La grève
La grève
Longtemps considérée comme un simple phénomène de violence, la grève est devenue, dans les sociétés démocratiques évoluées, une liberté collective nécessaire ou encore une modalité légitime de défense des intérêts professionnels, faisant contrepoids au pouvoir de la direction. Mais d’un pays à l’autre, les systèmes juridiques s’opposent sur certains points.[1]
Ainsi à l’étranger, les français ont la réputation de très souvent faire grève tandis que les allemands feraient partie des moins grévistes en Europe. On peut se demander si cela relève du cliché ou de la réalité, et si c’était vrai il serait intéressant de se pencher sur les raisons qui peuvent expliquer une telle différence dans la «culture de la grève ».
En 2008, plus de 1,4 million de jours de travail ont été perdus pour cause de grèves en France. Les chiffres bruts (nombre de grévistes multiplié par le nombre de jours de grèves) sont conséquents. Entre 2005 et 2008, la France a compté en moyenne 132 jours de travail perdus par an et par 1000 employés, selon les chiffres de l’EIRO (observatoire européen des relations au travail) alors que l’Allemagne n’en comptait même pas la moitié, la grève est donc plus courante parmi les travailleurs français que parmi leurs homologues allemands.
La grève est une liberté conquise qui s’est d’abord inscrite dans l’histoire des luttes sociales. En France, délit pénal au départ, la participation à une grève est restée longtemps une faute civile justifiant la rupture du contrat de travail, en dépit de l’abolition du délit de coalition par la loi Emile Olivier du 25 mai 1864, auquel sera substitué le délit d’atteinte à la liberté du travail. Elle est devenue une liberté publique inscrite dans le préambule de la Constitution de 1946.[2] L’Allemagne obtient le droit de grève et de syndicalisation dans les années 1860, et ce n’est vraiment que dans les années 1890 que l’Allemagne assiste à une montée en puissance des syndicats.
En droit français, la grève est une cessation collective et concertée du travail en vue d’appuyer des revendications professionnelles. En droit allemand la définition est quasiment la même car la grève est une cessation du travail par un nombre important de salariés, et la cessation est faite collectivement et selon un plan dans le but d’atteindre un certain objectif.[3]
Mais si la définition de la grève est sensiblement la même en France comme en Allemagne, les conditions d’exercice ne sont pas les mêmes et cela est dû à des conceptions divergentes.
Le droit français s’écarte de la conception dominante dans les pays à forte tradition syndicale et négociatrice comme l’Allemagne, sur deux points essentiels: alors que, pour ces pays le droit de grève est un droit collectif ou organique, la « grève sauvage » étant alors prohibée, en France la grève peut être décidée en toute opportunité par les salariés, elle n’est pas « l’arme ultime ».[4]
Pour comprendre le phénomène de la grève en droit français et en droit allemand il est important de déterminer qui est titulaire de ce droit, quelles conditions doivent être remplies pour son exercice, à quel moment et dans quel but ce droit peut être exercé.
Pour répondre à ces questions il convient d’étudier les éléments constitutifs du droit de grève en s’intéressant à la définition même de la grève, c’est-à-dire d’abord à la cessation du travail (I) et ensuite à l’existence de revendications (II).
I. La cessation collective et concertée du travail
Pour qu’un mouvement puisse être qualifié de grève il faut tout d’abord qu’il y ait un arrêt total du travail (A) et ensuite celui-ci doit être collectif et concerté (B).
A/ La complète cessation du travail
La cessation du travail pour fait de grève engendre en France comme en Allemagne, le fait que le gréviste doive normalement retrouver son emploi: le contrat de travail n’est que suspendu. Pendant cette période de suspension, le salarié est dispensé de son obligation de fournir une prestation de travail et en contrepartie, il perd son droit à rémunération pour cette période.[5] En France comme en Allemagne, pour qu’il y ait grève il faut qu’il y une cessation complète dans les prestations de travail. [6]
Pour la Cour de cassation « en l’absence de tout texte légal ou réglementaire précisant les formes que doivent revêtir les arrêts de travail pour constituer une grève », telle modalité de grève « ne peut être considérée en principe comme illicite ».[7] Mais cela dit, elle invite les juges du fond à disqualifier certaines formes d’actions, en soulignant que « le droit de grève permet au salarié de suspendre sans le rompre son contrat de travail, mais ne l’autorise pas, sous couvert de ce droit à exécuter son travail dans des conditions autres que celles prévues par son contrat ou pratiquées dans la profession ».[8]
La formule s’applique à la « grève perlée » qui n’est pas une grève faute de se manifester par un arrêt pur et simple de travail mais plutôt par un travail exécuté au ralenti ou dans des conditions volontairement défectueuses.[9]
A l’inverse, les grèves tournantes hors service public qui affectent un atelier à la suite d’un autre, les « grèves bouchons ou thromboses » sont possibles, quels que soient leur durée ou le nombre de participants. Ces mouvements, tels les débrayages répétés de courte durée, sont d’une grande efficacité. Ils sont admis, à moins qu’ils entraînent une désorganisation de l’entreprise, en ce cas le conflit dégénère en abus insusceptible de protection.[10]
Pendant longtemps la Cour de cassation a estimé que la grève devenait abusive si elle entraînait une désorganisation de la production ou de l'entreprise traduisant une intention des salariés de nuire à la situation économique de l'entreprise.
Comment alors le juge peut-il faire sérieusement une distinction entre la nuisance inhérente au droit de grève lui-même et la nuisance intentionnelle et anormale?
Dans un arrêt du 30 mai 1989, la Cour de cassation se fait plus exigeante sur les circonstances pouvant rendre la grève abusive. La Chambre sociale établit une distinction selon que les arrêts de travail répétés et de courte de durée ont entrainé simplement une désorganisation de la production (conséquence naturelle de la grève) ou bien une désorganisation de l'entreprise elle-même (conséquence anormale).
En Allemagne il y la « faire Kampfführung » ce qui signifie que la grève ne doit également pas être un prétexte pour mener des actions de revendications violentes. Là bas, une désorganisation de l’entreprise est aussi un mouvement illicite appelé « Rechtswidriger Streik ».
Le droit français et le droit allemand sont donc concordants sur la nécessité de la cessation du travail pour qualifier un mouvement de grève, nous verrons maintenant que sur l’aspect collectif et plus particulièrement concernant les titulaires du droit de grève, les divergences sont majeures.
B/ L’aspect collectif de la cessation du travail
Pour comprendre l’aspect collectif de la grève en France comme en Allemagne il faut s’intéresser aux sources du droit de grève et à leurs titulaires.
Dans la loi fondamentale allemande, le conflit social n’est mentionné que dans l’art. 9 III et le droit de grève n’est pas mentionné explicitement mais il bénéficie d’une protection constitutionnelle indirecte car l’art. 9 III protège les coalitions et en particulier leur domaine d’action auquel appartient la conclusion de conventions collectives.[11]
Le droit de grève étant nécessaire pour l’autonomie des conventions collectives, il est garanti par l’art. 9 III de la loi fondamentale allemande.[12]
En France la grève est une liberté à valeur constitutionnelle aussi, mais le préambule de la Constitution de 1946 ajoute qu’elle s’exerce « dans le cadre des lois qui la réglementent ».[13] Les deux systèmes offrent donc tous deux une protection constitutionnelle du droit de grève.
Mais quand la Constitution parle de droit de grève, on peut se demander s’il s’agit d’un droit collectif dont le titulaire serait le syndicat ou une autre organisation représentant les travailleurs. C’est la conception dite organique, et c’est le cas en Allemagne.
En France les droits même économiques et sociaux sont des droits de l’individu, fussent-ils exercés en commun: « tout salarié a un droit personnel à la grève » confirme la Cour de cassation, et « une convention collective ne peut avoir pour effet de limiter ou règlementer l’exercice pour les salariés du droit de grève constitutionnellement reconnu ». Ce qui fait du droit de grève « à la française » l’archétype du droit individuel d’exercice collectif.[14]
Le droit français de grève est donc un droit individuel, mais il ne peut s’exercer que de façon collective et concertée à moins que l’entreprise ne se réduise à un seul salarié.
Il est acquis qu’une grève peut être le fait d’une minorité. Après une série de décisions qui semblaient contradictoires, la Cour de cassation a posé en principe qu’ « un arrêt de travail ne perd pas le caractère d’une grève par le seul fait qu’il n’a pas été observé par la majorité du personnel ».[15] En France, le droit de grève est un droit dont la mise en œuvre n'est subordonnée ni à un référendum auprès des salariés ni à un quelconque mot d'ordre de l'organisation syndicale ni à un avis du CE.
Au contraire en Allemagne, et c’est là une différence majeure avec le système français, la grève n’est pas un droit individuel mais un droit syndical, et cela peut expliquer en partie le nombre moins important de grèves en Allemagne.
La grève y est un instrument pour aider l’autonomie des conventions collectives et par conséquent seules des personnes juridiquement aptes à conclure une convention collective peuvent mener une grève, d’après l’art. 2 de la loi concernant les conventions collectives « Tarifvertragsgesetz ». Ainsi seul un syndicat peut mener une grève, et cela est valable pour l’appel à la grève autant que son exécution.[16]
A l’inverse une grève qui n’est pas organisée par un syndicat, donc sauvage, n’est pas couverte par l’art. 9 III de la loi fondamentale et est illégale.
Cependant les syndicats sont autorisés à reprendre en leur nom une grève sauvage d’après une décision du 5.9.1955 du « Bundesarbeitsgericht » (BAG:tribunal fédéral des prud’hommes).[17]
En France, la grève n’est donc pas un droit de nature syndicale, en dépit du particularisme des services publics. En mettant de côté certaines catégories d’agents publics pour lesquels la grève est interdite (police, magistrature, personnel des services pénitentiaires, armée), la grève dans les services publics y compris chez les fonctionnaires est licite, dans le respect du principe de la continuité nécessaire des services publics.
A l’inverse, en Allemagne, le droit de grève n’est pas accordé aux fonctionnaires.
Une conciliation doit être recherchée entre la défense des intérêts professionnels manifestée par la grève, et le respect de l’intérêt général qu’assure le service public.
Cette exigence a été énoncée par le Conseil d’Etat dans l’arrêt Dehaene en 1950 et elle a été reprise par le Conseil constitutionnel selon lequel, tant la continuité du service public que la liberté de faire grève, est un principe à valeur constitutionnelle.
La grève dans les services publics nuit plus aux usagers qu’à la direction, aussi le législateur tend-il à la soumettre à des conditions plus restrictives, dans ses conditions d’exercice et dans ses efforts (art. L 2512-1 et s. du Code du travail).[18]
Après avoir vu que concernant la cessation complète, collective et concertée du travail qu’il y avait certaines ressemblances mais aussi des divergences, voyons maintenant s’il en est de même à propos des revendications que doit porter la grève, et ce à quel moment.
II. L’existence de revendications professionnelles
Pour qu’un mouvement puisse être qualifié de grève, d’après la définition il faut qu’il porte des revendications, ce que nous chercherons à déterminer dans un premier temps c’est à quel moment ces revendications doivent être portées (A), avant de voir ensuite ce qui est admis dans les revendications (B).
A/ Intervention chronologique des revendications
Tout en reconnaissant la licéité du principe de la grève, diverses législations la réglementent dans des sens différents. Lorsque la grève est un droit syndical comme en droit allemand, les syndicats peuvent signer un engagement de paix sociale, qui est opposable aux salariés: le recours à la grève peut être suspendu pendant la période d’application de la convention collective à durée déterminée.
En France, les salariés peuvent arrêter le travail et se mettre en grève, en l’absence de toute initiative syndicale: « un arrêt de travail ne perd pas le caractère de grève licite du fait qu’il n’a pas été déclenché à l’appel d’un syndicat ».[19]
C’est seulement dans les entreprises gérant un service public que l’ordre de grève doit nécessairement émaner d’une organisation syndicale et qu’un dépôt de préavis est nécessaire, d’où la fréquence des grèves « sauvages », il y a donc là encore une différence très importante dans les deux systèmes qui peut expliquer le nombre plus important de grèves en France.
Un arrêt de la Cour de cassation du 7 juin 1995 énonce qu’une convention collective ne peut pas avoir pour effet de limiter ou de règlementer pour les salariés l'exercice du droit de grève, droit dont la Cour de cassation rappelle qu'il est constitutionnellement reconnu.
En Allemagne, la grève ne peut pas aller à l’encontre d’une convention collective qui est obligatoire.[20] Cela veut dire que les parties au conflit social doivent respecter l’obligation de paix « Friedenspflicht » qui résulte d’une convention collective encore en cours.[21]
Tout ce que les parties à la convention auront décidé d’inclure dans la convention relèvera du domaine pour lequel on ne peut pas faire grève depuis la conclusion jusqu’à l’expiration de la convention collective en raison de cette obligation de paix.[22] . Une telle obligation de respecter la « paix du travail » n’est pas admise en droit français.
Enfin si la grève suppose l’existence de revendications non satisfaites, la loi ne prévoit pas la manière dont elles ont à être communiquées à l’employeur ni même une phase préalable au cours de laquelle l’employeur aurait refusé de satisfaire les revendications présentées comme l’énonce l’arrêt de la Cour de cassation du 24 mars 1988.[23]
La jurisprudence exige seulement que l’employeur ait été informé des revendications professionnelles avant l’arrêt de travail, peu important les modalités de cette information.
Il y a donc en France l’absence de nécessité d’une procédure préalable.
Mais la grève peut précéder leur rejet par l’employeur, sans être pour autant fautive. Elle n’est pas un « ultime remède » et la stipulation d’un préavis de grève par une convention collective est inopposable aux salariés. Dans les services publics il en va autrement: condamnant la grève surprise l’art. L 2512-2 du Code du travail dispose que la cessation concertée du travail doit être précédée d’un préavis.[24]
En droit allemand la grève ne peut être réalisée qu’après épuisement de toutes les possibilités d’entente et doit donc être le remède ultime « ultima ratio ». [25]
Il ne doit donc pas exister d’autre moyen de trouver un accord équivalent mais qui éviterait autant de tumulte.[26] C’est aux parties à la négociation de déterminer si faire grève était bien le dernier moyen possible pour arriver à ses fins, car si le tribunal des prud’hommes le vérifiait il serait censeur des conventions collectives.[27]
Cette notion de remède ultime fait partie d’une interdiction d’avoir recours à des mesures excessives lors d’un conflit social « Übermassverbot ». Cela ne signifie pas que cette obligation de négociation oblige à trouver un compromis, les parties au conflit peuvent décider que la négociation a échoué. En démonstration du durcissement des négociations le « Bundesarbeitsgericht » (tribunal fédéral des prud’hommes) autorise les grèves de prévention « Warnstreik » entre lesquelles les négociations continuent pour montrer que le syndicat est prêt à organiser une vraie grève, et seulement si après tout ça aucun accord n’est trouvé, alors une grève peut être légalement autorisée.[28]
Une particularité du système français par rapport au système allemand est d’admettre la licéité de la grève née d’un différent juridique ou d’interprétation qui pourrait être porté en justice.
Se trouve donc écartée la conception de la grève comme « ultime remède ».
Même attitude en face de la grève éclatant alors qu’une convention collective a été signée et lie les parties: cette grève n’est pas irrégulière, alors même qu’elle surgit indépendamment du renouvellement de la convention collective. L’exercice du droit de grève n’est donc subordonné ni à l’impossibilité d’une action judiciaire, ni à négociation collective.[29]
Si on retient en plus qu’un appel à la grève des syndicats n’est pas nécessaire, on comprend mieux cette différence entre les deux pays dans la « culture de la grève ».
B/ Contenu des revendications
Peu importe l’objet des revendications, tout ce que la jurisprudence exige c’est qu’il existe des revendications professionnelles non satisfaites. La grève professionnelle licite est non seulement celle qui tend à obtenir une augmentation des salaires, mais aussi celle qui tend à obtenir de meilleures conditions de travail, celle destinée à contraindre l’employeur à remplir des engagements, mais encore celle lancée pour s’opposer au licenciement de représentants du personnel ou à un licenciement collectif, pour défendre l’emploi en général, ou pour défendre l’exercice du droit syndical.[30]
Concernant les grèves politiques et leurs objectifs, pour la Chambre criminelle de la Cour de cassation la qualification de grève peut être retenue dès l'instant où ses mobiles sont à la fois professionnels et politiques. Il s'agit alors d'une grève mixte. Pour la Chambre sociale, l'aspect politique ne doit pas être prédominant. Ces grèves peuvent donc être admises en droit français, alors qu’en droit allemand, ces grèves ne sont pas légales parce qu’elles sont tournées contre des organes étatiques (surtout le gouvernement) qui sont mis sous pression à cause des retombées économiques négatives. Ainsi la grève n’est pas une obtention par la force d’un objectif qui peut se régler dans une convention collective mais plutôt dans une décision parlementaire, elle est donc illégale.[31]
Pour ce qui est des grèves de solidarité, il s'agit de savoir si les salariés peuvent faire grève pour soutenir en tout ou en partie les intérêts d'autrui.
La Cour de cassation distingue entre la grève de solidarité interne à l'entreprise ou externe.
Lorsque la grève manifeste une solidarité interne à l’entreprise, ou bien le mouvement est de pure solidarité, c’est-à-dire que les grévistes ne présentent pas de revendications les concernant eux-mêmes et prennent seulement la défense d’un camarade de travail, la grève est alors illicite (arrêt Cour de cassation du 30 mai 1983), ou bien les grévistes tout en prenant la défense d’autrui présentent des réclamations professionnelles les concernant eux-mêmes, et la grève est dans ce cas licite (arrêt Cour de cassation du 22 novembre 1995).[32]
La grève externe à l'entreprise est possible, notamment pour appuyer une journée de grève nationale (arrêt Cour de cassation du 17 décembre 2003). Le fait de cesser le travail pour répondre à l’appel d’un syndicat protestant contre une politique sociale gouvernementale ou patronale, est l’expression légitime d’une solidarité professionnelle. Le mot d’ordre syndical légitime le mouvement, malgré le rejet d’une conception organique du droit de grève.[33]
Enfin il y a le principe de refus de l’autosatisfaction des désirs, valable dans les deux systèmes juridiques, et selon la jurisprudence la qualification de grève ne peut pas être retenue lorsqu'il y a coïncidence entre l'objectif de l'arrêt de travail et les résultats obtenus immédiatement par cet arrêt (arrêt de la Cour de cassation du 21 octobre 2009). Effectivement ça n’est pas une grève, dans la mesure où les salariés ne font pas pression sur l’employeur dans le but d’obtenir satisfaction d’une revendication.[34]
En Allemagne à la différence de la France, les revendications doivent absolument avoir pour objet quelque chose qui est de l’ordre de la convention collective.
En effet, de l’art. 9 III de la loi fondamentale allemande découle que la grève ne peut être menée que dans le but d’édifier une convention collective, et elle n’est légale que si elle est dirigée contre une personne qui peut conclure une convention collective (BAG DB 1972).[35]
Dans un arrêt du 21 avril 1974 le BAG a érigé le principe de proportionnalité en l’un des principes fondamentaux du droit de la grève « verhältnissmässigkeitsprinzip ».[36]
Du fait qu’il y ait beaucoup d’interdépendances dans notre société, une grève n’a pas d’effets que sur les parties à la grève mais également sur les non-grévistes et sur des tiers, par conséquent les grèves doivent respecter le principe de proportionnalité.[37]
Le principe de proportionnalité touche donc l’objectif et le moment d’intervention de la grève mais également la manière d’exécution ainsi que son intensité.[38]
Chaque grève doit être « geeignet » et « erforderlich » c’est-à-dire appropriée et nécessaire pour atteindre un objectif légal et ce qui est d’importance centrale dans le conflit social, c’est que la grève soit dans l’ensemble proportionnelle.[39]
En conclusion, on peut retenir que le droit de grève en France et en Allemagne ont des points de ressemblance, mais du fait que la grève soit un droit syndical en Allemagne et un droit individuel en France et que la grève sauvage soit prohibée en Allemagne, on arrive à des conceptions de l’exercice de la grève qui sont très différentes et qui expliquent la rareté des grèves en Allemagne et leur récurrence en France.
Bibliographie
- Arbeitsrecht, Academia Iuris, Vahlen 9. Auflage, Löwisch, Caspers, Klumpp
- Kollektives Arbeitsrecht, Alpmann Schmidt 4. Auflage
- Arbeitsrecht, Grundrisse des Rechts Verlag C.H.Beck 13. Auflage, Wilhelm Dütz
- Arbeitsrecht Studienkommentar, Verlag C.H.Beck 2. Auflage, Christian Rolfs
- Arbeitsrecht Lehrbuch, Vahlen Jura 15. Auflage, Söllner, Walterman
- Droit du travail, Précis Dalloz 24ème édition, Jean Pélissier, Alain Supiot, Antoine Jeammaud
- Droit du travail, Montchrestien 5ème édition, Antoine Mazeaud
[1] Droit du travail, Précis Dalloz 24ème édition, Jean Pélissier, Alain Supiot, Antoine Jeammaud, p. 1405
[2] Droit du travail, Montchrestien 5ème édition, Antoine Mazeaud, p.252
[3] Arbeitsrecht, Vahlen Jura 15. Auflage, Söllner, Waltermann, p. 257
[4] Droit du travail, Montchrestien 5ème édition, Antoine Mazeaud, p.254
[5] Droit du travail, Précis Dalloz 24ème édition, Jean Pélissier, Alain Supiot, Antoine Jeammaud, p. 1409
Arbeitsrecht, Grundrisse des Rechts Verlag C.H.Beck 13. Auflage, Wilhelm Dütz, p. 336
[6] Kollektives Arbeitsrecht, Alpmann Schmidt 4. Auflage, p.59
[7] Soc. 18 avril 1963
[8] Soc. 23 mars 1953
[9] Droit du travail, Précis Dalloz 24ème édition, Jean Pélissier, Alain Supiot, Antoine Jeammaud, p. 1424
[10] Droit du travail, Montchrestien 5ème édition, Antoine Mazeaud, p.258
[11] Kollektives Arbeitsrecht, Alpmann Schmidt 4. Auflage, p.56
[12] Arbeitsrecht, Academia Iuris, Vahlen 9. Auflage, Löwisch, Caspers, Klumpp, p.302
[13] Droit du travail, Montchrestien 5ème édition, Antoine Mazeaud, p.253
[14] Droit du travail, Précis Dalloz 24ème édition, Jean Pélissier, Alain Supiot, Antoine Jeammaud, p. 1406
[15] Soc. 3 octobre 1963
[16] Arbeitsrecht, Academia Iuris, Vahlen 9. Auflage, Löwisch, Caspers, Klumpp, p.306
[17] Arbeitsrecht Studienkommentar, Verlag C.H.Beck 2. Auflage, Christian Rolfs, p. 27
[18] Droit du travail, Précis Dalloz 24ème édition, Jean Pélissier, Alain Supiot, Antoine Jeammaud, p. 1410
[19] Soc. 19 février 1981
[20] Arbeitsrecht, Academia Iuris, Vahlen 9. Auflage, Löwisch, Caspers, Klumpp, p.303
[21] Arbeitsrecht, Academia Iuris, Vahlen 9. Auflage, Löwisch, Caspers, Klumpp, p.310
[22] Arbeitsrecht Studienkommentar, Verlag C.H.Beck 2. Auflage, Christian Rolfs, p. 28
[23] Droit du travail, Précis Dalloz 24ème édition, Jean Pélissier, Alain Supiot, Antoine Jeammaud, p. 1416
[24] Droit du travail, Précis Dalloz 24ème édition, Jean Pélissier, Alain Supiot, Antoine Jeammaud, p. 1416
[25] Kollektives Arbeitsrecht, Alpmann Schmidt 4. Auflage, p.62
[26] Arbeitsrecht, Grundrisse des Rechts Verlag C.H.Beck 13. Auflage, Wilhelm Dütz, p. 328
[27] Arbeitsrecht, Grundrisse des Rechts Verlag C.H.Beck 13. Auflage, Wilhelm Dütz, p. 329
[28] Arbeitsrecht, Academia Iuris, Vahlen 9. Auflage, Löwisch, Caspers, Klumpp, p.308
[29] Droit du travail, Précis Dalloz 24ème édition, Jean Pélissier, Alain Supiot, Antoine Jeammaud, p. 1422
[30] Droit du travail, Précis Dalloz 24ème édition, Jean Pélissier, Alain Supiot, Antoine Jeammaud, p. 1420
[31] Arbeitsrecht, Grundrisse des Rechts Verlag C.H.Beck 13. Auflage, Wilhelm Dütz, p. 320
[32] Droit du travail, Précis Dalloz 24ème édition, Jean Pélissier, Alain Supiot, Antoine Jeammaud, p. 1421
[33] Droit du travail, Montchrestien 5ème édition, Antoine Mazeaud, p.259
[34] Droit du travail, Montchrestien 5ème édition, Antoine Mazeaud, p.261
[35] Arbeitsrecht, Grundrisse des Rechts Verlag C.H.Beck 13. Auflage, Wilhelm Dütz, p. 318
[36] Arbeitsrecht Studienkommentar, Verlag C.H.Beck 2. Auflage, Christian Rolfs, p. 28
[37] Arbeitsrecht Studienkommentar, Verlag C.H.Beck 2. Auflage, Christian Rolfs, p. 28
[38] Arbeitsrecht Studienkommentar, Verlag C.H.Beck 2. Auflage, Christian Rolfs, p. 29
[39] Arbeitsrecht Lehrbuch, Vahlen Jura 15. Auflage, Söllner, Walterman, p. 267