Arbitrage et ADR

L’existence des anti-suit injunctions dans les pays de common law, et particulièrement en Angleterre, a fait l’objet de nombreuses controverses, culminant en une jurisprudence de la CJUE condamnant leur utilisation entre États membres de l’Union Européenne. Un arrêt de la Cour Suprême du Royaume-Uni vient rappeler que cette technique persiste, continue à se développer et à affecter le monde de l’arbitrage.

 

Le principe d’autonomie ou separability est un principe fondamental de l’arbitrage international qui permet à la clause compromissoire d’être juridiquement autonome ou séparable du contrat dans lequel elle est insérée. Son effet principal est que le sort d’un contrat faisant l’objet d’un arbitrage n’affecte pas la clause compromissoire. Le principe d’autonomie implique également qu’une loi différente de la lex contractus puisse s’appliquer à la clause compromissoire. Les Etats-Unis et la France ont adopté ce principe mais la méthode de détermination de la loi s’appliquant à la clause compromissoire diffère. 

Les class action permettent à des consommateurs lésés de se regrouper et d’engager la responsabilité d’un tiers au sein d’une même procédure. L’arbitrage des class action (l’arbitrage collectif) est autorisé en Droit américain bien que la Cour suprême y soit hostile. Ainsi, dans American Express v. Italian Colors, la Cour suprême a estimé qu’une renonciation à l’arbitrage collectif dans une clause compromissoire est valable bien que les réparations prévues par la loi antitrust pour les préjudices allégués par les demandeurs dans le cas d’espèce impliquent que tout arbitrage individuel, s’effectuerait forcement à perte. Cette jurisprudence permet aux parties fortes d’échapper à l’arbitrage collectif au moyen d’une clause compromissoire et d’ériger des obstacles de nature économique à l’encontre des demandeurs.

 

RESUME

L’arrêt Scandinavian Reins. Co. v. St Paul F&M Ins. Co. du 3 février 2012 intervient dans la continuité de l’arrêt Applied Industrial Materials Corp. v. Ovalar de 2008 qui mettait déjà en avant la forte politique pro-arbitrage des Etats-Unis. Cependant, ce nouvel arrêt va encore plus loin en établissant des critères très difficiles à remplir lorsqu’il s’agit de prouver la « partialité évidente » de l’arbitre. La question posée à la Cour d’Appel était la suivante : le défaut de révélation de deux arbitres concernant leur implication dans une autre instance arbitrale similaire constitue-t-il une « partialité évidente » au sens de l’article 10(a)(2) du Federal Arbitration Act ? La Cour d’Appel a jugé que non et a réaffirmé cette quasi-impossibilité qui existe en droit américain de faire annuler une sentence arbitrale sur le fondement d’une « partialité évidente » de l’arbitre.

      Par cet important arrêt Sulamerica du 31 mai 2012, la High court se prononce sur la question controversée de la loi applicable à la convention d'arbitrage. Afin de déterminer cette loi, le juge Moore-Bick utilise un raisonnement en trois étapes se situant aux antipodes de la méthode française. L'arrêt soulève également la question de la vérification de l'existence du consentement des parties en présence de clauses à première vue inconciliables.

 

 

Malgré une politique largement en faveur de l'arbitrage, la jurisprudence américaine est très divisée dans son appréhension de l'arbitrage collectif. Aussi appelé class arbitration, l'arbitrage collectif est un recours similaire à la class action au cours duquel plusieurs demandeurs s'assemblent contre un même défendeur pour obtenir réparation d'un préjudice commun. Cependant, l'arbitrage collectif se fait non pas devant un juge mais devant un arbitre et il nécessite l'accord des parties.

 

 

Résumé: La décision AT&T est la traduction la plus récente de l'hétérogénéité de la jurisprudence américaine en matière de class arbitration en droit de la consommation. Si les tribunaux américains malmènent parfois la class arbitration, les Etats Unis ont cependant une longueur d'avance en matière d'action collective par rapport à la France qui oscille entre la crainte des professionnels vis-à-vis de ce type d'action et l'inaptitude actuelle du système civiliste à transposer la class action.

         Le droit anglais, au travers de l’Arbitration Act 1996 Section 29, confère à l’arbitre l’immunité contre les actions en responsabilité civile sous réserve que celui-ci agisse de bonne foi. Si, en droit français, une telle immunité n’est pas prévue par la loi, le juge a néanmoins pu accorder à l’arbitre une protection contre de telles actions. Celle-ci diverge toutefois de celle dont bénéficie l’arbitre en droit anglais, quant à son fondement, mais aussi quant à son degré et son étendue.