Interactions droit international et européen

Si la question de la peine de mort fait débat depuis l’Antiquité, son abolition est aujourd’hui désirée par une grande part de l’opinion publique européenne et mondiale. Cette tendance est renforcée par l’émergence des droits de l’Homme. Les systèmes international et européen de protection des droits de l’Homme ont évolués de manière importante depuis leur création. Les textes originaires ont ainsi été progressivement amendés par différents protocoles. L’action des organes de contrôle a été primordiale. Certains arrêts européens (Soering c/ Royaume-Uni de 1989 et Öcalan c/ Turquie de 2005) et certaines décisions internationales (CDH, Kindler c/ Canada en particulier) constituent en effet les bases de cette évolution.

Alors que les décisions rendues par le TPI en 2005 dans les affaires Kadi et Yusuf suscitaient une importante controverse, la CJCE y a mis un terme en statuant le 3 septembre 2008 sur les différents pourvois introduits contre ces décisions. Elle a annulé les arrêts du TPI et consacré l’indépendance de l’ordre juridique communautaire en se déclarant compétente pour contrôler les actes communautaires adoptés en application des résolutions du Conseil de Sécurité des Nations Unies dans le cadre du Chapitre VII de la Charte. La Cour s’est notamment appuyé sur l’existence de principes constitutionnels inhérents à l’ordre juridique communautaire, que même les normes de droit international ne peuvent violer. La Cour refuse d’établir entre le droit international et communautaire une hiérarchie favorable au premier. Elle adopte une position plus claire que celle retenue par la CEDH. Cette jurisprudence illustre bien l’exception communautaire en matière de protection des droits fondamentaux. CJCE 3 septembre 2008, aff. C-402/05 P, Kadi.

La Cour Européenne des droits de l’homme (CEDH) et la Cour Interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) sont deux juridictions régionales des droits de l’homme. Elles sont chargées de protéger les droits reconnus par leurs conventions respectives. Dans l’affaire Mazni, la CEDH se réfère expressément à une jurisprudence de la CIDH en matière de droit à un procès équitable. Cette référence par la CEDH à la jurisprudence de la CIDH répond à une pratique plus ancienne de la CIDH envers la jurisprudence de la CEDH. Elle forme le début d'un dialogue qui marque un rapprochement des deux cours. CEDH, 21 septembre 2006, Mazni c. Roumanie, requête n° 5982/00

Le 30 octobre, le grand jury de la cour fédérale de Floride a prononcé la première condamnation d’un citoyen américain pour crimes de torture et complicité commis à l’étranger (Déclaration de culpabilité). Cette compétence pénale extraterritoriale des juges américains est une avancée notable pour une prohibition effective de la torture et pour la lutte contre l’impunité. Cependant, la position adoptée par les juges dans cet arrêt est contradictoire avec la politique interne suivie par le gouvernement américain ces dernières années. Elle mérite également d’être comparée aux garanties offertes par l’Europe, et plus particulièrement par la France, concernant la prohibition de la torture pour des actes commis hors du territoire national. U.S. v. Charles McArthur Emmanuel, U.S. District Court, Southern District of Florida (Miami), case no. 06-20758-CR (http://www.haguejusticeportal.net/Docs/NLP/US/TaylorJR_OmnibusOrder_29-6...)

L’Union européenne – organisation internationale et régionale – est constituée par des traités. Or, le droit de l’Union européenne ne prévoit pas explicitement à l’heure actuelle de possibilités pour mettre fin à l’adhésion d'un Etat membre. Le Traité de Lisbonne, une fois ratifié, introduira une clause explicite de retrait au nouvel article 50 UE, mettant ainsi fin aux débats sur l'applicabilité le droit international. Article 50 du Traité UE (version consolidée par le Traité de Lisbonne, non entrée en vigueur)

Aussi bien le GATT que le Traité instituant la Communauté européenne autorisent les Etats parties à déroger aux règles de libre-échange pour protéger leur « moralité publique ». L’étude comparée des articles XX a) GATT et 30 TCE permet de mettre en lumière les différences et les ressemblances des deux systèmes et de mieux définir le contenu de l’exception du GATT qui n’a encore jamais fait l’objet d’un différend. Articles XX a) GATT et 30 TCE

Le Professeur Haratsch, analysant l’arrêt Bosphorus de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, propose une comparaison intéressante entre cet arrêt et celui de la Cour constitutionnelle allemande consacrant le principe de la protection équivalente. Ces deux Cours conditionnent en effet leur coopération avec le juge communautaire au respect d’un standard minimum de protection des droits de l’Homme.

Haratsch Andreas, Die Solange-Rechtsprechung des Europäischen Gerichtshofs für Menschenrechte – Das Kooperationsverhältnis zwischen EGMR und EuGH, Zeitschrift für ausländisches öffentliches Recht und Völkerrecht, 2006, pp. 927 – 947

Depuis quelques années, il est clair que l’intégration européenne touche plus de domaines que les simples questions économiques. Ainsi, une nouvelle génération émerge de citoyens mobiles vivant et se déplaçant dans plusieurs Etats Membres. Pourtant, les droits nationaux des Etats Membres pour les questions touchant, par exemple, au droit des personnes sont encore très différents. C’est pourquoi les décisions Konstantidinis, Avello et les conclusions de l’avocat général dans la très récente affaire Grunkin Paul montrent toutes une volonté de la Cour de faciliter le mouvement de ces citoyens mais semblent s’y prendre de façon un peu cavalière et au détriment des méthodes classiques du droit international privé. Encore un pan de droit national bouleversé par les nouvelles réalités juridiques européennes? Sources notamment commentées : Affaire C-148/02 Carlos Garcia Avello contre Etat belge Recueil 2003 p I-16613 et Affaire C-353/06 Epoux Grunkin et Paul conclusions de l’avocat général Sharpston du 24 avril 2008

La force obligatoire du droit de l’Organisation Mondiale du Commerce au sein de l’ordre juridique communautaire est au cœur des débats doctrinaux. La position isolationniste des institutions européennes est majoritairement rejetée. M. P. Royla a défendu en 2001 un point de vue plus nuancé, estimant que le refus du juge communautaire de contrôler la conformité du droit dérivé au droit de l’OMC pouvait être justifié. Ce commentaire propose de discuter cette analyse à la lumière de développements intervenus ces dernières années. Royla Pascal, WTO-Recht – EG-Recht : Kollision, Justiziabilität, Implementation, Europarecht Heft 4, 2001, p. 495

Par la directive 2003/86/CE, le législateur européen a établi des critères minimaux communs concernant les conditions matérielles du droit au regroupement familial du ressortissant d’un État tiers afin d’éliminer les obstacles issus des disparités nationales qui empêcheraient le respect du droit à la vie privée et de la protection de la famille tels que consacrés dans plusieurs textes internationaux et régionaux, parmi ces derniers, la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme (CESDH). La transposition de la directive par les législateurs français et espagnols tente de trouver le juste équilibre entre la définition d’une politique d’immigration en accord avec la société et la garantie pour tout étranger de bénéficier du droit subjectif à l’unité familiale. Loi organique espagnole n° 4/2000 du 11 janvier 2000 Loi française n°2007-1631du 20 novembre 2007