Le cas Dj Fabo : un appel à la reconnaissance du testament biologique en Italie
Le cas Dj Fabo : un appel à la reconnaissance du testament biologique en Italie
L’article 2 de la constitution italienne reconnait et garantie les droits inviolables de l’homme, y sont compris le droit à la vie et à l’intégrité physique d’après la décision du conseil constitutionnel n°223/1996. Cependant les avancées dans le domaine de la médecine et de la biologie engendrent de nouveaux cas de figure ainsi que de nouvelles questions d’ordre éthique et juridique. Les états sont amenés à encadrer ou interdire de nouveaux progrès tel que les pratiques eugéniques.
Néanmoins le respect des libertés fondamentales, des droits inviolables de l’homme sont une condition indispensable aux limites des nouvelles pratiques médicales. Les gouvernements démocratiques se doivent de trouver un équilibre entre les différents enjeux. L’avortement est un exemple : une balance entre un droit à la vie et un droit au respect de la vie privée et familiale1 .
La convention européenne des droits de l’homme, mais aussi la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne énumèrent et contrôlent la bonne application des droits fondamentaux dont le droit à la vie et à l’intégrité de la personne. Pourtant certaines matières, tel que la fin de vie, demeurent des sujets à discussion.
Au lendemain du suicide assisté en Suisse d’une célébrité Italienne, on peut se demander quel est le positionnement de l’Italie à ce sujet.
Fabiano Antoniani aussi connu sous le nom de Dj Fabo a volontairement trouvé la mort à 39 ans en Suisse. Du jour au lendemain, la vie de Dj Fabo a été bouleversé à la suite d’un accident de la route le 13 Juin 2014. Il est devenu aveugle et tétraplégique, bloqué au lit, le garçon « vif et un peu rebelle » a vu partir en fumée sa vie de courtier et d’assureur, mais aussi sa plus grande passion, la musique. L’association Luca Coscioni lui a permis de se rendre en Suisse pour procéder au suicide assisté. En Italie ont été rapporté en trois ans 12877 cas de suicide dont 7372 proviennent d’individus atteints de graves maladies. Le chef de l’Etat, sollicité et interpellé de nombreuses fois par l’association Luca Coscioni, a appelé le parlement à avoir « une discussion sereine et approfondie sur la fin de vie » en 2014. Le débat stagnant, le cas de Dj Fabo, très médiatisé, a permis de relancer la discussion sensible entre des parlementaires divisés.
Une proposition de loi vient d’être présentée devant le parlement concernant le testament biologique aussi appelé le consentement éclairé et la directive de volonté anticipée relative aux traitements médicaux. Les forces politiques en commission parlementaire ont pendant trois ans fait subir à ces mesures de nombreux reculs mais aussi de nombreuses avancées. Il va falloir prendre en compte les probables divers amendements, obstructions et arrangements officieux afin d’arriver au terme de la discussion parlementaire.
Cette proposition de loi prévoit quatre grandes mesures : La première est l’application en Italie des directives anticipées (DAT). Ces directives s’appliquent lorsqu’un individu en fin de vie n’est plus en mesure d’exprimer sa volonté. Elles permettent au médecin de connaitre les souhaits personnelles du patient : une possible limite ou arrêt des traitements. En effet, tout individu majeur et capable peut exprimer à travers les DAT ses propres convictions et préférences en matières de soins médicaux en laissant par écrit « le consentement ou le refus de traitements thérapeutiques et de soins médicaux » (est pris en compte l’alimentation et l’hydratation artificielle).
De surcroit, il est prévu la nomination d’une personne de confiance qui parlera au nom du patient avec les médecins. Les directives sont contraignantes pour le médecin, néanmoins, il peut les modifier avec l’accord de la personne de confiance en cas de nouvelles thérapies « permettant la possibilité d’une amélioration des conditions de vie » imprévisibles au moment de l’élaboration des directives.
La deuxième mesure concerne le consentement éclairé. Celle-ci inclut les diagnostiques, pronostiques, bénéfices et risques thérapeutiques pour lesquels « Toute personne a le droit de connaitre ses propres conditions de santé et d’être informé de manière complète, compréhensible et actualisé ». Par la suite le patient a le droit de refuser, entièrement ou en partie, quelconques décisions médicales et peut révoquer à n’importe quel moment le consentement initialement donné.
La troisième touche les mineurs et incapables pour lesquels les mêmes principes s’appliquent en revanche ce sont les parents, les représentants légaux ou tuteurs qui donnent leur consentement éclairé.
La dernière mesure encadre la procédure de formation des directives anticipées. Le « testament biologique » a force de loi lorsqu’il se fait par écrit ou par vidéo et déposé à la mairie de la résidence principale ou devant un notaire.
L’intervention du législateur concernant le testament biologique s’inscrit dans les avancées jurisprudentielles du Conseil constitutionnel Italien.
En effet la décision du conseil n°262 du 14 décembre 2016 déclare inconstitutionnelle les deux lois régionale de Frioul-Vénétie Julienne : la loi n°4 du 13 Mars 2015 « Institution du registre régional pour les libres directives anticipées de soins médicaux et dispositions pour favoriser la collecte des dons d’organes et de tissus » et la loi n°16 du 10 juillet 2015 qui modifie cette dernière. Les deux dispositions ont été attaqué par le gouvernement soulevant la violation des articles 33 et 1174 de la constitution. Selon le requérant la norme attaquée outrepasse les limites du pouvoir législatif régional.
En effet la compétence législative étatique a un domaine d’exclusivité tel que les libertés fondamentales dont le droit à la protection de la santé5 . De plus les normes attaquées sont contraires au principe d’égalité des droits fondamentaux sur le territoire national.
La région, a son tour, a rappelé qu’il était nécessaire d’intervenir là où se trouve un vide juridique tout en minimisant l’aspect innovant et réformateur des lois régionales.
Le conseil constitutionnel a déclaré inconstitutionnel les normes rappelant l’article 117 de la constitution qui encadre le pouvoir législatif régional. Le conseil avait déjà affronté la question du consentement éclairé dans la décision n°253 de 2009 concernant une loi de la province autonome du Trente et dans la décision n°282 de 2008 dans laquelle les juges ont précisé le domaine du droit à la protection à la santé tout en censurant encore une loi régionale.
Le conseil constitutionnel rappelle dans sa décision du 14 décembre 2016 les limites et la sphère du pouvoir législatif étatique. Néanmoins il reconnait par la même occasion que ces lois censurées impliquent une nécessaire réglementation : la norme relative à la fin de vie des patients a une incidence sur des aspects essentiels de l’identité et de l’intégrité de la personne.
En effet, le testament biologique fait référence à l’article 32 de la constitution Italienne : celui-ci dispose que le droit à la santé est un droit fondamental protégeant l’individu mais aussi les intérêts collectifs. Toute loi concernant ce droit fondamental est d’ordre étatique. Mais en aucun cas la loi peut violer les limites imposées par le droit au respect de la personne.
En outre, l’Italie a ratifié la convention européenne des droits de l’homme dans laquelle est prévu à l’article 2 le droit à la vie. Cependant la cour européenne des droits de l’homme laisse une marge d’appréciation aux états membres comme elle le précise dans la décision Lambert contre France le 5 juin 2015.
Les requérants, parents d’une victime d’un accident de la circulation en 2008, y attaquent la décision du 24 juin 2014 rendue par le Conseil d’Etat. Ce dernier jugea légale l’initiative prise par le médecin de la victime de mettre fin à son alimentation et hydratation artificielle. Les requérants considèrent que cet acte est contraire à l’article 2 de la Convention européenne des droits de l’homme. La Cour européenne a conclu à la non violation de l’article 2 de la Convention. En effet, elle contaste qu’il n’existe pas de consensus entres les Etats membres en ce qu’il concerne l’arrêt d’un traitement thérapeutique. Selon la grande chambre, dans le domaine de fin de vie il y a lieu d’accorder une marge d’appréciation aux Etats. La présente affaire soulève des questions médicales, juridiques et éthiques de la plus grande complexité. La Cour, pleinement consciente de ces problèmes, rappelle que dans les circonstances en l’espèce, c’est en premier lieu aux autorités interne qu’il appartient de vérifier la conformité de la décision d’arrêt des traitements au regard du droit interne et de la Convention.
De plus la charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne, elle aussi, impose le droit à la vie (article 2) mais aussi le respect de la dignité humaine (article 1), le droit à l’intégrité de la personne (article 3) et l’interdiction de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (article 4).
De surcroit, la convention Oviedo reprend les principes développés par la Convention européenne des Droits de l’Homme dans le domaine de la biologie et de la médecine.
Ce texte est une Convention cadre visant à protéger la dignité et l’identité de tous les êtres humains et à garantir à toute personne, sans discrimination, le respect de son intégrité et de ses autres droits et libertés fondamentales à l’égard de l’application de la biologie et de la médecine. Elle établit les principes fondamentaux applicables à la pratique médicale quotidienne et elle est considérée comme telle dans le Traité européen qui encadre les droits des patients.
L’Italie a signé cette convention en avril 1997, 20 ans plus tard elle ne l’a toujours pas ratifié.
L’Italie est un des seuls pays européens à ne s’être toujours pas doté d’une loi sur le testament biologique. Quand on parle de « fin de vie », la Suisse est tout de suite invoquée mais ce pays transalpin n’est pas le seul à posséder une réglementation en la matière. En Angleterre les droits des patients sont régulés par « Mental Capacity Act » depuis 2005. En Allemagne la loi prévoit les directives anticipées mais aussi en Espagne, au Portugal, en France, en Hongrie, en république Tchèque et dans les pays scandinaves . Puis, il y a les Pays-Bas, la Belgique, le Luxembourg où sous certaines conditions la loi permet le recours à l’eutanasie. En dehors de l’Europe, aux Etats Unis, au Canada, en Australie ils existent des lois qui encadrent le testament biologique depuis 1998.
1Art 8 de la convention Européenne des droits de l’Homme
2Donnée Istat
3 E` compito della Repubblica rimuovere gli ostacoli di ordine economico e sociale, che, limitando di fatto la libertà e l'eguaglianza dei cittadini, impediscono il pieno sviluppo della persona umana e l'effettiva partecipazione di tutti i lavoratori all'organizzazione politica, economica e sociale del Paese.
4 La potestà legislativa è esercitata dallo Stato [70 e segg.] e dalle Regioni nel rispetto della Costituzione, nonchè dei vincoli derivanti dall'ordinamento comunitario e dagli obblighi internazionali.
Lo Stato ha legislazione esclusiva nelle seguenti materie: ...
5 Art. 32 Constitution : La Repubblica tutela la salute come fondamentale diritto dell'individuo e interesse della collettività, e garantisce cure gratuite agli indigenti.
Nessuno può essere obbligato a un determinato trattamento sanitario se non per disposizione di legge. La legge non può in nessun caso violare i limiti imposti dal rispetto della persona umana.
Margaux Romano
http://www.meteoweb.eu/2017/03/biotestamento-ecco-cosa-prevede-la-legge-...
camera/869990/#rEfllR51GVuZfbbx.99
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