Aux frontières du droit fondamental à la vie, les questions de l´avortement et de l´euthanasie dans le système international, européen et interne, par Mathilde Groazil
Le droit à la vie est le premier des droits individuels. Il occupe une place ontologique ; de ce droit dépend l´existence des autres droits fondamentaux. Sa protection est envisagée tant au niveau conventionnel international et européen qu’au niveau du droit constitutionnel interne. Traditionnellement ce droit fondamental se résume au droit qu’a un individu de voir sa vie protégée contre toute atteinte. A partir de cette conception classique il convient de s’interroger : le droit à la vie englobe-t-il le droit de mettre fin à sa propre vie ? L’être à naître est-il titulaire du droit à la vie ?
Le droit à la vie est le premier des droits individuels. Il occupe une place ontologique ; de ce droit dépend l´existence des autres droits fondamentaux. Sa protection est envisagée tant au niveau conventionnel international et européen qu’au niveau du droit constitutionnel interne. Traditionnellement ce droit fondamental se résume au droit qu’a un individu de voir sa vie protégée contre toute atteinte. A partir de cette conception classique il convient de s’interroger : le droit à la vie englobe-t-il le droit de mettre fin à sa propre vie ? L’être à naître est-il titulaire du droit à la vie ?
Droit à la vie Droits fondamentaux
Dans ‘Life's Dominion : an argument about abortion, euthanasia, and individual freedom’, Ronald Dworkin met en avant la similitude des problématiques liées à l’avortement et à l’euthanasie. Selon lui ces valeurs sont au centre de la vie de chacun et nul ne peut accepter l’opinion ou les ordres d’un tiers quant à la signification de ces pratiques. Pour l’auteur, la mort d’un individu en totale contradiction avec sa conception de la vie mais en adéquation avec les points de vues d’autres est une “forme de tyrannie dévastatrice et odieuse”. Dans la sphère internationale l’article 3 de la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH) énonce que “Tout individu a droit à la vie (...)”, de même le Pacte des droits civils et politiques de 1966 reconnaît ce droit dans son article 6§1. Au plan régional européen la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales (CEDH) reprend cette idée dans son article 2. Pour le juge européen, la vie est une “valeur prééminente” (Velikova c. Bulgarie, 2000, § 68) et une valeur ”fondamentale” des sociétés démocratiques (Ekinçi c. Turquie, 2002, §70). L’article 2 est qualifié d’article primordial (Demiray c. Turquie, 2000, §40) et dans sa jurisprudence Streletz, Kessler et Krenz c. Allemagne de 2001 la CEDH, au paragraphe 72, qualifie le droit à la vie “d’attribut inaliénable de la personne humaine” et de “valeur suprême dans l’échelle des droits de l’homme au plan international”. Pareillement, la Convention Américaine des droits de l’homme (article 4§1) et la Charte africaine (art 4) proclament ce droit. A l’échelle constitutionnelle, les premières déclarations de Droits ne reconnaissent pas explicitement le droit à la vie. La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ou encore la déclaration américaine de 1787 élèvent ce droit au rang de postulat. C’est dès la fin de la seconde guerre mondiale, et suite aux atrocités commises contre la dignité humaine, que le droit à la vie commence à être reconnu expressément par les Constitutions nationales. On observe au sein du constitutionnalisme interne contemporain une réaction des Etats proche de celle des “législateurs internationaux”. Si une protection a été mise en place au niveau universel, c’est suite aux abus commis contre le droit à la vie au plan interne. Le régime de protection des constitutions les plus récentes, Constitution espagnole de 1978 entre autres, a été établi pour les mêmes raisons. De manière générale le droit à la vie se définit comme l’interdiction de l’Etat ou d’un particulier de porter atteinte à la vie d’autrui. Mais au regard des pratiques actuelles, encore malheureusement controversées telles que l’euthanasie et l’avortement, il faut se poser la question du double caractère, positif et négatif de ce droit. Le droit à mourir est-il le négatif du droit à la vie ? Au regard des jurisprudences récentes, existe-t-il un caractère négatif attribuable à ce droit fondamental au niveau international, européen et constitutionnel ?
Quid de la protection de la vie avant la naissance : les bénéficiaires du droit à la vie, la question de l’interruption volontaire de grossesse. L’être à naître est-il bénéficiaire du droit à la vie ? Par conséquent par la pratique d’une interruption volontaire de grossesse (IVG), une femme porte-t-elle atteinte à la vie d’un enfant conçu mais non encore né ? Les textes internationaux n’offrent, en général, pas de définition très précise du droit à la vie. Comme l’illustre l’article 6§1 du pacte relatif aux droits civils et politiques (“Le droit à la vie est inhérent à la personne humaine. Ce droit doit être protégé par la loi. Nul ne peut être arbitrairement privé de la vie”) les instruments internationaux ne déterminent pas expressément le moment à partir duquel débute la protection de la vie. On observe qu’aucun organe international de défense des droits de l’homme n’a considéré le droit à la vie comme la protection de la vie des êtres à naître. Embryons humains et foetus sont donc pour le moment, et sauf exception, exclus de toute protection. Au regard des observations générales, des jurisprudences et des observations finales des divers comités des Nations-Unies on constate qu’un refus d’avortement peut constituer dans certains cas une violation des droits de l’homme (entre autres, grossesse causée par un viol ou par un inceste). De manière générale, les organes conventionnellement institués relatifs aux droits de l’homme laissent une large marge d’appréciation aux États. Notons qu’au niveau régional, le seul instrument à fournir explicitement un droit à l’avortement dans certains cas est l’optionnel Protocole sur les droits des femmes en Afrique (art 14§2.c.) Au niveau interaméricain, la Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIADH) dans le fameux Baby boy case a établi que l’article 4 de la Convention américaine des droits de l’homme, qui protège la vie “en général, dès le moment de la conception “ n’exclut pas la fourniture publique d’un accès sûr et légal à l’avortement (CIADH Baby Boy c. USA, commission 6 mars 1981). En cas de refus d’avortement légal, la Commission interaméricaine des droits de l’homme a appelé les États membres à adopter des mesures pour répondre aux violations résultant du droit à la vie, entre autres (exemple, CIADH 2002, Paulina Ramirez c. Mexico). Si la question du droit à la vie est à l’heure actuelle encore peu développée jurisprudentiellement parlant par le droit international, le droit européen est lui plus en pointe. Ici, les jurisprudences foisonnent mais néanmoins les juges européens aiment à laisser un flou concernant les questions liées à l’IVG. Dans l’affaire Open door et Dublin Well Woman c. Irlande, de janvier 1992, la Cour au paragraphe 66 se refuse d’une part à déterminer “si le droit à la vie, reconnu par l’article 2, vaut également pour le fœtus” et d’autre part à établir “si la Convention garantit un droit à l’avortement”. Avec la jurisprudence Boso c. Italie du 5 septembre 2002 la CEDH énonce qu’il existe certaines circonstances dans lesquelles l’être à naître pourrait être considéré comme bénéficiaire de droits protégés par l’article 2 de la Convention. Comme à l’échelle universelle, pour les juges européens il appartient à l’Etat d’établir “un juste équilibre entre la nécessité d’assurer la protection du fœtus et les intérêts de la femme (...)”. Aussi, faut-il en conclure que, désormais, selon la marge d’appréciation des Etats et le contrôle postérieur de proportionnalité de la Cour, le fœtus pourrait relever de l’article 2 remettant ainsi en question un droit à l’IVG ? Cette rapide déduction ne peut-être établie puisque demeure malgré tout en filigrane une ligne conductrice de la Cour qui reflète son absence de volonté de remise en cause du droit à l’IVG. Si la CEDH ne s’est jamais prononcée en faveur de la législation d’un Etat sur l’avortement, elle souligne par le biais de différentes jurisprudences : Paton c. Royaume-Uni de 1980, en 1992 R.H. c Norvège, ou encore VO c. France de 2002 que l’article 2 sur le droit à la vie ne protège pas la vie du fœtus mais bien celle de la femme enceinte. Malgré cela, dans la jurisprudence VO c. France du 8 juillet 2004, elle insiste sur le fait que le point de départ de la vie relève de l’appréciation des Etats tout en mettant en avant l’absence actuelle d’un consensus étatique européen sur la définition juridique (et scientifique) du point de départ de la vie. Notons que dans l’affaire de décembre 2004 Makaratzis c. Grèce, au paragraphe 52, la Cour déduit de l’article 2 une protection de la vie, mais aussi une protection des « intérêts que le droit à la vie est censé protéger», à savoir un droit à naître ? En droit interne, l’interruption volontaire de grossesse est dans un premier temps sanctionnée pénalement. En Allemagne, aux Etats-Unis ou en France, il faut attendre les années 70 pour la mise en marche d’un processus de dépénalisation. Il existe deux systèmes en droit constitutionnel comparé la solution américaine des délais et la solution allemande de la pénalisation. Le point de vue américain est similaire à la position française. Selon la Cour Suprême des Etats-Unis, comme elle l’exprime dans son arrêt Roe v. Wade de 1973, il est un principe selon lequel le droit fondamental à l’avortement dont bénéficie une femme dérive de son droit à l’intimité (“privacy”). La décision de mettre au monde un enfant est d’une telle importance que l’Etat ne peut s’immiscer dans ce choix. L’Etat ne peut s’opposer à une IVG. Néanmoins, ce principe connaît une limite temporelle. L’IVG ne pourra avoir lieu que dans la limite de quinze semaines à compter de la fécondation. A cette limite doit-être apposée une exception. Passé ce délai de quinze semaines, l’IVG est quand même admise aux Etats-Unis quand des raisons scientifiques justifient du danger de la grossesse pour la vie ou la santé de la femme. En France, on observe une situation parallèle. La pratique est légale mais fonctionne dans le respect des seuils. La loi du 17 janvier 1975 dite loi Veil dépénalise l’IVG. Le Conseil constitutionnel (CC) dans sa décision IVG de 1975 affirme que cette loi qui organise et réglemente l’IVG n’est pas contraire à la Constitution française. Par la suite, se succéderont les lois Rondy de 1982 ou encore Neiertz de 1993. En 2001, la loi du 4 juillet permet une pratique de l’IVG jusque 12 semaines de grossesse et non plus jusque 10 semaines. De nouveau le CC se prononce en faveur de la loi (décision du Conseil d’Etat du 27 juin 2001). En conclusion, la CEDH laissant une totale marge d’appréciation aux Etats en la matière, il paraît difficile de conclure à une influence du droit régional européen sur la position française. En réalité, en France, la marge de manœuvre s’est limitée au choix d’un modèle considéré comme meilleur au regard de conceptions éthiques françaises : le système des délais prévalant sur celui de la pénalisation. Des pays voisins limitrophes, la Belgique, les Pays-Bas ou la Grande-Bretagne ont proposé une législation sur l’IVG de même type que celle adoptée par la France. On peut donc dire que dans le choix du meilleur des modèles, notre législation inspire certains pays (cas de la Belgique et des Pays-Bas) autant qu’elle s’inspire de la position adoptée par d’autres (cas du Royaume-Uni). Si les approches similaires françaises et étasuniennes s’opposent à la conception partagée par l’Allemagne et l’Espagne c’est principalement pour des raisons historiques. Espagne et Allemagne ayant connu des régimes autoritaires, ces Etats choisissent d’entendre plus largement le concept de vie. Le Tribunal Suprême allemand pose pour principe le caractère délictuel de l’avortement. En cas d’IVG la responsabilité pénale de la femme est engagée pour délit contre le bien juridique qu’est le droit à la vie. Ce principe quelque peu radical connaît néanmoins un régime d’exception. En cas de grossesse mettant en péril ou en danger la vie physique ou mentale de la mère, ou encore dès lors que la grossesse est le fait d’un viol ou enfin quand il est attesté scientifiquement que le fœtus est porteur d’importantes malformations ou de déficiences physiques ou psychiques, alors, l’IVG pourra être pratiquée. La solution jumelle espagnole envisage aussi ces exceptions (Tribunal Constitutionnel, arrêt 53/85 de 1985). En Espagne l’IVG est donc aussi un délit pénal. Bien que l’être à naître ne soit pas un plein bénéficiaire de droits fondamentaux il est considéré que la vie humaine en formation mérite protection. Mais comme en Allemagne ce principe connaît des limites. Il faut se prévaloir d’une raison constitutionnelle pour “sacrifier impunément les expectatives de vie” de ce bien constitutionnel juridiquement protégé qu’est l’être conçu mais non encore né et donc légitimer l’avortement. En conclusion, on note une large marge de manœuvre offerte aux Etats par les textes internationaux universels et régionaux et particulièrement par les textes européens. Par conséquent, l’uniformisation au niveau européen reste bien limitée dans la mesure où deux visions différentes s’opposent à cause du caractère sensible du sujet. La CEDH laisse aux Etats le soin de choisir leur propre modèle en fonction de leurs considérations éthiques. On doute donc d’un futur possible consensus sur de telles questions. Quid de la protection de la vie après la naissance : la question d’une légitimité des bénéficiaires du droit à la vie quant à un droit à mourir, ou la problématique de l’euthanasie Le concept de Droit à la vie englobe t-il en son sein le droit à la mort ? Un individu peut-il mettre fin à sa propre vie ? Un individu peut-il solliciter l’aide de l’Etat pour mourir ? Comme énoncé précédemment le droit international ne propose pas en général de définition aiguisée du droit à la vie. Il convient de noter que l’euthanasie est une préoccupation essentiellement européenne. Cette pratique est en effet majoritairement interdite sur les autres continents. Quant à l’actuelle jurisprudence européenne, elle montre une complète absence de volonté des juges de prendre position. Si la Cour affirme irrémédiablement l’interdiction de l’euthanasie active, elle ne se prononce qu’à demi-mots sur le sujet de l’euthanasie passive. Après l’affaire Ramón Sampedro de 1995 où un tétraplégique espagnol se prévalant devant l’ex Commission européenne des droits de l’homme d’un droit à la vie volontairement choisie par son titulaire au regard d’une ribambelle d’articles de la Convention européenne des droits de l’homme et voyant sa demande rejetée pour absence d’épuisement des voies de recours interne ; c’est avec l’affaire Pretty de 2002 (CEDH, 29 avril 2002, Dame Pretty c. Royaume-Uni) que la Cour se prononce enfin sur la controversée question de l’euthanasie active. Ici, la CEDH est appelée à statuer sur un cas de suicide assisté. Diane Pretty, paralysée et victime d’une maladie dégénérative incurable mais en totale possession de ses capacités intellectuelles allègue devant la CEDH une violation des droits garantit aux articles 2, 3, 8 9 et 14 de la Convention par le “Director of public prosecutions” pour avoir refusé d’attribuer au mari de celle-ci une immunité s’il l’aidait à se donner la mort. Pour la CEDH, le refus des tribunaux anglais d’accorder cette protection ne viole pas les droits garantis par la Convention. La CEDH interdit le suicide assisté ou euthanasie active que ce soit de la main d’un tiers ou avec l’assistance d’une autorité publique. Très récemment, avec le cas d’Elena Englaro la Cour semble, à demi-mots, mollement, permettre l’euthanasie passive. En 1992 la jeune femme est victime d’un accident et sombre dans le coma. Rapidement ses conditions de santé évoluent vers un état végétatif. Dès 1999, sa famille entame des procédures judiciaires internes pour interrompre l’alimentation et l’hydratation artificielles de sa fille. Au terme d’une longue procédure, en juin 2008, le père-tuteur obtient des juridictions italiennes l’autorisation d’interrompre l’alimentation et l’hydratation artificielle de sa fille en se fondant d’une part sur son état végétatif et d’autre part sur une demande d’autorisation expresse, fondée sur des preuves claires, concordantes et convaincantes, de la volonté de la patiente telles qu’elle ressortait de l’analyse de son style de vie, des ses convictions, et de sa façon de concevoir la dignité de la personne avant son état d’inconscience. Dès décembre, les opposants à l’euthanasie saisissent la Cour européenne (CEDH, Ada Rossi et autres c. Italie, 16 décembre 2008) estimant que la décision italienne porterait atteinte à la situation des personnes se trouvant dans un tel état. Les demandeurs se prévalent, notamment, d’une violation du droit à la vie des personnes en état végétatif (article 2). La Cour s´arrête au stade des conditions de recevabilité et déclare la requête irrecevable. La question de l´euthanasie passive reste donc entière : la CEDH autorise-t-elle implicitement cette pratique ? Ou bien souligne-t-elle qu´elle n´est ni interdite par la Convention ni garantie par cette dernière ? De nouveau, comme pour l’IVG, le juge européen laisse au Etats une totale marge d’appréciation. Dans la sphère du droit interne et plus précisément du droit constitutionnel, à côté de ponctuelles positions progressistes, l’attitude des pouvoirs publics et en particulier des différents législateurs européens est tout aussi ambiguë qu’au niveau européen. La Belgique et la Hollande sont deux des rares pays osant affronter cette problématique pratique en offrant une régulation, en s’opposant ainsi à une position traditionnelle et conservatrice défendue par la majorité des pays européens dont l’Espagne et la France. En Espagne il n’existe pas de lois concernant l’euthanasie. L’unique régulation existante se limite à l’article 143§4 du nouveau Code Pénal de 1995. L’euthanasie active directe, c’est à dire provoquer volontairement la mort d’un patient, ainsi que l’euthanasie active indirecte, ou les interventions des médecins pour mettre fin aux souffrances du patient qui à terme provoqueront un décès anticipé de celui-ci, sont prohibées sur la péninsule ibérique. L’euthanasie passive est en revanche admise. Les médecins peuvent retirer tous les moyens artificiels ayant été mis en place pour prolonger la vie du patient. Dans un arrêt de 1990 (120/1990) le Tribunal constitutionnel espagnol (TC) défend une conception positive du droit à la vie (article 15 de la Constitution espagnole). Selon ce tribunal il n’existe pas un droit constitutionnel qui serait un droit à la mort. Par extension on en déduit que l’Espagne ne reconnaît pas, et donc interdit, l’euthanasie. En France la position juridique adoptée est similaire. Une loi du 22 avril 2005 interdit l’euthanasie active mais permet l’euthanasie passive (procédures de limitation ou d’arrêt des soins). Si la majorité des pays européens ne conçoivent pas de fondements constitutionnels qui permettraient de réguler juridiquement un droit à l´euthanasie, dans les systèmes Hollandais et Belges les lois de 2002 dépénalisent certaines modalités de l’euthanasie. La Hollande propose une définition plus restrictive de cette pratique que celle envisagée par la Belgique. En Hollande l’euthanasie n’est étrangement pas définie dans la loi Korthals/Borst 26691 du 1 avril 2002 qui régule cette pratique. En s’éloignant un peu de la pénalisation générale européenne, cette loi embrasse légèrement l’idée d’un droit subjectif individuel à l’euthanasie. Si elle peut être pratiquée, c’est seulement dans certaines situations précises et dans le respect de strictes conditions médicales ou administratives. Ainsi, l’euthanasie en Hollande ne peut-être pratiquée que par un médecin en présence de la manifestation de volonté expresse du patient ou testament de vie ( article 20 de la loi d’avril 2002.) La loi n’exige pas que le patient soit en phase terminale mais sa situation doit lui être insupportable et sans espérance d’amélioration. En Belgique c’est la loi du 28 mai 2002 qui régule cette institution. Cette loi, contrairement à la loi Hollandaise, propose une définition de l’euthanasie (article 2) qui peut être pratiquée non seulement par un médecin mais par toute personne. En ce sens, la définition Belge de l’euthanasie est une définition plus large que celle proposée aux Pays-Bas. De l’article 3§1 de la loi, on peut déduire que l’euthanasie ne pourra être pratiquée en Belgique, et contrairement à la Hollande, que si le patient est en phase terminale ou dans une situation irréversible et donc en phase de déboucher sur un décès prochain. Ici, la position Hollandaise est plus favorable au patient. Les pays tombent tous deux d’accord sur la nécessité que le patient sollicite lui-même une mort digne. Au cas où le patient serait inconscient et ce de manière irréversible, les médecins seront aptes à intervenir en la seule présence d’un testament de vie (article 4 de la loi de mai 2002)
En conclusion, il faut se demander si ces lois novatrices ne devraient pas êtres prises comme modèle pour une « future » légalisation de la pratique au niveau européen. En effet, les modèles Hollandais et Belges sont une véritable avancée face à la ligne de front prohibitionniste que constitue la majorité des pays. Ces premiers tâtonnements progressistes pour se rapprocher d’un régime général de l’euthanasie sont fortement inspirés du principe d’autonomie de la volonté propre à l’Etat de droit. Néanmoins, ces modèles restent à améliorer, la dépénalisation offerte n’étant encore que partielle. De manière générale, au plan européen, on regrette que les juges ne soient pas prêts ne serait-ce qu’à se prononcer clairement sur la question de l’euthanasie passive. Probablement, encore une fois, en raison du caractère bien trop sensible du sujet. Par conséquent, révolutionner la question de l’euthanasie active est aujourd’hui inenvisageable.