Portrait d'artiste : Kashink
*Kashink*
Qui est kashink ?
Kashink est une street-artiste activiste à l’univers très coloré, française et connue internationalement, elle a su s’imposer dans la scène du street art avec un style bien particulier.
Kashink, c’est une femme qui porte la moustache. Depuis maintenant 6 ans, elle choisit de se dessiner deux traits noirs d’eye-liner… Au-dessus des lèvres. En plus de questionner autour du malaise que peuvent provoquer ces deux traits qui ne posent pas de problème 5 cm plus hauts, Kashink choisi de porter ce maquillage, car il lui permet de se sentir elle-même, belle et entière.
A quoi ça ressemble les œuvres de Kashink ?
On reconnaît facilement ces œuvres grâce aux visages de ses personnages et à son utilisation de couleurs vives. Moustache, 2 paires d’yeux et personnages non-genrés voilà les créatures qui peuplent ses fresques.
Comment lui est venue l’envie de peindre dans les rues ? Pourquoi ce médium et pas un autre ?
Très jeunes Kashink ressent déjà de la colère face à la propagande publicitaire et culturelle qui prône une seule morphologie féminine et qui plus est, irréel car retouché. Cette colère face à ses normes imposées aux femmes, elle va s’en servir pour réfléchir à une nouvelle manière de représenter les corps, plus juste, moins contraignante et plus englobante. Cette apologie du corps parfait va la remettre beaucoup en question comme de nombreuses jeunes filles et la poussera à travailler autour de l’identité et à la richesse de la diversité à laquelle chacun participe en étant sois même. Cette volonté de montrer la réalité et une éducation stricte vont la pousser à enfreindre les règles en pratiquant le vandal une pratique (artistique) souvent non autorisée. Sa démarche est d’abord provocatrice. Elle est l’une des seules femmes dans un univers artistique très masculin. Les représentations de l’humain sont encore très genrées et le peu de femmes artistes présentes sur la scène du street art ont des styles, justement, très efféminés où les personnages féminins répondent aux clichés véhiculés par les médias. Elle choisit alors de peindre des personnages portant les attributs masculins, mais aussi féminin, rendant indiscernable leur genre.
C'est en peignant dans la rue qu'elle réalise qu’elle peut y faire passer des messages politiques en plus de proposer un nouvel horizon artistique pour les artistes femmes. La rue est un lieu que tout le monde peut fréquenter et permet à des personnes invisibilisées de s'exprimer. Pour Kashink, il est important que le street art reste politique et porteur de message.
Quelles sont ses inspirations ?
Tout d’abord, il y a le peintre Botéro. C’est en allant à une exposition du peintre avec ses parents, qu'elle voit pour la première fois des corps gros représentés sans tabou. Cet artiste l’inspirera pour s’autoriser à représenter des corps naturels, loin des représentations irréalistes des magazines.
Ensuite, il y a l’artiste performeur Leigh Bowery. Un styliste australien à l’origine du club londonien Tabou. Dans ce club, il faisait très régulièrement des spectacles avec des costumes déjantés et un maquillage complet du visage. Son utilisation du maquillage a inspiré Kashink pour la création de ses personnages. C’est aussi son exubérance sans filtre et sa manière d’assumer son excentricité qui lui a plu.
Eva&Adèle un couple d'artistes qui vit leur art continuellement, sans interruptions. Leurs styles, leurs tenues, leurs maquillages font partie intégrante de leur identité en tant qu’individu et pas seulement de leur personnage public d’artiste. Tous ces artistes vont permettre à Kashink de s’assumer pleinement, artistiquement parlant, mais aussi en tant qu’individu. Elle, qui ne portait sa moustache que durant ses prestations, va en gagnant en notoriété et en faisant de son art son métier, choisir de porter la moustache tous les jours.
Ses engagements en 3 œuvres
Un an avant la loi du mariage pour tous, Kashink s’est lancé pour défis de peindre plus de 200 gâteaux de mariage à travers le monde (Québec, Etats-Unis, France…). Pourquoi donc ? Car le gâteau de mariage est un symbole quasiuniversel, rapportant à un moment heureux de célébration et de partage. Cette œuvre du nom de 5O shades of cake prône et célèbres l’autorisation aux personnes de même sexe de se marier. Un sujet qui divise particulièrement en France et qui donnait lieu à de grandes manifestations contre la mise en place de cette loi à l’époque. Kashink s’est senti le devoir de porter un autre discours sur ce sujet. Une vision festive, colorée et acidulée. C’est notamment à l’occasion d’un festival d’artiste femmes à Los Angeles qu’elle peindra une immense fresque de ses gâteaux.
Kashink défend également régulièrement les droits de la femme dans ses œuvres. L’un des exemples les plus marquant et sa collaboration avec Amnesty internationale pour défendre les droits de la femme et notamment le droit à l’avortement. Sur cette fresque peinte à Paris, on reconnaît la Grande Odalisque d’Indre. Dans le tableau original, le peintre avait ajouté des vertèbres au modèle dans sa peinture, pour accentuer la courbe de son dos. Il avait également lissé le grain de peau pour le rendre immaculé. Kashink dans sa reprise du tableau renverse tous ces clichés de la femme parfaite et représente un personnage portant la moustache, au grain de peau irrégulier et aux formes charnues. Et pour rappeler le propos d’Amnisty Internationale le slogan « mon corps, mes droits », rappel au public la nécessité de laisser aux femmes le droit de choisir d’avorter ou non.
De manière générale, elle aborde les combats féministes en peignant régulièrement des fresques autour des droits de la femme, du consentement, du patriarcat.
Elle porte aussi un discours sur la diversité et un appel à s’informer sur notre histoire pour mieux la comprendre et ne pas répéter les mêmes erreurs. C’est notamment le cas avec la reprise d’un de ses personnages peint la première fois après le meurtre d’Adama Traore, qu’elle repeindra lors des manifestations Black Life Matters.
Kashink a commencé en peignant des personnages à l’identité plus fluide que ce que l’on a l’habitude de voir. Elle avait envie de montrer plus que ce que la société autorisait à montrer. Mais attention, on aurait tendance à ranger l’artiste dans une case « féministe queer » mais c’est justement ce genre de classification qu'elle essaie de casser ses cases dans lesquelles la société se sent toujours le besoin de ranger les gens.
L’artiste et son public
Enfin, l’artiste invite son public à s’essayer à son style. Elle reposte régulièrement sur son compte instagram des photos de personnes qui se sont maquillés à l’image de ses personnages.
Aussi, elle propose des projets de fresque participative avec de jeunes enfants d’école, qu’elle appelle les kashinkids !
Pour aller plus loin
Kashink ne se limite plus à l’art urbain. Depuis quelques années, elle s’est mise à la musique et fait des concerts en tant que DJ. Elle s’est également essayée à l’écriture. D’ici quelques mois un livre sortir dans lequel elle témoigne sur son expérience en tant que femme portant la moustache.
Enfin, Kashink a été invité à faire une conférence avec TED x sur le thème de « s’accomplir par la fluidité : un travail sur l’identité »
La question de la définition du genre et de ses représentations dans nos médias et une réflexion qui fait partie itinérante de Kashink dans son quotidien. Et cela ne cesse de se confirmer avec ses dernières conférences où elle n’hésite pas à prendre une large partie de son temps attribué à partager ses réflexions autour du genre et de l’identité.