Pas d’erreur, nous sommes bien dans un théâtre et non dans une salle de cinéma. Tout commence par une projection. Pommerat nous embarque dans les souvenirs de Sandra, une très jeune fille dont la mère décède bien trop tôt. Un lit d’hôpital, un murmure que l’on peine à déchiffrer et une enfant qui préfèrerait jouer plutôt que de voir sa mère s’éteindre. Touchée en plein cœur, Sandra lui promet de ne jamais l’oublier, pas même une seule minute.

Des années plus tard, son père, se laissant porter au gré du vent, décide de refaire sa vie et emménage dans une maison de verre avec une femme et ses deux filles. Strass et paillettes rythment le quotidien de la petite famille. Difficile pour Sandra et son univers morne de trouver sa place. Cette très jeune fille pleine de caractère et à la langue bien pendue ne cesse d’agacer sa belle-mère. Les malheurs s’enchainent. Si dormir dans une cave ne suffisait pas, elle doit désormais assumer seule la charge des tâches ménagères de l’immense demeure. Jusqu’au jour où une fée pas comme les autres débarque dans sa vie en sortant du placard.

Le temps passe et n’épargne personne, pas même une fée de plusieurs centaines d’années qui enchaine les cigarettes et rate la plupart de ses tours de magie. La quête de la jeunesse éternelle est un thème récurrent dans cette pièce où la marâtre n’hésite pas à avoir recours à la chirurgie esthétique pour séduire un prince qui pourrait être son fils.

Ce prince au physique androgyne questionne. Enfant d’une mère coincée dans les transports en commun depuis dix ans en raison des grèves incessantes, il permet au spectateur de découvrir une autre facette du deuil. Si Sandra semble penser qu’elle mérite tous les malheurs qui lui arrivent, le jeune homme vit dans un déni permanent.

Toutefois, le texte de Pommerat n’autorise aucun filtre, les cœurs s’arrêtent de battre, les mamans meurent mais le tourbillon de la vie finit par emporter tous les maux. Le rythme dynamique de la pièce, composée de brèves scènes entrecoupées de noir total nous rappelle que le temps passe et n’attend pas. Alors des fêtes sont organisées, on danse sur du rock’n’roll et le rire s’invite là où ne l’attend pas car la vie c’est aussi cela, une grande part d’imprévu.

A travers son conte définitivement ancré dans la modernité, Pommerat raconte le deuil aux enfants et à ceux qui ne le sont plus tout à fait. Il touche les cœurs de chacun avec des mots crus mais qui ne cachent pas la réalité. 

 

 

Un peu de médiation

A l'issue de la représentation du 6 octobre 2022 au Théâtre de Suresnes Jean Vilar, un bord plateau est organisé. Après une standing ovation amplement méritée, la salle se vide mais de nombreux spectateurs restent pour assouvir leur soif de curiosité. On découvre alors les visages qui composent le public, des enfants, des parents, des jeunes adultes, des retraités, tous se rapprochent de la scène pour échanger avec la troupe. 

Ce soir-là le fondateur de la Compagnie Louis Brouillard n'est pas présent mais deux assistants, les porteurs de cette re-création de Cendrillon, mènent les échanges. En effet, la pièce a été jouée entre 2012 et 2015. Après une pause de quelques années, elle a été remise en scène avec une petite mise aux goûts du jour et un changement de comédienne pour le rôle de Sandra. 

Après quelques questions aux porteurs de ce projet, les comédiens rejoignent le public et se livrent sur les enjeux de cette re-création ainsi que sur l'adaptation à une nouvelle comédienne. Une trentaine de minutes passée en leur compagnie suffit à laisser un sourire sur les visages tant leur spontanéité et leur douceur touche.

 

Distribution

Alfredo Cañavate, le père de la très jeune fille

Léa Millet, la très jeune fille

Noémie Carcaud, la Fée, la sœur

Caroline Donnelly, la seconde sœur, le prince

Catherine Mestoussis, la belle-mère

Damien Ricau, le narrateur

Marcella Carrara, la voix du narrateur 

 

Joël Pommerat

Joël Pommerat est un auteur-metteur en scène ayant la particularité de ne mettre en scène que ses propres textes. Il a fondé la compagnie Louis Brouillard en 1990, après plusieurs années en tant que comédien au Théâtre de la Mascara dans l'Aisne. Soutenu depuis ses débuts par le Théâtre Brétigny et le Théâtre Paris-Villette, il a ensuite été artiste en résidence au Théâtre des Bouffes du Nord de 2007 à 2010 sur invitation de Peter Brook. Il a également été artiste associé au Théâtre National Bruxelles-Wallonie ainsi qu'à l'Odéon-Théâtre de l'Europe. Depuis 2014, il fait partie de l'association d'artistes de Nanterre-Amandiers. 

Il a reçu de nombreux prix pour ses œuvres, il obtient notamment à deux reprises le Molière de l'auteur francophone vivant et une fois le Grand prix du théâtre de l'Académie française.

 

 

Prochaines représentations

La Rochelle, La Coursive, du jeudi 20/10/2022 au samedi 22/10/2022

Châlons en Champagne, La Comète, du jeudi 17/11/2022 au vendredi 18/11/2022

Draguignan, Théâtre en Dracénie, du vendredi 10/03/2023 au samedi 11/03/2023

Gap, La Passerelle, du jeudi 16/03/2023 au vendredi 17/03/2023

Miramas, Théâtre La Colonne, le mercredi 05/04/2023

Mézières (Suisse), Théâtre du Jorat, du jeudi 13/04/2023 au vendredi 14/04/2023

Le Havre, Le Volcan, du jeudi 04/05/2023 au vendredi 05/05/2023

Antibes, Anthéa-Antipolis, du mercredi 10/05/2023 au dimanche 14/05/2023

Dunkerque, Le Bateau Feu, du mercredi 24/05/2023 au vendredi 26/05/2023

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